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Un synode vraiment extraordinaire

Catherine a traduit cet article du théologien américain "conservateur" George Weigel, paru sur le site First Things (25/10/2014)

>>> Du même auteur: Ratisbonne n'était pas une bourde

     

Ce qui donne son intérêt à ce texte, c’est que son auteur (auquel j’ai consacré pas mal d’articles sur ce site, voir ici), grand admirateur de Jean Paul II et Benoît XVI, fait partie de ceux qui ont (aussi!) accueilli très favorablement l’élection de Jorge Maria Bergoglio.
On notera qu’ici, il ne cite pas une seule fois le Pape…
Article en anglais: http://www.firstthings.com/web-exclusives/2014/10/an-extraordinary-synod-indeed

     

UN SYNODE VRAIMENT EXTRAORDINAIRE
George Weigel
22 octobre 2014
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Dans le langage du Vatican, une séance supplémentaire programmée du Synode des Évêques est un « Synode Extraordinaire », à la différence du « Synode Ordinaire », qui se tient normalement tous les trois ans. Lors du synode extraordinaire de 2014 qui vient de s'achever, des choses extraordinaires se sont produites, dans le sens "Oh, wow!" du terme. Et si le synode extraordinaire de cette année était un aperçu du synode dont il devait définir l’ordre du jour, à savoir le synode ordinaire de 2015, alors ce synode promet d'être, lui aussi, extraordinaire.

Dans quelles mesures le synode extraordinaire de 2014 était-il extraordinaire?

1. Le synode de 2014 a fait l’objet d’une très grande attention de la part de la presse. Hélas, beaucoup de cette attention venait de la perception erronée des médias, que le grand jour pour le catholicisme était à portée de main. Le moment où l’Eglise Catholique, la dernière grande institution qui se tenait vent debout face au triomphe de la révolution sexuelle, admettrait finalement ses erreurs et rejoindrait le chemin vers la terre promise de la libération sexuelle, symbolisée par une capitulation sur la nature du mariage. Ce qui aurait du retenir l’attention du monde, à savoir le témoignage des évêques africains sur le pouvoir libérateur de la monogamie et de la fidélité d ans le mariage, a été rapidement mis de côté, alors que les femmes du tiers monde sont les principales bénéficiaires de la vérité sur le mariage, reçue du Seigneur.

2. Le synode de 2014 a démontré l’extraordinaire confiance en soi d’évêques qui sont à la tête l’Eglises mourantes, qui néanmoins se sentaient très à l’aise pour donner des conseils à des Eglises qui sont soit florissantes soit capables de garder leurs fidèles. Beaucoup d’évêques d’Europe du nord et de théologiens (et d’évêques-théologiens) ont agi comme si les années heureuses où ils définissaient l’ordre du jour à Vatican II étaient revenues. Que ces même évêques et théologiens aient présidé à l’effondrement du catholicisme en Europe occidentale pendant les cinq décennies écoulées ne semblaient absolument pas les affecter. Les jours heureux étaient de retour.

3. Le Synode de 2014 a été extraordinaire, ou au moins les médias ont prétendu qu’il était extraordinaire, pour avoir affiché publiquement la discorde entre les cardinaux. Peut-être ceux qui ont trouvé cela sans précédent ou inconvenant pourraient consulter Galates 2:11, où Paul rapporte qu'il réprimande ouvertement Pierre ; Ou s'interroger sur les arguments féroces entre les évêques d'Afrique du Nord au cours de la controverse donatiste. Ou se pencher sur la querelle entre l'évêque Cyprien de Carthage, un docteur de l'Eglise, et le pape Etienne, évêque de Rome. Ou lire les débats lors de la première session de Vatican II. Les controverses 2014 étaient en effet remarquables, en ce que des hommes, par ailleurs intelligents, dont la position avait été complètement réfutée par d'autres collègues étaient incapables d'admettre qu'ils s’étaient trompés. Mais un examen plus approfondi (comme on dit à la fédération de football), montrerait que cela n’est pas nouveau non plus.

4. Le Synode de 2014 a été extraordinaire dans le sens ou beaucoup de confusion théologique était le fait d’anciens de l'Eglise qui devraient savoir de quoi ils parlent. L'idée du développement de la doctrine a été particulièrement mal utilisée par certains. Bien sûr, la compréhension de la mission de l'Église se développe au fil du temps, tout comme la pratique pastorale. Mais comme le bienheureux John Henry Newman l’a montré dans la discussion classique du sujet, tout développement authentique s’inscrit dans une continuité organique avec le passé; ce n'est pas une rupture avec le passé. Il n’y a pas non plus de place dans une théorie du développement doctrinal authentiquement catholique pour la réécriture des paroles du Seigneur ou pour décrire la fidélité au texte clair de l'Écriture comme «fondamentalisme».

5. Le Synode 2014 a été extraordinaire dans sa démonstration que de trop nombreux évêques et théologiens (et évêques-théologiens) n’ont toujours pas compris la Loi d'Airain du Christianisme dans la Modernité: les communautés chrétiennes qui maintiennent des limites doctrinales et morales claires peuvent fleurir au milieu les acides culturels de la modernité; Les communautés chrétiennes dont les frontières doctrinales et morales devenues poreuses (et invisibles) dépérissent et meurent.

6. Une dernière chose: pourquoi aucun représentant de l'Institut pontifical Jean-Paul II sur le mariage et la famille n’a été invité à un Synode sur la famille?

Extraordinaire, en effet: à la fois dans la terminologie du Vatican et en Anglais courant.

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