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Les couturiers miséricordieux

La sortie courageuse du duo Dolce & Gabbana en défense de LA famille a inspiré à notre blogueur espanol Juan ManueL de Prada une réflexion musclée, traduite par Carlota

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LES COUTURIERS MISÉRICORDIEUX

Juan ManueL de Prada.
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Il est complètement faux que nos misères, en elles-mêmes, nous rendent méritants d’une prédilection spéciale aux yeux de Dieu.
Chesterton disait que le monde moderne est infecté de vertus chrétiennes qui sont devenues folles.
C’est ce qui arrive avec la justice quand elle se dégage de la miséricorde qui devient cruauté ; mais aussi avec la miséricorde quand elle se dégage de la justice, et que sous le masque pieux elle devient complaisance sentimentaloïde.

Nous vivons une époque, toutefois, où la miséricorde sans justice, vertu folle par antonomase, se pavane sous les applaudissements du monde, ornée en plus de l’excipient sirupeux d’une condescendance grossièrement démagogique. Le Bœuf Muet [ndt St Thomas d’Aquin (1)] écrivait qu’être miséricordieux « c’est comme dire que quelqu’un a de la misère dans le cœur, qu’il s’attriste de la misère étrangère comme si cela était la sienne propre et qu’à cause de cela, il veut la proscrire comme si c’était la sienne propre ». Dire "qui sommes nous pour condamner " a été mis à la mode, mais le fait que l'on ne doit condamner personne ne signifie pas que l’on ne doive pas moralement juger les conduites dans lesquelles se plonge le prochain, pour l’aider à faire son discernement moral, car c’est en cela que consiste l’authentique miséricorde.

Il est complètement faux de dire que nos misères, en elles-mêmes, nous rendent méritants d’une prédilection spéciale aux yeux de Dieu, comme aujourd’hui le prétend la version folle de la miséricorde que l’on prétend imposer.
Dans la parabole des ouvriers de la vigne (Mat, ch20, 1-16), on nous dit qu’il a été payé le même salaire journalier à tous ceux qui ont été la travailler, indépendamment de ce qu’ils aient été embauchés au début ou à la fin de la journée; on ne nous dit pas que le salaire de la journée a été payé à ceux qui n’ont pas plié l’échine.
On ne nous dit pas non plus dans la parabole du Fils Prodigue (Luc ch15, 11-32) que le père a pris dans ses bras le fils dans la porcherie alors qu’il mangeait les carroubes des pourceaux.
Cependant c’est cette miséricorde folle et dévaluée qui prétend payer le salaire à celui qui n’a même pas bougé le petit doigt ; ou bien qui s’efforce avec passion de serrer dans ses bras celui qui est dans la porcherie, en se vautrant dans la fange.
Quand cette version folle des vertus atteint les têtes mitrées, qui se mettent à faire des petites concessions et à dire à tort et à travers des idioties et des douceurs pour qu’on ne les accuse pas devant le tribunal du monde, nous pouvons nous mettre à trembler ; mais comme nous le lisons dans l’Évangile : « s’ils se taisent (2), les pierres crieront ».

Et pour accomplir ces terribles mots, les couturiers Doménico Dolce et Stefano Gabanna, des pédés (ndt: en vo le terme est volontairement fait pour choquer: mariconazos) de génie et avec des c……. (ndt: en vo, le mot familier est aussi employé sans détour !) comme le cheval d’Espartero (3), remplis d’une authentique miséricorde (qui est celle qui commence par être juste, en donnant à chacun ce qui lui revient), ont crié ce que, peureux, taisent ceux qui devraient parler.
Gabanna a affirmé que « la famille n’est pas une mode passagère » ; et qu’ « il y a en elle un sens d’appartenance surnaturelle ». À cela Dolce a ajouté sans détour:
« Nous n’avons pas inventé la famille : elle a son icône dans la Sainte Famille. Et ce n’est pas une question de religion ou d’état social, il n’y a pas d’autre solution : tu nais et il y a un père et une mère. Ou tout au moins cela devrait être ainsi. C’est pour cela que je ne suis pas convaincu par ceux que j’appelle moi "fils de la chimie", des enfants synthétiques. Des utérus de location, du sperme choisi sur catalogue. Après va donc expliquer à ces enfants qui sont leurs parents ! Procréer doit être un acte d’amour. (…) Je suis gay, je ne peux pas avoir un enfant. Je crois qu’on ne peut pas tout avoir dans la vie. C’est aussi beau de se priver de quelque chose. La vie a un cours naturel, il y a des choses qu’on ne doit pas modifier. Une de celles-là c’est la famille ».

Il y a d’autres choses, par contre, qu’on devrait modifier. Dans un monde infesté de vertus folles, il conviendrait pas exemple que des pédés portent des mitres ; et que quelques mitrés deviennent couturiers, pour pouvoir combler pleinement leur vanité la plus intime et cachée dans l’échelle des vanités.

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Notes de traduction

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(1) Le Boeuf Muet: Alors que le futur St Thomas d’Aquin étudiait à Cologne, ses compagnons qui le voyaient très robuste mais également particulièrement taciturne, le prenant pour un type pas très malin, le surnommèrent ainsi. Leur professeur (le futur St Albert le Grand) en lisant les notes laissées par Thomas, leur dira : "Vous l’appelez le bœuf muet, mais ce bœuf un jour remplira le monde entier de ses mugissements".

(2) Tous ne se taisent pas comme par exemple et notamment en Espagne, l’évêque d’Alcalá de Henares, Mgr Reig Plá, attaqué plusieurs fois devant les tribunaux de son pays, par rapport à certains sujets et par certains groupes de pression, pour avoir proclamer l’Évangile ; ou tout récemment Mgr Ravel, évêque aux armées – France, qui a osé écrire «Nous ne devons pas cautionner les folies de l’euthanasie, du mariage pour tous et autres caricatures de Charlie Hebdo» ; précisions ici .

(3) Donc énormes attributs virils d’autant qu’il s’agit d’un cheval de guerre ! En effet son maître, Joaquín Espartero (1793-1879) fut un militaire et homme politique espagnol particulièrement illustre. De basse extraction (né fils d’un charretier espagnol), il fit ses premières armes, encore adolescent, contre les troupes napoléoniennes; il deviendra officier et même général. De la faction libérale, il soutiendra d’une manière décisive la Reine Isabelle II d’Espagne (il fut régent du royaume d’Espagne pendant sa minorité) et remportera des batailles décisives dans la guerre civile (guerres carlistes) opposant les partisans du frère du défunt roi d’Espagne Ferdinand VII, aux partisans d’Isabelle, fille du défunt roi, et qui selon la tradition instaurée depuis les Bourbon d’Espagne, n’aurait pas du régner.
Malgré la familiarité du ton et du vocabulaire, J.M. de Prada se veut donc particulièrement élogieux pour saluer le courage des deux couturiers italiens.

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