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L'interview du pape émérite au FAZ (I)

Première partie, d'après la traduction en anglais de Teresa (8/12/2014)

>>> Une interview du Pape émérite

Le silencieux du Vatican

Une visite chez «Vater Benedikt»
par Jörg Bremer
Correspondant politique en Italie et au Vatican du Frankfurter Allgemeine Zeitung
(version en anglais: Teresa)
7 Décembre 2014

A peine assis sur le canapé dans son salon, le Père Benoît (Vater Benedikt) affirme que c'était une «pure absurdité» de penser qu'il s'était interposé dans le débat déclenché lors du récent synode de famille pour permettre l'accès à la communion pour les divorcés catholiques remariés. Au contraire, il dit: «J'essaie d'être aussi silencieux que possible».

Agé de 87 ans, le Pape émérite vit détaché du monde à Mater Ecclesiae, l'un des bâtiments construit au début du 20e siècle à l'intérieur du Vatican, et qui a été rénové pour son usage. Derrière de grandes fenêtres il est situé dans un espace ouvert et lumineux dans les jardins du Vatican, entouré de rosiers et de vignes. De sa fenêtre de salon, le Père Benoît peut regarder le paysage de début d'hiver, vers la coupole de la basilique Saint-Pierre.

Depuis qu'il a renoncé à la papauté en Février 2013, il n'a émergé que trois fois de ce cloître pour être vu en public, et à chaque fois, à l'invitation spécifique de son successeur, François. La plus récente a été à la messe de béatification de Paul VI. [note de Teresa: En fait, quatre fois - d'abord, en Juillet 2013,pour la bénédiction et le dévoilement d'une statue de Saint Michel Archange dans les Jardins du Vatican - une statue que le sculpteur avait commencée pour lui et dédié à lui; puis au Consistoire dans lequel François a créé ses premiers nouveaux cardinaux en février dernier; puis à la canonisation des Papes Jean XXIII et Jean Paul II en Avril; puis à la messe béatiifcaiton de Paul VI en Octobre].
En cette dernière occasion, devant la Basilique Saint-Pierre, Benoît XVI semblait irradier la paix de la renonciation. Il semblait plus fort qu'il ne l'était au moment où il a démissionné en tant que Pape et durant les mois qui ont suivi. A l'ntérieur de sa maison, il n'utilise pas sa canne. Mais il marche lentement et il est un peu voûté. Ses yeux sont brillants, et il donne des réponses promptes dans son allemand teinté d'accent bavarois. Il porte toujours la soutane blanche de pape, mais aujourd'hui, au lieu des chaussures rouges, il porte des sandales en cuir marron avec des chaussettes blanches.

Malgré sa vie cloîtrée, l'ancien pape reçoit des visiteurs. Surtout des évêques qui souhaitent lui rendre visite, mais aussi son éditeur allemand, Manuel Herder, ainsi que de vieux amis de la Bavière. Et apparemment, il rencontre François plus souvent que ce qui est fait connaître publiquement. Sur cela, Benoît dit seulement: «Nous avons un très bon contact». Il dit qu'il ne veut pas être considéré comme une ombre planant sur son successeur: «Il a une présence si forte, que je ne pourrais jamais avoir avec mes faiblesses physiques et l'état où je suis»
En attendant, observe-il fermement, «les fidèles sont pleinement et clairement conscients de qui est le vrai pape». Et il regrette que dès le début, il n'ait pas su rendre plus claire la différence entre les façons de s'adresser à lui et au pape régnant. Il dit qu'il aurait souhaité être appelé «Père Benoît» après sa démission - Vater Benedikt ou Padre Benedetto - mais à l'époque il ne l'a pas fait, [car il était trop faible et fatigué].
Je demande: «Pourrais-je écrire cela?». «Oui, s'il vous plaît. Cela peut aider».

Depuis qu'il s'est retiré, Benoît ne parle pas aux journalistes, sauf s'ils viennent le voir pour des visites de courtoisie. Mais cette fois, il m'a dit, au moins à deux reprises, quoi écrire et ne pas écrire. Il dit que c'est important pour lui que tout le monde comprenne qu'il ne se considère pas comme un co-Pape [note de Teresa: "neben-Papst" en allemand implique un rôle 'à côté' de la personne en fonction, comme un co-pilote] qui s'impliquerait dans les affaires de l'Église, et surtout pas qu'il le ferait pour prendre position contre le pape.
Peut-être insiste-t-il à ce sujet parce que le Tome 4 de ses Opera Omnia vient d'être publié, et son essai de 1972 "Sur la question de l'indissolubilité du mariage" a été réimprimé. Mais la conclusion, dit le Père Benoît, a été «entièrement remanié».
Il avait écrit en 1972 que dans des cas particuliers, permettre la communion aux divorcés remariés pourrait être «couvert» par la tradition. Mais depuis lors, il a affirmé «l'impossibilité» pour les divorcés remariés de recevoir l'Eucharistie.
Néanmoins, le Père Benoît dit que c'est «absurde» de soutenir qu'à cause de cela, il veut se mêler de la controverse dans l'Eglise. Il dit qu'il a réécrit l'essai en Août, des mois avant la première assemblée synodale en Octobre, et qu'il n'y a «rien de nouveau» par rapport à ce que Jean-Paul II avait affirmé précédemment, que « comme préfet de la Doctrine de la Foi, j'ai écrit en termes encore plus drastiques».
Benoît n'a pas l'intention d'en dire plus au sujet de l'indissolubilité du mariage sacramentel. L'enseignement de l'Église doit rester tel qu'il est. Mais pour lui, il est important que les divorcés remariés qui ne peuvent recevoir la communion soient aidés dans leur pratique religieuse, afin de «ne pas porter un fardeau plus lourd pour eux qu'il n'est nécessaire». Il cite la Lettre apostolique de Jean-Paul II 'Familialris Consortio', écrite après l'assemblée synodale sur la famille qu'il avait convoquée en 1981 et qui en appelle à une pastorale qui n'exclut pas les divorcés remariés, mais plutôt «devrait leur permettre de sentir l'amour de la Église.»

(A suivre)