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L'homélie effacée

Un jeune prêtre argentin, commentant l'évangile du jour dans son homélie de dimanche, revenait sur le déroulement du Synode. L'article a disparu... (22/10/2014)

Carlota a trouvé avant-hier, sur un blog hispanophone, un texte qu'elle qualifiait de formidable, un texte courageux et écrit à chaud par un jeune prêtre et historien argentin (que nous appellerons ici le Père J.) sur le déroulement du Synode sur la famille. Elle l'a immédiatement traduit.

Le Père J. avait en effet mis en ligne le samedi 18 octobre, dernier jour du Synode, le sermon qu'il se préparait à prononcer pour la messe dominicale.

Pour des raisons mystérieuses (?), le texte a été effacé du site hébergé par l'ordre religieux auquel le Père J. appartient (*) (mais évidemment toujours disponible dans le fameux cache de Google).
Par respect pour son auteur qui a cru plus prudent (ou a été contraint) de ne pas le laisser en ligne, je n'indiquerai pour une fois pas la source.
Cela n'enlève rien à la force des idées exprimées.
Le Père J. commentait l'évangile du jour, celui où le Christ prononce la fameuse phrase de Jésus "Rendez à César..."(cf. "Rendez à César...") .

Arrivés à la fin de la lecture, vous pourrez toujours vous demander si vous entendez souvent des sermons de ce calibre, lors des messes dominicales....

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(*) Un ordre fondé en Argentine à la fin du dernier siècle, et aujourd'hui également présent aux EU, Chili, Brésil, Pérou, Italie, France, Groenland, Russie et Moyen Orient.

     

SYNODE ET CONCILE VATICAN II, LA MEME HISTOIRE ?
Père J.
18 octobre 2014
Texte en espagnol, traduit par Carlota
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Dans cette fameuse tragédie grecque appelée Antigone, qu'autrefois l'on étudiait à l'école, Sophocle a immortalisé l'alternative entre l'obéissance aux hommes plutôt qu'aux dieux.
(Je reproduis ici le sermon prêché ce dimanche)

* * *

En effet face à la mort d'Œdipe de Thèbes, ses deux fils, Étéocle et Polynice, s'étaient mis d'accord pour alterner mutuellement le pouvoir, pour le partager année après année ; mais l'ambition gagna le cœur du premier qui, comme nos gouvernants, et ce d'autant plus qu'ils se disent plus démocrates, voulut se perpétuer dans le commandement. L'histoire se termine avec les deux frères morts et avec Créon qui, en assumant le règne, décrète que le corps de Polynice restera sans sépulture.

C'est là que va entrer en scène Antigone, la fille d'Œdipe, qui rompant le mandat royal, va donner une sépulture à son frère en pensant « obéir aux dieux plutôt qu'aux hommes ».

Eh bien, l'Évangile de ce dimanche nous laisse un enseignement similaire ; il faut obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes...
- “ Mais non, Mon Père ! - dira quelqu'un. Aujourd'hui on ne nous parle pas de payer ou non l'impôt au César. Vous devez prêcher au sujet des « fonds vautours » (ndt fonds d'investissement à risque, traduction espagnole de «holdouts ») ou du FMI ou du Club de Paris, et tout le monde sera content ! ».

Je pourrais, je pourrais...mais je ne me trompe pas.

C'est que du temps de Notre Seigneur Jésus Christ, les deniers avaient l'effigie du « divus » César, c'est à dire du « divin » César, car il était considéré comme un dieu sur terre, de là le piège qu'ils tendent au Christ, il ne s'agit pas que d'un problème fiscal mais religieux. C'est à dire, faut-il donner son tribut au dieu César ? C'est à cause de cela que le Christ répond : « donnez à César ce que est de César et à Dieu ce qui est de Dieu ».

Il s'agit de la grande alternative du chrétien, de s'accommoder des dieux et des postures de ce monde ou de reconnaitre qu'il n'y a de dieu que Dieu. C'est la tentation de faire cause commune avec les « dieux et les maîtres de la terre », la tentation de « se recycler » par rapport au monde.

– Ahhh, c'est vrai » …. dira un autre par là-bas.

Oui, c'est l'épreuve du Christ et c'est l'épreuve des chrétiens.
Aujourd'hui nous sommes en train de la vivre au sein même de l'Église, si l'on a suivi les informations. Il s'agit d'un temps de confusion et même un possible scandale pour les catholiques de bonne foi.
Comme vous devez le savoir tous, le Pape a convoqué un « Synode sur les familles », c'est-à-dire une réunion des cardinaux et évêques, qui a pour finalité de débattre de certaines difficultés pastorales comme par exemple, le manque de célébration de mariages comme sacrements, les unions de fait, le concubinage, et, presque entrant pas la fenêtre le rapport avec les homosexuels.

Cependant dès le début, tant les médias que les secteurs progressistes de l'intérieur de l'Église ont voulu s'emparer complètement de la « manette » des discussions, en portant les conclusions à des points qui n'étaient même pas sur le tapis.

Pour les plus âgés ou pour ceux qui ont le plus lu sur le sujet, il est arrivé ce que l'on raconte qu'il s'est passé au cours du Concile Vatican II lui-même, où les documents qui étaient émis étaient une chose, et une autre ce qu'on disait qu'ils disaient...
C’est justement ce qu'a dit il y a quelques jours un père synodal, le cardinal Tagle, des Philippines : « l'esprit du Concile souffle de nouveau », ce vent qui, au lieu d'amener de l'air frais et un printemps, a apporté à l'Église un hiver épouvantable quand on l'applique en dehors de la doctrine et du magistère papal de toujours.

Ce n'est pas autre chose qu'a dit Benoît XVI à l'occasion du 50e anniversaire de l'ouverture du Concile :
« Nous étions heureux et nous étions remplis d'enthousiasme. Le grand Concile œcuménique avait été inauguré ; nous étions sûrs qu'arrivait un printemps pour l'Église...(mais) en ces cinquante ans nous avons appris et expérimenté que le péché originel existe et se traduit, de nouveau toujours, en des péchés personnels (…) Nous avons vu aussi que dans le champ du Seigneur il y a toujours de l'ivraie. Et que dans le filet de Pierre il y a toujours des poissons pourris. Nous avons vu que la fragilité humaine est aussi présente dans l'Église, que la barque de l'Église peut aussi naviguer par vent contraire ».

Ce « vent contraire » a soufflé durant le Concile, essayant d'être comme disait le cardinal Suenens, « 1789 dans l'Église », c'est à dire la Révolution Française au sein même de l'Église. C'est cela même et pas autre chose qu'on a essayé de faire ces jours-ci, quoique à une échelle moindre, avec le Synode des familles. Et de nouveau, le courant du Rhin, c'est à dire, celui qui venait du nord de l'Europe a voulu imposer son programme et même changer la doctrine avec le cardinal Kasper à sa tête.

Comment en est-on arrivé là ? Les journaux eux-mêmes en rendent compte ces jours derniers, en mettant l'accent sur la doctrine contraire à celle de l'Église.
Sandro Magister, un prudent vaticaniste nous dit :

«Le premier acte a comme protagoniste le Pape François en personne. Le 28 juillet 2013, lors de la conférence de presse dans l'avion qui le ramène à Rome après son voyage au Brésil, il lance deux signaux qui ont eu un impact très fort et durable dans l'opinion publique.
Le premier sur le rapport aux homosexuels :
- « Si une personne est homosexuelle et cherche le Seigneur et a de la bonne volonté, qui suis-je pour la juger ? »
Le second, sur l'admission au second mariage :
- « Les orthodoxes suivent la théologie de l'économie, comme ils l'appellent, et donnent une seconde possibilité [de mariage]; ils le permettent. Je crois que ce problème doit étudier dans le cadre de la pastorale du mariage » .

Évidemment, devant une telle déclaration papale, les médias ont aussitôt dit que « l'Église avait changé », que « ceux qui vivent en concubinage pourraient de nouveau communier», que la « révolution de François », etc...; parce que les médias ruent dans les brancards par où ils veulent et en outre ils profitent du fait que les gens ne font pas la différence entre un discours dans un avion, un appel téléphonique ou une encyclique. Mais toute parole du Pape n'est pas magistère et même ses paroles et ses gestes peuvent ne pas être toujours prudents.

Mais le Synode a commencé, et avec lui la vraie bataille doctrinale entre l'aile catholique et l'aile hérétique (on ne peut pas le dire autrement sauf si nous voulons utiliser des euphémismes).
Puis à partir de différentes intentions cachées, a été rédigé, alors que se terminait cette première étape, un document à la façon d'un résumé qui disait dans ses parties les plus confuses, cela :

Sur l'homosexualité:
« est pris en considération qu'il y a de cas où le soutien mutuel, jusqu'au sacrifice, constitue un précieux support pour la vie des couples »
Sur le mariage:
« les unions de fait sont très nombreuses, non pour le motif du rejet des valeurs chrétiennes sur la famille et le mariage ; mais surtout par le fait que se marier est un luxe, de sorte que la misère matérielle pousse à vivre dans des unions de fait. (Quelques-uns) se sont exprimés pour une plus grande ouverture à des conditions bien précises quand il s'agit de situations qui ne peuvent être défaites sans déterminer de nouvelles injustices et souffrances. Pour quelques-uns l'éventuel accès aux sacrements doit être précédé d'un chemin pénitentiel ».


Et comment cela s’est-il terminé ?
Avant le résumé en question, les pères synodaux (évêques, cardinaux, etc.) une fois de plus ont été divisés.
Le cardinal Müller, Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, a dit : « le document préliminaire du Synode est indigne, honteux et complètement erroné».
Le cardinal Burke, Préfet de la Signature Apostolique a ajouté : « le document manque d'une base solide sur les Saintes Écritures et le Magistère ».
Le cardinal Wilfrid Fox Napier, archevêque de Durban, a condamné: « le document est virtuellement irrachetable ».
Et Mgr Gadecki, Président de la Conférence des Évêques de Pologne a proclamé : « le document est inacceptable ».

Mais le plus curieux de tout c'est que la défense de la Foi quant au thème homosexuel est venu une fois de plus de l'Afrique Noire : ce furent eux, qui, à côté d'autres prélats du monde entier, ont élevé d'une manière intransigeante la voix contre ces doctrines nouvelles et étrangères à l'Évangile, ceux de là-bas dont avec « tolérance » le cardinal Kasper a dit : « L'Afrique est totalement différente de l'Occident (…). On ne peut pas parler de cela avec les Africains (…). Ce n'est pas possible. C'est un sujet tabou ».
Grâce à Dieu, en Afrique, on n'a pas encore perdu le sens commun.

Aujourd'hui 18 octobre, un nouveau résumé a dû être voté (Relatio synodi) qui fait machine arrière par rapport aux « vents du changement » ; mais comme dit le Père Iraburu, « le mal est déjà fait » car la sensation qui en est restée c'est que la doctrine révélée peut être changée ou, au moins, peut être mise en discussion.
Et cela même si le Pape, maintenant, a essayé de calmer les esprits avec son discours de clôture de cette première partie.

C'est dire, le mal est fait.
Que faire?

¤ D'abord, ne pas désespérer. Cela a déjà été révélé, comme le dit Saint Paul : « il viendra un temps où les hommes ne supporteront pas la saine doctrine, mais […] ils se donneront une foule de docteurs selon leurs propres désirs et écarteront leurs oreilles de la vérité en se tournant vers les fables (2, Timothée 4,3).
De même que le Catéchisme de l'Église (N° 675) : « L'Église doit passer par une épreuve finale qui ébranlera la foi de nombreux croyants. La persécution qui accompagne son pèlerinage sur la terre dévoilera le mystère d'iniquité sous la forme d'une solution apparente à leurs problèmes au prix de l'apostasie de la vérité ».

¤ Ne pas non plus avoir peur : l'Église ne peut pas disparaître même par les mers les plus tumultueuses ; elle est déjà passée par des tempêtes similaires (le cas de l'arianisme, au IVème siècle, en est un exemple) et elle s'est maintenue à flot.
Au contraire : il faut se maintenir fermes dans la Foi, fermes dans l'espérance et en pratiquant la charité dans la vérité, en se rappelant ces paroles de Notre Seigneur: « n'aie pas peur, petit troupeau, je serai avec toi jusqu'à la fin des temps » (Jn 16,33; Mt 28,20) .

Continuons à être fermes dans la Foi, joyeux dans l'Espérance et constants dans la charité.

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