Mon ami spécial le Pape
Reprise. «Le pontificat de Jean Paul II n'est pas pensable sans la théologie de Joseph Ratzinger»: en avril 2012, Angela Ambrogetti s'entretenait avec Georg Gänswein pour l'hebdomadaire grand public "Gente" (12/12/2013)
Mon ami spécial: Le Pape
Angela AMBROGETTI
17 Avril 2012
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Il n'y aura pas de célébrations solennelles au Vatican pour l'anniversaire du pape. Plutôt une fête en famille. C'est ce que dit le secrétaire particulier du Pape Benoît XVI qui le 16 avril célèbre ses 85 ans et trois jours plus tard, le 19 Avril, débute sa huitième année en tant que pape.
«Le 16 Avril est un Lundi, une journée de travail, mais elle aura un caractère très bavarois. Le Palais apostolique pour sans doute un peu de temps sera très bavarois. Le Saint-Père a dit: "S'il vous plaît, pour mon 85e anniversaire, je ne veux pas de grande fête!". Une fête simple, donc, et le 20 Avril, un cadeau spécial. "Il y aura le Gewandhaus Orchestra de Leipzig qui offrira un concert d'anniversaire pour le pape, qui a déjà été annoncé il y a trois ans. Celui-ci sera ouvert non seulement pour la curie, mais aussi un peu pour tout le monde».
Parmi les cadeaux pour son anniversaire , il y en a un qui va sûrement être très apprécié, c'est le livre qu'a justement préparé son secrétaire pour l'éditeur allemand Media Maria. 200 pages dans lesquelles vingt personnalités allemandes racontent Benoît XVI à leur manière. Des hommes politiques et des sportifs, comme Franz Beckenbauer et la skieuse Maria Riesch Höfl, et puis le cardinal de Münich Reinhard Marx, l'abbé bénédictin Notker Wolf, le ministre de Thuringe, un protestant, Peter Gauweiler, le ministre Wolfgang Schäuble, et beaucoup d'autres.
Une occasion pour don Georg de partager un peu de sa vie avec le Pape et de révéler quelque petit secret.
Le secrétaire du Pape apparaît rarement en public, sinon auprès de le Pape, et même, comme il aime à le rappeler, «ma place est toujours à quelques pas derrière le Saint-Père».
«Ce n'était pas une œuvre de commande, explique don Georg, le livre n'a pas été fait parce qu'en haut, quelqu'un a dit: "nous avons besoin d'une musique positive de l'Allemagne vers Rome". L'occasion de l'anniversaire du Pape m'a convaincu d'écrire une contribution, et également d'être l'éditeur. Les contributions sont très différentes et forment une mosaïque de points de vue différents. La seule requête était de pouvoir écrire avec un peu de sympathie.»
Gänswein fait le point après sept années de pontificat et parle d'un «pape de la parole»; sa sincérité, sa simplicité et son courage ont été mal compris, dit don Georg, parce qu' « il appelle les erreurs par leur nom».
Mgr Gänswein est un collaborateur du pape depuis le temps où Ratzinger était préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. De cette époque, il garde des souvenirs remarquables: «Le Saint-Père a une grande douceur. A la congrégation, j'avais beaucoup de contacts avec lui dans le travail quotidien: Et maintenant, quand je vois comment le pape Benoît XVI traite les personnes dans des circonstances variées, non seulement dans les audiences, ou les occasions publiques, mais aussi en privé, il est clair qu'il a une attitude unique, qui est la délicatesse et la douceur. Il ne m'a jamais dit "Cela ne va pas, tu te trompes", même si c'est peut-être le cas. Il fait plutôt une proposition: on pourrait faire comme ceci ou comme cela. En réalité, c'est une critique sévère dans la substance mais «très suave dans la manière». Cela, je peux y souscrire, et je vous invite à faire cette expérience», explique don Georg, en souriant.
Certes, sa vie est maintenant très différente de celle qu'il avait quand il était cardinal. «Il souhaitait que Jean-Paul II le libére de ses fonctions de préfet, mais il n'en a pas été ainsi».
- Et son rêve, quel était-il?
«Il pensait: le jour est venu de réaliser le grand désir d'écrire l'œuvre de sa vie, un livre sur le Seigneur Jésus-Christ. Comme prêtre, évêque, cardinal, préfet, médecin des âmes, croyant dans le Christ. Mais quand il a été élu Pape, il a dit qu'il était probable que ce rêve ne se réaliserait plus. Pendant les premier mois, cela a été comme un tsunami».
- Et ensuite, comment a-t-il été possible de trouver du temps pour écrire trois livres?
«Les rythmes sont devenus plus stables et les engagements plus concrets. Les rythmes quotidiens sont devenus plus clairs. Le mardi est le jour avant l'audience générale. Depuis l'époque de Paul VI, il n'y a pas d'audience, le Pape prépare la catéchèse pour l'audience générale. Tous les autres jours sont occupés. Et puis bien sûr il y a les vacances, la pause après les fêtes de Pâques, la période de la mi-Juillet à Août, quand a lieu le rendez-vous avec le Schuelerkreis à Castel Gandolfo. Des moments plus ou moins brefs, où le Saint-Père prend le temps d'écrire».
- Mais quel est le secret pour trouver le temps?
«Comment il trouve le temps, combien de temps il lui faut, comment trouve-t-il les forces, cela, c'est évidemment un secret que je ne peux pas révéler. Une chose est claire. Pour de nombreuses personnes, écrire est un fardeau, un grand défi. Le pape Benoît, au contraire, quand il écrit, trouve la liberté et les forces. C'est une expérience qu'au cours des sept dernières années, j'ai fait, avec beaucoup de gratitude et de surprise».
- Le Pape semble ne pas être trop préoccupé de l'image que certains médias donnent de lui, comme quelqu'un de froid et conservateur.
«L'image qui, déjà en tant que cardinal puis comme Pape Benoît, a été offerte est en grande partie une distorsion - dit don Georg. Une grande partie de la presse, non seulement allemande mais dans le monde, surtout de langue anglaise, tant en Grande-Bretagne qu'en Amérique du Nord, en partie dans les pays de langue française et, finalement aussi en Italie, a créé presque une caricature, à la fois de la personne et de ses idées. Qui connaît la personne de Benoît XVI, qui connaît les idées du Pape, et lit, voit et entend ce qui est publié, se demande si ce n'est pas un autre film. C'est un fait que je pourrais confirmer avec des cas concrets. Je demande donc aux médias de corriger les distorsions, autant que possible».
- Pourtant, certains soutiennent qu'après Jean-Paul II, le Pape charismatique aimé par les foules, Benoît XVI a presque fait un pas en arrière. Même si, lors de voyages, on voit l'enthousiasme que crée le Pape parmi les jeunes et les fidèles, comme en Espagne, en Afrique et plus récemment en Amérique latine.
«Le pontificat de Jean Paul II n'est pas pensable sans la théologie de Joseph Ratzinger».
Et Mgr Gänswein ajoute: «Pour tout ce qui concerne la théologie, Jean-Paul II s'en remettait totalement au cardinal Ratzinger. Et maintenant il est devenu son successeur. Mais rien de cela n'a été organisé à l'avance. Le pontificat de Benoît XVI a une continuité intérieure avec celui de Jean-Paul II et continue ce qui a été commencé par le pape polonais».
Le secrétaire du pape Benoît XVI nie que les nouvelles négatives ne sont pas transmises à Benoît XVI. Ratzinger lit les bonnes et les mauvaises nouvelles tous les jours, dans une revue de presse. «Le chef de l'Eglise a appris à affronter la critique, il sait la recadrer, il accepte la critique». Et il ajoute: «Mais il faut distinguer entre ce qui est publié, ce qu'on lit, et ce qui arrive par d'autres canaux. On ne cherche pas le salut dans l'opinion publique ou dans la presse. C'est un élément important, à prendre au sérieux, mais qui n'oriente pas la navigation du navire du Vatican».
Publié dans Gente, n° du 17-24/04/2012