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Quand Benoît XVI échange avec les jeunes

Le 6 avril 2006, le Saint-Père rencontrait Place Saint-Pierre les jeunes du diocèse de Rome venus préparer la prochaine journée mondiale de la jeunesse. Questions sur le mariage, et la vocation sacerdotale (24/7/2014).

A cette occasion, il se livrait au jeu des questions-réponses, avec cinq interlocuteurs représentatifs des préoccupations des jeunes de leur âge.

Une amie m'avait envoyé à l'époque l'enregistrement sur cassette, que j'ai depuis transféré sur youtube (le dialogue avec les jeunes commence vers 31'45).

Nombreuses images de Spaziani ici: www.webalice.it/stefanospaziani/Papa1180.htm .

Parmi les questions, l'une concernait la difficulté de fonder l'amour sur quelque chose de stable pour les jeunes d'aujourd'hui, et une autre amenait le Pape aux confidences personnelles sur la naissance de sa vocation.

     
2. De la difficulté d'aimer aujourd'hui
Très Saint-Père, je m'appelle Anna, j'ai 19 ans, j'étudie la littérature et je fais partie de la paroisse "Santa Maria del Carmelo".

L'un des problèmes auquel nous sommes le plus confrontés est affectif. Nous avons souvent des difficultés à aimer. Oui, des difficultés: car il est facile de confondre l'amour avec l'égoïsme, en particulier aujourd'hui, où une grande partie des médias nous imposent presque une vision de la sexualité individualiste, sécularisée, où tout semble permis, et tout est autorisé au nom de la liberté et de la conscience des personnes. La famille fondée sur le mariage semble désormais n'être plus qu'une invention de l'Eglise, sans parler des relations avant le mariage, dont l'interdiction apparaît même à un grand nombre d'entre nous, croyants, comme une chose incompréhensible ou hors du temps... Sachant qu'un grand nombre d'entre nous essayent de vivre leur vie affective de façon responsable, pourriez-vous nous expliquer ce que la Parole de Dieu dit à ce propos?
Merci.

Il s'agit d'une question importante et y répondre en quelques minutes n'est certainement pas possible, mais je vais essayer de dire quelque chose.
Anna elle-même a déjà apporté des réponses lorsqu'elle a dit qu'aujourd'hui, l'amour est souvent mal interprété dans la mesure où il est présenté comme une expérience égoïste, alors qu'en réalité, il s'agit d'un abandon de soi qui permet de se trouver.
Elle a également dit qu'une culture de la consommation fausse notre vie en raison d'un relativisme qui semble tout nous permettre, mais qui en réalité nous vide.
Mais alors, écoutons la Parole de Dieu à ce propos. Anna voulait savoir à juste titre ce que la Parole de Dieu dit à ce sujet.

Pour ma part, j'ai trouvé qu'il était très beau que dès les premières pages de l'Ecriture Sainte, immédiatement après le récit de la Création de l'homme, nous trouvions la définition de l'amour et du mariage.
L'auteur sacré nous dit: "Ainsi donc, l'homme quittera son père et sa mère pour s'attacher à sa femme, et les deux ne feront qu'une seule chair, une seule existence".
Nous sommes au début et nous trouvons déjà une prophétie de ce qu'est le mariage; et cette définition demeure identique également dans le Nouveau Testament. Le mariage signifie suivre l'autre dans l'amour et devenir ainsi une seule existence, une seule chair, et donc inséparables; une nouvelle existence qui naît de cette communion d'amour, qui unit et crée ainsi également l'avenir.
Les théologiens du Moyen-Age, en interprétant cette affirmation qui se trouve au début de l'Ecriture Sainte, ont dit que des sept Sacrements, le mariage a été le premier institué par Dieu, ayant été déjà institué au moment de la création, au Paradis, au début de l'histoire, et avant toute histoire humaine. Il s'agit d'un sacrement du Créateur de l'univers, et donc inscrit précisément dans l'être humain lui-même, qui est orienté vers ce chemin, dans lequel l'homme abandonne ses parents et s'unit à sa femme pour former une seule chair, afin que les deux ne deviennent qu'une seule existence. Le sacrement du mariage n'est donc pas une invention de l'Eglise, il a réellement été "co-créé" avec l'homme en tant que tel, en tant que fruit du dynamisme de l'amour, dans lequel l'homme et la femme se trouvent mutuellement et trouvent ainsi également le Créateur qui les a appelés à l'amour.
Il est vrai que l'homme est tombé et a été chassé du Paradis, ou, en d'autres termes, plus modernes, il est vrai que toutes les cultures ont été souillées par le péché, par les erreurs de l'homme dans son histoire, et ainsi, le dessein initial inscrit dans notre nature apparaît obscurci. En effet, dans les cultures humaines, nous trouvons cet obscurcissement du dessein originel de Dieu.
Dans le même temps, toutefois, en observant les cultures, toute l'histoire culturelle de l'humanité, nous constatons également que l'homme n'a jamais pu totalement oublier ce dessein qui existe dans la profondeur de son être. Il a toujours su, en un certain sens, que les autres formes de relations entre l'homme et la femme ne correspondaient pas réellement au dessein originel de son être. Et ainsi, dans les cultures, en particulier dans les grandes cultures, nous constatons toujours à nouveau qu'elles s'orientent vers cette réalité, la monogamie, l'homme et la femme ne faisant qu'une seule chair. Ainsi, c'est dans la fidélité, que peut croître une nouvelle génération, que peut se poursuivre une tradition culturelle, se renouvelant et réalisant, dans la continuité, un progrès authentique.

Le Seigneur, qui a parlé de cela dans la langue des prophètes d'Israël, en évoquant la permission de divorcer de la part de Moïse, a dit: "C'est en raison de votre dureté de coeur". Après le péché, le coeur est devenu "dur", mais tel n'était pas le dessein du Créateur et les Prophètes ont insisté toujours plus clairement sur ce dessein originel.
Pour renouveler l'homme, le Seigneur - en faisant allusion aux voix prophétiques qui ont toujours guidé Israël vers la clarté de la monogamie - a reconnu avec Ezéchiel que nous avons besoin - pour vivre cette vocation, d'un coeur nouveau; au lieu du coeur de pierre - comme dit Ezéchiel - nous avons besoin d'un coeur de chair, d'un coeur véritablement humain. Et le Seigneur, dans le Baptême, à travers la foi, "greffe" en nous ce coeur nouveau. Il ne s'agit pas d'une greffe physique, mais nous pouvons peut-être nous servir précisément de cette comparaison: après la greffe, il est nécessaire que l'organisme soit soigné, qu'il dispose des médicaments nécessaires pour pouvoir vivre avec son nouveau coeur, afin qu'il devienne "son coeur", et non le "coeur d'un autre". Dans cette "greffe spirituelle", où le Seigneur nous offre un coeur nouveau, un coeur ouvert au Créateur, à la vocation de Dieu, pour pouvoir vivre avec ce coeur nouveau, nous avons encore plus besoin de traitements adéquats, il faut avoir recours à des médicaments adaptés afin qu'il devienne véritablement "notre coeur". En vivant ainsi dans la communion avec le Christ, avec son Eglise, le nouveau coeur devient réellement "notre coeur" et le mariage devient possible. L'amour exclusif entre un homme et une femme, la vie à deux projetée par le Créateur devient possible, même si le climat de notre monde la rend difficile, jusqu'à la faire apparaître impossible.

Le Seigneur nous donne un coeur nouveau et nous devons vivre avec ce coeur nouveau, en utilisant les thérapies opportunes afin qu'il soit réellement "le nôtre". C'est ainsi que nous vivons ce que le Créateur nous a donné et cela engendre une vie véritablement heureuse. En effet, nous pouvons le voir également dans ce monde, en dépit des nombreux autres modèles de vie: il existe tant de familles chrétiennes qui vivent avec fidélité et joie la vie et l'amour indiqués par le Créateur et c'est ainsi que se développe une nouvelle humanité.

Et enfin, j'ajouterais: nous savons tous que pour arriver à un objectif dans le sport et au niveau professionnel, la discipline et les sacrifices sont nécessaires, mais ensuite, tout cela est couronné par le succès d'avoir atteint un objectif tant désiré. De la même façon, la vie elle-même, c'est-à-dire devenir hommes selon le dessein de Jésus, exige des sacrifices; toutefois, ils ne sont pas une chose négative, au contraire, ils aident à vivre en tant qu'homme avec un coeur nouveau, à vivre une vie véritablement humaine et heureuse.
Etant donné qu'il existe une culture hédoniste qui veut nous empêcher de vivre selon le dessein du Créateur, nous devons avoir le courage de créer des îlots, des oasis, puis de grands terrains de culture catholique, dans lesquels vivre le dessein du Créateur.
© Copyright 2006 - Libreria Editrice Vaticana

     
La vocation de prêtre
4. Je m'appelle Vittorio, je viens de la paroisse "San Giovanni Bosco" à Cinecittà, j'ai 20 ans et j'étudie les Siences de l'Education à l'Université de Tor Vergata.

Toujours dans votre Message (pour la XXIe Journée mondiale de la Jeunesse, ndlr), vous nous invitez à ne pas avoir peur de répondre avec générosité au Seigneur, en particulier lorsqu'il propose de le suivre dans la vie consacrée ou dans la vie sacerdotale. Vous nous dites de ne pas avoir peur, d'avoir confiance en Lui et que nous ne serons pas déçus. Un grand nombre d'entre nous, ici présents ou parmi ceux qui nous suivent chez eux ce soir à la télévision pensent, j'en suis convaincu, à suivre Jésus sur une voie de consécration spéciale, mais il n'est pas toujours facile de comprendre si celle-ci sera la juste voie. Pouvez-vous nous dire comment vous avez fait pour comprendre quelle était votre vocation? Pouvez-vous nous donner des conseils pour mieux comprendre si le Seigneur nous appelle à le suivre dans la vie consacrée ou sacerdotale? Je vous remercie.

En ce qui me concerne, j'ai grandi dans un monde très différent du monde actuel, mais à la fin, les situations se ressemblent.
D'une part, il y avait encore la situation de "chrétienté", dans laquelle il était normal d'aller à l'église et d'accepter la foi comme la révélation de Dieu et chercher à vivre selon la révélation; d'autre part, il y avait le régime nazi, qui affirmait à voix haute: "Dans la nouvelle Allemagne il n'y aura plus de prêtres, il n'y aura plus de vie consacrée, nous n'avons plus besoin de ces gens; cherchez une autre profession".
Mais précisément en entendant ces voix "fortes", dans la confrontation avec la brutalité de ce système au visage inhumain, j'ai compris qu'il y avait, en revanche, un grand besoin de prêtres. Ce contraste, voire cette culture antihumaine, m'a confirmé dans la conviction que le Seigneur, l'Evangile, la foi nous montraient la voie juste et que nous devions nous engager pour que cette voie survive.
Dans cette situation, la vocation au sacerdoce a grandi presque naturellement en moi et sans grands événements de conversion.
En outre, deux choses m'ont aidé sur ce chemin: dès l'enfance, aidé par mes parents et par mon curé, j'ai découvert la beauté de la Liturgie et je l'ai toujours aimée davantage, car je sentais que dans celle-ci apparaît la beauté divine et que le ciel s'ouvre devant nous; le deuxième élément a été la découverte de la beauté et de la connaissance, la connaissance de Dieu, l'Ecriture Sainte, grâce à laquelle il est possible de s'introduire dans cette grande aventure du dialogue avec Dieu qu'est la théologie. Ainsi, cela a été une joie d'entrer dans ce travail millénaire de la théologie, dans cette célébration de la liturgie, dans laquelle Dieu est avec nous et se réjouit avec nous.

Naturellement les difficultés n'ont pas manqué. Je me demandais si j'avais réellement la capacité de vivre le célibat pendant toute la vie.
tant un homme de formation théorique et non pratique, je savais également qu'il ne suffisait pas d'aimer la théologie pour être un bon prêtre, mais qu'il y a besoin d'être toujours disponible envers les jeunes, les personnes âgées, les malades, les pauvres; la nécessité d'être simple avec les simples.
La théologie est belle, mais la simplicité de la parole et de la vie chrétienne est également nécessaire. Et ainsi, je me demandais: serais-je en mesure de vivre tout cela et de ne pas vivre de manière unilatérale, d'être seulement un théologien etc.? Mais le Seigneur m'a aidé et, surtout, la compagnie de mes amis, de bons prêtres et de maîtres m'a aidée.

En revenant à la question, je pense qu'il est important d'être attentifs aux gestes du Seigneur sur notre chemin.
Il nous parle à travers des événements, à travers des personnes, à travers des rencontres: il faut être attentifs à tout cela.
Ensuite, c'est le deuxième point, entrer réellement dans une relation d'amitié avec Jésus, dans une relation personnelle avec Lui et ne pas savoir seulement par les autres ou par les livres qui est Jésus, mais vivre une relation toujours plus approfondie d'amitié personnelle avec Jésus, dans laquelle nous pouvons commencer à comprendre ce qu'Il nous demande.
Et ensuite, l'attention à ce que je suis, à mes capacités: d'une part du courage et de l'autre de l'humilité, de la confiance et l'ouverture, également avec l'aide des amis, de l'autorité de l'Eglise et aussi des prêtres, des familles: qu'est-ce que le Seigneur veut de moi?
Bien sûr, cela reste toujours une grande aventure, mais la vie ne peut réussir que si nous avons le courage de l'aventure, la confiance dans le fait que le Seigneur ne me laissera jamais seul, que le Seigneur m'accompagnera, m'aidera.

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