Accueil | D'un Pape à l'autre | Retour au Vatican | Collages de Gloria | The hidden agenda | Lumen Fidei | Lampedusa | Benoît et les jeunes

Un nouveau Secrétaire d'Etat...

et pas de révolution. (2/9/2013)

Le Pape François vient de nommer son Secrétaire d'Etat.
Je ne le connais pas, et je me range volontiers à ce qu'écrit (ici) - non sans malice - don Ariel Levi di Gualdo, l'un des chroniqueurs du site Papale papale:

Je n'ai rien à dire sur l'archevêque Pietro Parolin, actuel nonce apostolique au Venezuela puisque que je ne le connais pas, mais si l'actuel évêque de Rome l'a choisi, il sera certainement la juste personne au juste moment. Par contre j'ai lu comme d'authentiques articles comico-grotesques l'allégresse des différents vaticanistes italiens qui ont immédiatement fait l'éloge du nouveau Secrétaire d'Etat avec l'esprit courtisan de quelqu'un qui s'empresse de sauter sur le char du nouveau cavalier, oublieux de la façon dont, jusqu'à hier, il faisait des sauts acrobatiques pour s'assurer de la présence du cardinal Bertone à la présentation de ses livres ou à ses conférences, ou pour faire baptiser ses enfants. Au cas où vous ne le sauriez pas, je vous informe qu'un baptême reçu d'un cardinal, et d'autant plus à l'enfant d'un vaticaniste, doit être considéré comme un sacrement qui vaut plus que les sacrements de seconde classe administrés par nous autres, simples prêtres....

Je n'ai jamais cru non plus que le cardinal Bertone a été la source de tous les maux de l'Eglise pendant le Pontificat de Benoît XVI.
Il a (peut-être) commis des erreurs apparemment dans le domaine financier - mais je ne pense pas que c'était un intrigant.

Répondant hier aux questions des journalistes réunis à Syracuse (en Sicile), où l'on célébrait le 60e anniversaire du prodige de la Madone des larmes, il leur a dit en substance: "J'ai peut-être mes défauts, mais j'ai tout donné, j'ai servi l'Eglise et j'ai été un serviteur loyal du Pape" (cf. www.blitzquotidiano.it).

L'article de Riccardo Cascioli, que j'ai traduit, explique qu' "on" ne lui a jamais pardonné de ne pas sortir du moule - en l'occurrence, la carrière diplomatique. Un peu comme chez nous, un non-énarque dans le cabinet d'un ministre. Ou un journaliste qui n'aurait pas fait Science Po. Ou un non "X" ou "Ulm" qui se retrouverait à la salle des marchés de la BNP.
Et "on" lui a fait payer au prix fort.

L'article permet de comprendre les motivations du choix d'alors de Benoît XVI, et laisse percevoir les pressions qu'il a dû subir, et finalement la lassitude qui l'a conduit à se retirer.

     

Pietro Parolin, Secrétaire d'Etat
Discontinuité mais pas trop
Riccardo Cascioli
www.lanuovabq.it
01-09-2013

Une claire discontinuité mais en forte syntonie avec son prédécesseur. C'est ainsi que l'on peut synthétiser le choix du nouveau Secrétaire d'Etat par le Pape François. La nomination, en remplacement du cardinal Tarcisio Bertone de l'archevêque Pietro Parolin - 58 ans, originaire de Vicenza, actuellement nonce au Venezuela mais pendant de nombreuses années déjà "ministre des affaires étrangères" au Vatican, a été officialisée hier, mais elle était annoncée depuis plusieurs jours.

La discontinuité était évidente: avec Parolin, on revient à un secrétaire d'Etat issu de la carrière diplomatique, après la parenthèse de Bertone, qui a soulevé tant de critiques et de polémiques. Le nouveau secrétaire d'Etat, qui entrera effectivement en fonction à la mi-octobre, est décrit comme un serviteur de l'Eglise fidèle et disponible, quelle que soit la charge qui lui est confiée, et aussi un diplomate compétent, auquel est attribué, par exemple, l'amélioration des relations de l'Eglise avec le Vietnam.
Le changement, par ailleurs, ne concerne que la "tête" de la Secrétairerie d'Etat, puisque les autres charges ont été confirmées: le substitut Giovanni Angelo Becciu, le secrétaire pour les relations avec les Etats Dominique Mamberti, le sous-secrétaire Antoine Camillieri. Aucune révolution, donc, que beaucoup, au contraire, attendaient et espéraient, même si le changement à la Curie n'en est qu'à ses débuts.

D'autre part, le cardinal Bertone reste - au moins pour le moment - à la tête de la commission cardinalice de surveillance de l'IOR, ce qui signifie que son ère n'est pas encore finie. Les affaires de l'IOR représentent en effet un des points les plus controversés au cour de son mandat: il suffît de se rappeler les scandales financiers récemment émergés: la tentative d'impliquer l'institut dans le mega-projet d'un pôle sanitaire vatican, passant par le sauvetage de l'hôpital San Raffaele (opération qui heureusement a échoué par la suite); le "stop" au processus de transparence voulu par Benoît XVI, avec l'éviction ignominieuse du président Ettore Gotti Tedeschi. Il est presque banal d'affirmer que tant que Bertone restera dans cette position, il sera très difficile, voire impossible, de faire la lumière sur toute ces affaires.

Ceci dit, toutefois, dans les critères de choix, on doit noter un forte syntonie entre le Pape François et son prédécesseur. Il ne faut pas oublier, en effet, que le Pape Benoît XVI avait lui aussi commencé son Pontificat à l'enseigne de la réforme de la Curie vaticane, et le choix du cardinal Bertone comme secrétaire d'Etat était un signal fort de renouveau, pour ne pas dire de désaveu des membres de la Curie. Bertone, en effet, ne venait pas de l' "école" de la diplomatie vaticane, et sa nomination signifiait la volonté de privilégier l'évangélisation par rapport aux préoccupations "politiques" typiques des milieux diplomatiques. En outre, Papa Ratzinger avait choisi quelqu'un qu'il connaissait bien, et avec qui il avait un rapport de confiance absolue, puisque Bertone avait été pendant des années secrétaire de la CDF quand lui-même en était le préfet.

La sagesse des critères et l'excellence des intentions ne garantissent toutefois des résultats à la hauteur. Ainsi, la direction de la Secrétairerie d'Etat par le cardinal Bertone, s'est transformé en un calvaire pour le Pape, pris entre le fait de pouvoir compter sur une personne de confiance et la pression croissante des évêques et des cardinaux qui lui demandaient d'éloigner le cardinal Bertone de la Secrétairerie d'Etat.

C'est justement à cause de ce qui est arrivé qu'aujourd'hui, le pape François se trouve devoir procéder à la réforme de la Curie avec encore plus d'urgence, et encore plus de pression. Et lui aussi semble agir sur la base de connaissances personnelles, et sur les conseils d'une équipe réduite de personnes, en qui il a confiance, ou croit pouvoir avoir confiance. Ce qui, comme pour son prédécesseur, ne le met pas à l'abri de choix malheureux, comme du reste cela est arrivé ces derniers mois.
Pour la Secrétairerie d'Etat, il a misé sur une personne d'expérience diplomatique, avec une capacité éprouvée de travailler avec tous, et en tout cas, Mgr Parolin ne jouira pas de tout le pouvoir et de toute la liberté d'action que s'était en revanche assurés son prédécesseur.
Il faut donc prier pour que ses nouveaux collaborateurs secondent vraiment le Pape dans la tâche de porter le Christ partout, y compris dans les plus lointaines périphéries existentielles