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Deux Papes

Cette fois, c'est Joseph Ratzinger et "le pape du sourire" Jean Paul 1er. Un témoignage très émouvant vingt ans après sa mort (30/9/2014)

A l'occasion du vingtième anniversaire de sa mort, le numéro d'août-septembre 1998 du mensuel 30 giorni offrait un hommage à Jean Paul 1er.
Parmi les contributions, celle très personnelle, très émouvante, sans rien de convenu, du cardinal Ratzinger, qui racontait dans quelles circonstances il l'avait rencontré, puis, plus tard, appris la nouvelle de sa mort.
Je me souviens qu'en juillet 2007, en vacances à Lorenzo di Cadore, Benoît XVI avait accueilli avec affection le frère (très âgé) du Pape éphémère, rappelant que ce dernier avait été, selon ses mots "un grand ami pour moi aussi" (1)

     

Témoiugnage du cardinal Ratzinger

LE "MONTRER" A AUSSI UN SENS
30 Giorni (n° 7/8 - 1998)
via www.cooperatoresveritatis.gomilio.com
Ma traduction
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Je rencontrai pour la première fois le cardinal Luciani en Août 1977 au séminaire de Bressanone.
Le 25 mai, j'avais été ordonné évêque et le jour consacré à Pierre et Paul, j'avais rejoint le Collège des Cardinaux.
A cette époque, je passais une partie des vacances avec ma famille dans l'ancien évêché sur les rives de l'Isarco (Eisack en allemand), comme j'avais l'habitude de le faire depuis quelques années. Dans sa jeunesse, le cardinal Luciani s'étant souvent rendu avec sa mère en pèlerinage à Pietralba, il connaissait donc bien la région.
Je ne sais pas comment, il lui était venu à l'oreille que le nouvel archevêque de Münich était au séminaire de Bressanone; c'est ainsi qu'il s'apprêta à me rendre visite. Ce noble geste me fit une impression profonde, mais ce qui me frappa plus encore, c'est la cordialité spontanée et la grande bonté humaine qui rayonnait de lui. Je le vois encore assis en face de moi, vêtu de sa simple soutane noire, avec des chaussures usées, me parlant de sa jeunesse et m'ouvrant complètementt son cœur.

Quand, un an plus tard, je le revis au conclave, il me vint spontanément la pensée qu'un homme qui possédait de tels dons de cœur et un esprit si éclairé par le cœur, devrait être un bon pape, et je suis heureux de constater que beaucoup d'autres ont pensé comme moi.

J'eus avec lui une dernière conversation, très cordiale, à l'occasion de son intronisation. L'archidiocèse de Münich et Freising est jumelé avec les diocèses d'Équateur. Pour Octobre, il avait été prévu dans ce pays un important congrès marial, auquel j'avais été invité à participer en qualité de légat pontifical. Le Pape avait entre-temps lu la requête et décidé favorablement; ainsi, durant l'hommage traditionnel des cardinaux, il s'entretint brièvement avec moi sur la question et invoqua sur moi beaucoup de bénédictions pour ma mission.

La nouvelles de sa mort subite me surprit à Quito. Je logeais dans une institution de soeurs; une nuit, à l'improviste, la porte de ma chambre s'ouvrit, et, à ma grande surprise, je vis entrer un carme vêtu de son habit, en qui je reconnus non sans difficulté l'un des évêques auxiliaires de Quito. Il me dit que le pape était mort. Au début, cela me sembla une apparitions irréelle, puis, peu à peu, je réalisai que cette rencontre inattendue n'était pas un rêve, mais bien la triste réalité. Cette mort fut alors pour moi un dur coup au cœur: je ne parvenais pas à comprendre pourquoi cette personne bonne, nouslavait été enlevée si tôt du trône pontifical. Je me suis souvenu de la phrase forgée autrefois par le pape Marcel II, qui mourut lui aussi subitement: «Montré, et non pas donné».

Dans l'intervalle, cependant, il m'est devenu petit à petit de plus en plus évident que le «montrer» aussi a sa signification. Le Pape Luciani reste dans mon souvenir, et dans celui de tous ceux qui l'ont connu, l'image du bon pasteur; il a transformé ses souffrances en un sourire de bonté, et c'est un message, surtout aujourd'hui, qui est salutaire pour nous.



(1) NDT

(..) Merci pour vos belles paroles, venues réellement du cœur, qui m'ont fait "revoir" notre cher Pape Luciani, un grand ami pour moi aussi. (...) je suis très heureux de la présence de M. Edoardo Luciani, frère du Serviteur de Dieu Jean-Paul I: je vous adresse, M. Luciani, un salut particulier de tout cœur et avec une grande joie. Merci pour votre présence.
(www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/angelus/2007)

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