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Un pape centriste?

C'est plus ou moins l'analyse de John Allen, qui remarque par ailleurs que le Pape n'a pas l'intention de mener les batailles politiques chères à la droite catholique (21/9/2013)

Centriste, pour les uns, c’est la voix de la raison, de l’équilibre, de « l’ouverture », de la « tolérance ». En somme, la phase ultime de la "démocratie", au sens noble du terme.
Pour les autres, c’est l’attitude louvoyante de ceux qui n’ont pas le courage de trancher, qui ne parviennent pas à faire en sorte que « leur oui soit oui et leur non soit non » ; qui ne veulent mécontenter personne, et finissent par décevoir tout le monde.
Nous ne savons pas encore ce qu'il en sera pour François (n'oublions pas, toutefois, que l'Eglise n'est pas une démocratie, mais une institution divine).

Coïncidence ? hier, j'ai entendu dans la bouche d'un commentateur du "fait religieux" omniprésent dans les médias, dont je tairai le nom (en général, il est beaucoup moins perspicace!) que François lui faisait penser à VGE lorsqu'il a été élu président en 1974 (1).

Allen souligne aussi que les propos du Pape reviennent à un désaveu de l'épiscopat américain qui a mené la bataille sur l'avortement et le mariage gay. Désaveu qui vaut peut-être en France aussi, pas forcément pour les évêques, mais pour les militants du "Printemps Français", et les centaines de milliers de personnes impliquées dans la lutte contre la reconnaissance du « mariage » en question.

     

Sur le mariage gay, François "gèle" les évêques US

Le Pape n'a pas l'intention de mener les batailles politiques chères à la droite catholique, surtout aux Etats-Unis.
John Allen JR

Vatican Insider, 20/9/2013 (ma traduction)
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François est le pape du centre catholique, c'est-à-dire ni de l'Occident radical, ni de la droite. Sur les thèmes comme l'avortement, l'homosexualité, les femmes, il ne change pas l'agenda de l'Eglise, comme le voudrait l'agenda de l'Occident radical. En même temps, il n'a pas l'intention de mener des combats politiques, ce qui en revanche serait l'agenda de la droite catholique, en particulier aux USA.
Lui se positionne comme le Pape de la majorité silencieuse de l'Eglise, c'est-à-dire la majorité modérée, qui ne veut pas changer les enseignements, mais le ton. Il veut une Eglise plus généreuse, pleine de compassion, et moins encline à juger. Ceci a toujours été le programme du centre catholique, et de François. A présent, il reste à voir quel effet cela aura sur l'agenda général de l'Eglise.

Jean Paul II, pendant 27 ans, a voulu une Eglise plus évangélique: il a créé un mouvement, mais au terme de son pontificat, il était encore incomplet. Benoît XVI, pendant huit ans, a voulu une institution plus traditionnelle, avec quelque succès. A présent, dans quelle mesure François changera-t-il vraiment la culture de l'Eglise? A coup sûr, il en change la perception. Le Pape a dit avec clarté qu'il n'est pas un militant de la droite, c'est pourquoi je soupçonne que la réaction, parmi les conservateurs américains, sera que ce pape n'est pas leur homme.

La majorité des conservateurs prend l'autorité papale au sérieux, et donc ils feront un effort pour donner leur "spin" à ses paroles, sans critiques ouvertes (ndt: c'est ce que je disais ici: Le Pape jésuite). En coulisses, toutefois, ils arriveront à la conclusion que ce Pape ne fera pas avancer leur agenda.
Dans cette brève période, cependant, le vrai danger est que beaucoup de 'liberal' (progressistes) pensent que le Pape est leur homme, et fera avancer leur agenda, et qu'ils aient donc de fausses expectatives. Il y a 70 millions de catholiques aux Etats-Unis, donc il y aura donc toutes les réactions possibles sous le soleil. Beaucoup, cependant, prendront ses paroles en opposition avec ce qu'ils ont entendu ces dernières années des évêques américains, qui ont mené la bataille contre l'avortement et les mariages gay. Le Pape dit que ces enseignements sont importants, mais qu'il ne veut pas les répéter constamment, et qu'il entend changer l'Eglise de priotairement politique à prioritairement pastorale.

Note

(1) ... et rappel :
Après son élection, en 1974, Valéry Giscard d'Estaing, qui propose une « société libérale avancée », fait voter l'abaissement de la majorité civile à 18 ans, la dépénalisation de l'avortement ou encore l'autorisation du divorce par consentement mutuel. Il élargit aussi le droit de saisine du Conseil constitutionnel, crée un secrétariat d'État à la condition féminine, supprime l'ORTF. Mais il est vite confronté aux difficultés économiques.... (wikipedia)

On sait comment cela a fini....