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La résurrection

à méditer en ce jour de Pâques, deux courts extraits de "Jesus de Nazareth" (20/4/2014)

     

(Image: www.vitatrentina.it)

(..) si une fois quelqu’un avait été réanimé, et rien d’autre, en quoi cela devrait-il nous concerner ? Mais, précisément, la résurrection du Christ est bien plus, il s’agit d’une réalité différente. Elle est – si nous pouvons pour une fois utiliser le langage de la théorie de l’évolution – la plus grande «mutation», le saut absolument le plus décisif dans une dimension totalement nouvelle qui soit jamais advenue dans la longue histoire de la vie et de ses développements: un saut d’un ordre complètement nouveau, qui nous concerne et qui concerne toute l’histoire.
(Homélie de Benoît XVI, veillée pascale, 15 avril 2006)

     

Ce jour de Pâques est aussi le moment propice pour relire dans le second volume du "Jésus de Nazareth" de Benoît XVI le chapitre 9 intitulé « La Résurrection de Jésus d’entre les morts » («Jésus de Nazareth. De l'entrée à Jérusalem à la Résurrection», éd. du Rocher, mars 2011, à partir de la page 273)

Voici deux extraits particulièrement puissants, et d’abord immédiat:

     

1. Ce qui est en jeu dans la Résurrection de Jésus

(page 275)

« Mais si le Christ n'est pas ressuscité, vide alors est notre message, vide aussi votre foi. Il se trouve même que nous sommes des faux témoins de Dieu, puisque nous avons attesté contre Dieu qu'il a ressuscité le Christ » (1 Co 15,14s.). Par ces paroles, saint Paul souligne de manière radicale toute l'importance pour l'ensemble du message chrétien qu'a la foi en la Résurrection de Jésus Christ: elle en est le fondement. La foi chrétienne tient par la vérité du témoignage selon lequel le Christ est ressuscité des morts, ou bien elle s'effondre.

Si on supprime cela, il est certes possible de recueillir de la tradition chrétienne un certain nombre d'idées dignes d'attention sur Dieu et sur l'homme, sur l'être de l'homme et sur son devoir être - une sorte de conception religieuse du monde -, mais la foi chrétienne est morte. Jésus, dans ce cas, est une personnalité religieuse qui a échoué ; une personnalité qui, malgré son échec, demeure grande et peut s'imposer à notre réflexion, mais cette personnalité demeure dans une dimension purement humaine et son autorité ne vaut que dans la mesure où son message nous convainc. Il n'est plus lui-même le critère de référence; le critère est alors seulement notre appréciation personnelle qui choisit ce qui lui est utile, à partir de ce qu'elle a reçu. Et cela signifie que nous sommes abandonnés à nous-mêmes. Notre appréciation personnelle est l'ultime instance.

Seulement si Jésus est ressuscité, quelque chose de véritablement nouveau s'est produit qui change le monde et la situation de l'homme. Lui, Jésus, devient alors le critère, sur lequel nous pouvons nous appuyer. Car Dieu s'est alors vraiment manifesté.

Voilà pourquoi, dans notre recherche sur la figure de Jésus, la Résurrection est le point décisif. Que Jésus n'ait existé que dans le temps passé ou qu'au contraire, il existe encore dans ce temps présent - cela dépend de la Résurrection. Dans le « oui » ou le « non » donné à cette interrogation, on ne se prononce pas sur un simple événement parmi d'autres, mais sur la figure de Jésus comme telle.

* * *

(Page 277)

(..) si dans la Résurrection de Jésus il ne s'était agi que du miracle d'un cadavre réanimé, cela ne nous intéresserait, en fin de compte, en aucune manière. Cela ne serait pas plus important que la réanimation, grâce à l'habileté des médecins, de personnes cliniquement mortes. Pour le monde en général et pour notre existence, rien ne serait changé. Le miracle d'un cadavre réanimé signifierait que la Résurrection de Jésus était du même ordre que la résurrection du jeune de Naïn (cf. Lc 7,11-17), de la file de Jaïre (cf. Mc 5,22-24. 35-43 et par.) ou de Lazare (cf. Jn 11,1-44). De fait, après un temps plus ou moins bref, ceux-ci reprirent le cours de leur vie d'auparavant pour, ensuite plus tard, mourir définitivement.
Les témoignages néotestamentaires ne nous laissent aucun doute sur le fait que dans la « Résurrection du Fils de l'homme » quelque chose de totalement différent se soit produit. La Résurrection de Jésus fut l'évasion vers un genre de vie totalement nouveau, vers une vie qui n'est plus soumise à la loi de la mort et du devenir mais qui est située au-delà de cela - une vie qui a inauguré une nouvelle dimension de l'être-homme. C'est pourquoi la Résurrection de Jésus n'est pas un événement singulier, que nous pourrions négliger et qui appartiendrait seulement au passé, mais elle est une sorte de « mutation décisive » (pour employer cette expression de manière analogique, bien qu'elle soit équivoque), un saut de qualité. Dans la Résurrection de Jésus, une nouvelle possibilité d'être homme a été atteinte, une possibilité qui intéresse tous les hommes et ouvre un avenir, un avenir d'un genre nouveau pour les hommes.

2. La signification historique de la Résurrection

(page 309)

(..) Il nous faut aussi affronter la question concernant la Résurrection en tant qu'événement historique. D'un côté, nous devons dire que l'essence de la Résurrection se trouve justement dans le fait qu'elle brise l'histoire et qu'elle inaugure une nouvelle dimension que nous appelons communément la dimension eschatologique. La Résurrection fait entrevoir l'espace nouveau qui ouvre l'histoire au-delà d'elle-même et crée le définitif. En ce sens, il est vrai que la Résurrection n'est pas un événement historique du même genre que la naissance ou le crucifiement de Jésus. C'est quelque chose de nouveau. Un genre nouveau d’événement.

Il faut pourtant, en même temps, prendre acte du fait que celle-ci n'est pas simplement hors de l'histoire et au-dessus d'elle. En tant qu'éruption hors de l'histoire en la dépassant, la Résurrection commence toutefois dans l'histoire elle-même et elle lui appartient jusqu'à un certain point. On pourrait peut-être exprimer cela de cette manière : la Résurrection de Jésus va au-delà de l'histoire, mais elle a laissé son empreinte dans l'histoire. C'est pourquoi elle peut être attestée par les témoins comme un événement d'une qualité entièrement nouvelle.

De fait, l'annonce apostolique avec son enthousiasme et son audace est impensable sans un contact réel des témoins avec le phénomène totalement nouveau et inattendu qui les atteignait de l'extérieur et consistait dans la manifestation et l'annonce du Christ ressuscité. Seul un événement réel d'une qualité radicalement nouvelle était en mesure de rendre possible l'annonce apostolique, qui ne peut être expliquée par des spéculations ou des expériences intérieures mystiques. Dans son audace et sa nouveauté, cette annonce prend vie de la force impétueuse d'un événement que personne n'avait pu concevoir et qui dépassait toute imagination.