Accueil

Un mur face à la puissance supérieure du mal

Le dernier Restàn est consacré à la cérémonie de béatification de 522 martyrs, victimes de la haine anticatholique durant la guerre civile d'Espagne, dimanche 13 octobre à Tarragone. Traduction de Carlota (16/10/2013)

Original ici: www.paginasdigital.es

>>> Cf Holocauste catholique

     

Un mur face à la puissance supérieure du mal


André Malraux disait, en parlant des Européens modernes, qu’«Il n’est pas d’idéal auquel nous puissions nous sacrifier, car de tous nous connaissons les mensonges, nous qui ne savons point ce qu’est la vérité». C’est une affirmation chargée d’un amer réalisme que défient les 522 martyrs qui ont été proclamés à Tarragone, assassinés par haine de la foi durant les années trente du siècle dernier. Cela n’a pas été un acte d’auto-affirmation, comme une médaille que l’Église s’accroche à sa propre poitrine, mais un geste de mémoire que nous vivons avec crainte et tremblement. Comme celui qui est en face de quelque chose qui est d’un autre monde. Parce que le martyr ne le devient pas à coups d’effort : il surgit comme une faible plante, comme une fleur de grâce sur la terre de l’Église. Le martyr surgit pour proclamer face au monde la vérité que cherche le monde, pour montrer cet Idéal qui mérite qu’on lui donne sa vie.

Il est certain que tout au long de l’histoire nous les chrétiens nous sommes tombés de nombreuses fois dans ce que le Pape François appelle « la mondanité spirituelle », nous nous sommes laissés bercer par les pouvoirs du monde, nous avons fini par faire confiance aux idoles. Mais toujours, comme un mystérieux contrecoup, est apparue la grâce du martyre. Des hommes et des femmes normaux et ordinaires, qui n’auraient pas souhaité voir leurs noms dans les livres, se sont dressés face à la puissance supérieure du mal, la poitrine à nue, avec la seule force de la foi. Comme l’a affirmé dans son homélie le Cardinal Amato (2), « avec leur charité, les martyrs se sont opposés à la fureur du mal, comme un puissant mur s’oppose à la violence monstrueuse d’un tsunami, avec leur mansuétude ils ont désactivé les armes des tyrans et des bourreaux, vainquant le mal avec le bien. Ils sont les prophètes toujours actuels de la paix sur terre ».

Parmi ceux qui ont été nommés à Tarragone, un par un, chacun avec son visage et son histoire bien documentée, il y en a de tout type et condition. Des jeunes (presque des enfants), des vieux, des hommes et des femmes, des intellectuels et des gens de la campagne, des religieux et des laïcs. Ils sont nombreux les cas où les bourreaux eux-mêmes sont restés la bouche ouverte comme ce centurion au pied de la croix, dans les faubourgs de Jérusalem, se demandant qui ils étaient et quel trésor possédaient ceux qui acceptaient la mort avec le pardon et la gratitude aux lèvres, en montrant une humanité que leurs propres exécuteurs ne pouvaient cesser de désirer. C’est la question que justement nous pouvons nous faire tous, croyants et non croyants.

---

Notes de traduction

(1) Malraux qui avait écrit son roman « l’Espoir » où il relatait son expérience comme aviateur dans les forces armées du camp dit républicain, tourna en 1938 « Sierra de Teruel » (titre français lors « Espoir, sierra de Teruel »). La plus grande partie du tournage s’est fait en Catalogne dont Barcelone et Tarragone. Le tournage fut interrompu par l’avancée des troupes du camp dit national. L’équipe passa la frontière à Portbou et le film fut terminé à Paris, mais ne sortit en France qu’après la seconde guerre mondiale.
Il semble que la Gestapo dans la France envahie localisa et fit détruire le négatif et toutes les copies sauf une qui avait été conservée dans la caisse d’un autre film, ou par erreur ou du fait de l’initiative d’un employé anonyme des laboratoires Pathé. C’est à partir de cette copie que fut tirée la version de 1945.

(2) Préfet de la Congrégation pour les causes des saints, représentait le pape à la cérémonie