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Un million de juifs sauvés par Pie XII

Un article de Luciano Garibaldi, un historien italien spécialiste de la période de la guerre, autour du film "Shadows of truth"... et de la critique de l'OR

>>> Ci-contre: Luciano Garibaldi (www.torrescalla.it/it/ospiti/view/luciano-garibaldi)

>>> Dossier Pie XII

A propos du film de Liliana Marabani, Anna a traduit un article, publié sur le site Riscossa Cristiana auquel il collabore, de Luciano Garibaldi, journaliste et écrivain italien né en 1936, auteur de plusieurs ouvrages sur la période de la seconde guerre mondiale - où il démonte un certain nombre de mythes de la résistance - et aussi sur lesdites «années de plomb» ; parmi ces ouvrages, un livre intitulé O la Croce o la Svastica. La vera storia dei rapporti far la Chiesa e il nazismo .

Luciano Garibaldi exprime ici sa perplexité, pour ne pas dire plus, face à la « critique » négative de l’Osservatore Romano.
On trouvera cette dernière reproduite sur le site officiel de la canonisation de Pie XII (www.papapioxii.it/shades-of-truth-un-film-su-pio-xii), grâce auquel on peut constater que le journal de la CEI, L’Avvenire, n’est pas en reste (www.papapioxii.it/ancora-a-proposito-di-shades-of-truth)

EH BIEN OUI: ILS FURENT UN MILLION LES JUIFS SAUVÉS PAR L'ÉGLISE CATHOLIQUE DANS TOUTE L'EUROPE

Luciano Garibaldi
Riscossa Cristiana
4 mars 2015
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Le 2 mars a été présenté à Rome, en avant-première mondiale, le film de la cinéaste Liliana Marabini "Shades of Truth" ("Sfumature di Verità"), consacré à ce que le Pape Pie XII a accompli pour contrer la persécution anti-juive.
Lundi matin (le 2 mars), le Corriere della Sera titrait déjà "Pie XII, un Schindler au Vatican. Le film qui trouble les juifs et les historiens".
Le jour suivant le titre était: "Le cas Pie XII. L'Osservatore Romano saque le film".
Le Quotidien de l'Eglise nie-t-il donc que Pie XII ait sauvé des milliers de juifs?
Voici ce qu'écrit l'Osservatore Romano: "Du point de vue de l'historien, on est au plus bas, même si des lueurs de vérité filtrent de temps en temps, évidemment. Dans sa tentative franchement maladroite de donner à l'ensemble une forme dramatique, la réalisatrice rend toutefois le produit général ingénu et donc peu crédible".

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Ayant écrit le livre intitulé O la Croce o la Svastica. La vera storia dei rapporti far la Chiesa e il nazismo (Ou la Croix ou la croix gammée. La véritable histoire des rapports entre l'Eglise et le nazisme) (Editeur Lindau, Turin, 2009, 200 pages), je crois avoir les titres pour en discuter. A l'époque j'avais répondu, à ceux qui me demandaient les raisons qui m'avaient poussé à l'écrire, que dans mon archive de journaliste de longue date j'avais du matériel, même inédit, qui ne pouvait plus rester sous les papiers poussiéreux. Un exemple parmi les autres: les confidences que me fit en 1983, un an avant de mourir, le général Kark Wolff, commandant en chef des SS en Italie pendant la dernière phase de la guerre, l'officier qui avait reçu de Hitler l'ordre d'enlever Pie XII et de l'enfermer dans une forteresse au Lichtenstein. Ou bien les interviews que j'avais réalisées en Allemagne, rencontrant les plus importants survivants de l'attentat du 20 juillet 2044 contre Hitler (l'opération Walkirie), lorsque je découvris que la participation des milieux catholiques à la conjuration pour tuer le dictateur nazi avait été bien plus intense et importante de ce qu'on ait pu imaginer.

Tout cela, lié aux polémiques sur l'attitude du Pape Pacelli à l'égard du nazisme (qui, comme on le voit, ne semblent pas se calmer), m'a mis dans la condition d'offrir mon témoignage afin de mettre finalement un point sûr dans cette histoire. Et ce point sûr consiste dans le fait que l'Eglise catholique fut la plus héroïque, la plus déterminée, la plus intransigeante communauté à s'opposer aux folies racistes et à la persécution anti-juive. Avec le résultat de contribuer au sauvetage de pas moins d'un million de juifs en toute l'Europe, avec un tragique compte à payer au Troisième Reich, consistant en plus de 4000 religieux sacrifiés au nom de la foi et de la justice, et exterminés dans les camps de concentration nazis.

Le premier religieux allemand à finir dans un Lager fut le jésuite Joseph Spieker. Dans une prédication à Cologne, en 1934, il avait déclaré: "L'Allemagne n'a qu'un seul Führer et c'est le Christ!". Le premier à être éliminé par les nazis fur Mgr Bernard Lichtenberg, archiprêtre de la cathédrale de Berlin: il avait prié avec un groupe de juifs. Ce ne fut que le début d'un duel sans équivoque qui se termina par le sacrifice de quatre mille prêtres et religieux catholiques. J'ai l'ambition d'avoir raconté la véritable histoire des rapports entre l'Eglise et le Nazisme, clôturant ainsi la dispute sur les présumés silences de Pie XII, le Pape que Reinhard Heydrich (le planificateur de la "solution finale du problème juif"), dans un rapport secret avait défini comme "rangé en faveur des juifs, ennemi mortel de l'Allemagne et complice des puissances occidentales".

Dans mon livre j'ai aussi parlé des deux énigmes qui entourent encore l'affaire de Claus Von Stauffenberg, l'officier qui le 20 luillet 1944 tenta d'assassiner le Führer: à savoir s'il est vrai que le colonel, un catholique fervent, se confessa chez une évêque de Berlin, qu'il en obtint l'absolution et communia, avant de placer la bombe; et si l'on peut affirmer que le Vatican fût préalablement informé de l'Opération Walkirie. D'autres chapitres sont réservés aux femmes allemandes qui se battirent, pour la foi et la charité, contre l'antisémitisme nazi; aux nombreux juifs, même connus, qui se battirent en défense de Pie XII, un Pape injustement diffamé; et, pour une information complète et objective, également aux prêtres et monseigneurs qui se rangèrent du côté de Hitler.

Les véritables intentions de Hitler à l'égard du catholicisme se manifestèrent d'ailleurs dès le tout début.

1er février 1933: Hitler arrive au pouvoir et s'engage à "protéger fermement le christianisme". Peu après, suivant l'exemple de Mussolini, il signe le concordat avec le Saint Siège. Mais il révèle bientôt ses véritables intentions. Une série d'abus et violences à l'encontre de l'Eglise catholique allemande conduit Pie XI à promulguer l'encyclique Mit brennender Sorge. L'assassinat du président de l'Action Catholique de Berlin marque le début d'une véritable persécution: suppression des écoles catholiques, verrouillage de la presse confessionnelle, arrestation de ses directeurs, vague de faux procès contre le clergé. En Autriche, après l'Anchluss, on en arrive au saccage et à l'incendie des écoles catholiques et du palais de l'archevêché. Une persécution encore pire, avec une effusion de sang atroce, frappe le clergé catholique dans l'Espagne républicaine, où l'armée s'est révoltée contre le gouvernement pro-communiste soutenu par la Russie soviétique, ouvrant la voie à la guerre civile.

En Allemagne, Clemens von Galen, le futur Bienheureux, évêque de Münster, joua le rôle principal pour ranger l'Eglise catholique allemande contre la dictature nazie. A ses côtés, l'évêque de Berlin, Konrad von Preysing, son cousin germain. Ce furent eux qui engagèrent une lutte sans merci, du côté des organisations catholiques, contre Alfred Rosenberg et son "Mythe du XX siècle", le racisme. Le secrétaire d'Etat du Vatican, Eugenio Pacelli, ancien nonce apostolique en Allemagne, envoya pas moins de 70 notes de protestation au gouvernement de Hitler alors que les évêques allemands, réunis en la conférence à Fulda, prononcèrent une condamnation définitive à l'encontre du "néo-paganisme du sang et de la race".

De même, des paroles de condamnation sans équivoque du nazisme étaient prononcées par le Pontife en ses deux messages radio à l'occasion des Noëls 1941 et 1942. Mais déjà en 1939, au début de la deuxième Guerre Mondiale, avec l'encyclique Summi Pontificatus, Pie XII s'était ouvertement rangé en défense des juifs. Et étant encore secrétaire d'Etat, il avait publié dans l'Osservatore Romano quelques articles au sujet du nazisme, dans un desquels il avait écrit que le parti de Hitler n'est pas un "socialisme national", mais un "terrorisme national".

Ceux-ci et d'autres dizaines d'éléments de preuve de l'action tenace menée par l'Eglise contre le nazisme n'ont pas suffi à dissiper les doutes et les suspicions. Tout comme n'ont pas suffi les dix livres dans lesquels Soeur Margherita Marchione a recueilli et catalogué les preuves du secours apporté par le Pape aux juifs.
Le Congrès Juif Mondial a en effet demandé à l'Eglise de bloquer la cause de béatification de Pie XII et au Yad Vashem l'inscription le diffamant n'a pas encore été retirée. Et pourtant il est prouvé (qu'on lise les livres de Margherita Marchione) qu'un million de juifs furent sauvés, dans toutes les nations occupées par les allemands, grâce à ses initiatives. A commencer par les cinq mille qui furent cachés dans les couvents, les maisons religieuses de la capitale et à Castel Gandolfo, pendant la rafle nazie des quartiers juifs de Rome. Soeur Marguerite a démontré, documents à l'appui, que le Pape Pacelli a aidé à sauver environ un million de juifs autorisant de faux certificats de baptême, ordonnant aux couvents et monastères de donner refuge aux persécutés, répondant (avec l'aide principale des Pieuses Maîtresses [Pie Maestre] de Sainte Lucia Filippini de Rome) à pas moins de 20 millions de lettres qui lui avaient été envoyées des personnes qui lui demandaient de l'aide pendant les années de la guerre.

De nombreux juifs, même connus, ont pris position en sa défense: Albert Einstein, Golda Meir, Martin Gilbert, Michael Tagliacozzo, Gary Krupp, Elio Toaff, William Zuckermann. Il ne manque que l'Osservatore Romano.



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