Vatican contre reste du monde: la guerre continue

Depuis le 1er janvier, tous les paiements par carte bancaire suspendus au Vatican.... (4/1/2012)

Une dépêche de l'AFP citée par différents medias francophones titrait hier:

Vatican: tous les paiements pas carte bancaire suspendus.

La dépêche semble neutre, purement factuelle. Voire...
Elle a déjà suscité ce matin la satisfaction goguenarde d'une certaine Natacha Polony, chargée de la revue de presse sur Europe 1: elle trouve la nouvelle "amusante", ajoutant finement: «qui a dit qu'il était plus facile à un chameau de passer par le chas d'une aiguille qu'à un riche de rentrer dans le royaume des cieux?».

J'ai regardé la presse italienne, qui ne dit pour le moment pas grand'chose de plus.
Un lecteur du blog de Raffaella note toutefois:

La Repubblica

Vatican, piètre figure mondiale: seul le liquide accepé

Aujourd'hui, en regardant les premières pages des deux "giornaloni" (gros journaux) par excellence, on n'est pas surpris de voir que ceux-ci, qui ignorent systématiquement la prédication du Pape, même quand il aborde les questions sociales et stigmatise le capitalisme non réglementé, ont balancé la nouvelle en belle évidence. Particulièrement répugnante, la mise en page de La Repubblica...

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Voici la traduction d'un article du Corriere della sera : les mêmes infos se retrouvent grosso modo sur la Repubblica - nouvelle preuve que tous les sites, urbi et orbi, sont alimentées par les mêmes agences.
En attendant, le cas échéant, d'autres détails, je trouve que ce commentaire d'un lecteur, Jean P., est un bon résumé des soupçons qui peuvent venir, dans l'état actuel de nos informations:

Comment asphyxier le Vatican : c'est assez incroyable non ?
Le paradoxe est que la carte bancaire est un moyen infaillible pour tracer l'argent et lutter contre le blanchiment.

[en effet... imagine-t-on les files immenses de visiteurs qui patientent chaque jour durant des heures, venant du monde entier, pour voir de leurs yeux les chef-d'oeuvre patiemment assemblés par les Pontifes au cours des siècles pour le plus grand bénéfice de l'humanité? Très souvent, ces gens n'ont sur eux pas d'argent liquide!Quant à la raison invoquée, la lutte contre le blanchiment, elle est a priori incompréhensible]

     

Vatican, cartes de crédit bloquées

Décision de Bankitalia (la Banque d'Italie, dans le langage journalistique) à cause du blanchiment

M.Antonietta Calabrò,
Il Corriere della Sera, 3/1/2013
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La Banque d'Italie a bloqué tous les paiements électroniques à travers les POS (point of sale, en gros, toutes les caisses de paiement) et à travers le circuit mondial des cartes de crédit, dans l'État de la Cité du Vatican. Même ceux pour payer les billets pour les Musées du Vatican, qui chaque année sont visités par cinq millions de touristes.
Des sources du Palazzo Koch (siège de la Banque d'Italie à Rome) expliquent que le Vatican peut avoir tout les POS qu'il veut, mais pas avec les banques italiennes, parce que - conformément à la législation sur le blanchiment d'argent - la petite ville-Etat est considérée comme extra-communautaire (ne faisant pas partie de l'UE) «non équivalent» en termes de surveillance et, dans ce cas précis, de lutte contre le blanchiment d'argent.
Deutsche Bank Italia, qui est la banque "provider" (fournisseur) des nombreux POS sur le territoire du Vatican - selon les mêmes sources de la Banque d'Italie - est un sujet de droit italien, et donc surveillée par la Via Nazionale (où se trouve le Palazzo Koch), mais les avaient ouverts sans l'autorisation nécessaire de la Banquea d 'Italie. Ce n'est qu'au cours de la dernière année, en 2012, qu'elle a présenté une requête en ce sens, qui a toutefois été rejetée par la Via Nazionale. Et c'est pourquoi elle a dû désactiver tous les POS du Vatican: depuis les Musées du Vatican jusqu'à la pharmacie internationale (où peuvent également entrer les citoyens italiens munis de papiers, et d'une ordonnaance), au supermarché d'alimentation, aux magasins de vêtements et de matériel technologique (où l'entrée est réservée aux détenteurs de certaines cartes). Sans parler de la la numismatique et de la philatélie. Déclenchant ainsi une nouvelle «affaire» sur les finances du Vatican.

La nouvelle a été annoncée dans un communiqué publié par courriel par la Direction des affaires économiques du gouvernorat du Saint-Siège et confirmée par une autre note de la comptabilité de l'Etat du Vatican. Seules formes de paiement admises, depuis mercredi, les espèces, les chèques et les distributeurs de billets de l'IOR. L'arrêt des paiements électroniques a été confirmé par le bureau de presse du Saint-Siège, mais il est impossible de savoir quand les services reprendront, de sorte que dans les notes officielles on parle de façon générique de «laps de temps indéterminé» ou «jusqu'à nouvel ordre à définir. "

Le porte-parole du Vatican, le père Federico Lombardi a refusé de commenter les «explications» fournies par la Banque d'Italie sur les raisons qui ont conduit au blocage des POS, mais il s'est limité à expliquer que le blocage était dû au fait que «les relations de certains bureaux de la Cité du Vatican avec l'un de leurs prestataires de services pour l'utilisation des cartes de crédit et des POS présents à l'intérieur de la Cité du Vatican, afin de faciliter le paiement des services pour les touristes et les pèlerins, sont sur le point d'expirer». Le père Lombardi a ajouté que «des contacts sont en cours avec plusieurs fournisseurs, ou prestataires de services» et que «l'on prévoit que l'abandon des services liés aux cartes de crédit dans les POS sera de courte durée».

Le blocage des paiements électroniques est certes une mesure très grave, disent les experts, elle est mise en pratique en présence de situations suspectes, comme par exemple des opérations de blanchiment. «C'est un problème qui est apparu», a-t-on commenté, Via Nazionale.

D'ailleurs, pas plus tard qu'il y a deux semaines, en réponse à une question d'un parlementaire, le secrétaire d'Etat au Trésor du gouvernement Monti, Vieri Ceriani (1), a également insisté sur le caractère extra-communautaire et non-équivalent de la «banque du Vatican», l'IOR, «qui n'est pas autorisée à opérer en Italie».

Le problème du blanchiment est particulièrement sensible: le Saint-Siège a accompli au cours la dernière année, un travail d'ajustement juridique complexe pour faire partie à plein titre des pays qui se conforment aux règles internationales. Au point qu'en Juillet dernier, lors de l'Assemblée plénière du Comité MONEYVAL de Strasbourg, il a reçu une recoonaissance significative («Le Saint-Siège a parcouru un long chemin en un très court laps de temps», écrit le Conseil de l'Europe), mais aussi l'invitation à «renforcer son régime de surveillance».
Un nouvel examen est prévu dans six mois.
L'avis de blocage des POS ouvre la page d'accueil du site officiel des Musées du Vatican, sous le titre «Pas de paiements électroniques depuis le 1er janvier» avec la formule rituelle: «Nous nous excusons pour les possibles inconvénients». (en anlais, sur les pages en français! http://mv.vatican.va/5_FR/pages/MV_Home.html)

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(1) Difficile de savoir plus que la biographie officielle sur ce typique haut-fonctionnaire de la finance internationale devenu ministre du gouvernement "technique" de Mario Monti, sans auune légitimité "démocratique": Vieri Ceriani, né en 1950, est diplômé d'économie de la "La Sapienza" de Rome. Ayant remporté la bourse Bonaldo Stringher , en 1975-1976, il a suivi un cours de spécialisation en économie de l'Université du Michigan (USA).
Entré à la la Banque d'Italie en 1976, il a été entre 1993 et 2001 (où la droite de Silvio Berlusconi et la gauche de Romano Prodi et Massimo d'Alema ont alterné au pouvoir, cf. fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_gouvernements_d'Italie ), conseiller économique de divers ministres des Finances.

Il représente la Banque d'Italie auprès de nombreux comités, groupes de travail et commissions de la BCE, le Ministère de l'Economie, des institutions publiques et privées nationales et internationales.