Le véritable synode commencera le 24 octobre

Deux articles de la blogosphère hispanophone à propos du Synode. L’un est d’une vieille connaissance, le P. Santiago Martin, qui garde malgré tout l’espérance chrétienne, l’autre d’un blogueur «conservateur», César Uribarri, plus pessimiste

Les deux m'ont été adressés par Carlota, qui les a traduits.
Le P. Santiago Martín, "hôte" récurrent de ces pages, est fondateur des Franciscains de Marie, présents dans 28 pays, et César Uribarri un laïc catholique conservateur, avocat et journaliste, père de famille nombreuse.

Père Santiago Martin

Rien de nouveau sous le soleil

www.religionenlibertad.com
13 octobre 2015


La première semaine du Synode des évêques sur la famille a servi pour voir qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil. Pour ce que l’on a pu voir, tout est en train de tourner autour de la communion des divorcés remariés et dans une moindre mesure autour de l’homosexualité. Tant est si bien que le Pape a dû intervenir (??) pour rappeler que la famille a d’autres problèmes et pas seulement ceux-là. En tout cas, ce sont ces questions-là qui ont suscité l’attention depuis que le cardinal Kasper a prononcé son discours au consistoire des cardinaux [de février 2014].

Les deux positions ont été claires et parfaitement définies depuis le premier moment. Pour les uns, le dogme doit continuer à être uni à la pastorale et l’on ne peut pas prétendre appliquer en pratique ce que l’on nie en théorie. Pour les autres, la pastorale doit s’exercer avec miséricorde et bien que l’on ne nie pas le dogme, il faut le laisser de côté pour porter attention aux nouvelles réalités qui se présentent.
Certes, on ne peut pas dire que l’adultère est nouveau (et sinon, qu’on le demande à Saint Jean Baptiste ou à Saint Thomas More, qui ont été martyrisés pour dire à leurs monarques respectifs qu’ils ne pouvaient pas faire ce qu’ils étaient en train de faire), et l’homosexualité n’est pas non plus nouvelle ; ce qui est nouveau c’est leur diffusion et, surtout, la perception différente des devoirs et des droits.

Au synode, donc, deux approches différentes se heurtent. Certains regardent le Christ, Saint Paul, le Magistère de l’Église. D’autres regardent la société actuelle, marquée par un relativisme radical qui exige que tout se soumette à l’empire des sens, à la tyrannie des désirs. Pour les premiers, nier le Christ et trahir les enseignements ininterrompus de l’Église durant les deux mille ans de son histoire mettraient le christianisme en dehors de la mission que le Seigneur a donnée à ses disciples et, par conséquent, ferait que l’Église cesserait d’être l’institution que le Christ a fondée, pour être autre chose. Par les seconds, le dépôt de la foi ne peut être rigide et il faut l’adapter aux temps, y compris en modifiant, - bien que pour l’instant ce soit seulement dans la pratique -, les enseignements du Christ Lui-même. Les premiers parlent de fidélité et les seconds de miséricorde. Les premiers n’ont pratiquement pas de soutiens dans les grands médias de communication, tandis que les seconds les ont tous en leur faveur. Les premiers souffrent le martyre des insultes et les seconds, au nom de la miséricorde, insultent gravement les premiers tous les jours.

Si je n’avais pas la foi, je dirais que ceux qui considèrent que le message du Christ ne peut pas être modifié sans le trahir, sont en passe de perdre. Mais j’ai la foi. Je crois en l’Esprit Saint. Quelque chose arrivera, même si c’est un Miracle, pour que, à la fin, l’Église ne renie pas son fondateur, même s’il faut souffrir l’incompréhension et la persécution du monde pour cela.

César Uribarri

Ce n’est pas le synode qui me fait peur, mais François

www.adelantelafe.com
13 octobre 2015


Deux synodes sont actuellement en cours: le réel, auquel assiste, extasiée, une multitude majoritairement endormie dans son ingénuité, et celui de François qui commencera le 24 octobre.

Le réel, celui de cette année 2015, a commencé à découvert en 2014 quand le point de départ a été défini, avec cette relatio finale dans laquelle s’est forgé tout ce qui maintenant doit se concrétiser, et non pas comme un simple document d’étude, mais comme une mission que Sa Sainteté a donné à l’Église Universelle, recevant pour cela non seulement sa bénédiction mais la plus solennelle, celle de la garantie de Sa Dignité Suprême. Mais ce n’était pas suffisant parce que le Synode de 2014 n’avait pour objectif que la définition des propositions, restait à mettre la structure, la solution juridico-canonique à de tels défis. Et je ne fais pas référence au défi ronflant que donne le titre du Synode de 2015 (Famille et défis modernes) mais aux vrais défis à la tradition de l’Église, - l’homosexualité la communion des divorcés remariés, qu’on a voulu mettre sur la table synodale avec un naturel maladif.

Même si tout cela est bien connu, cela vaut la peine de s’y arrêter un instant, parce qu’étant certain que dès le début le Pape François avait indiqué que le « thème » de la communion des divorcés remariés était quelque chose de fondamental pour lui et pour son pontificat, on pouvait deviner que le Synode de 2014 non seulement finaliserait le processus, en lui donnant un statut formel, mais que quelque chose de plus grave serait livré, une certaine bénédiction de l’homosexualité. Cela montre que le rythme de la démolition est plus rapide qu’il ne semblait, et cela parce que les structures qui travaillent à cette démolition de la foi sont plus efficaces et ont plus d’audace, se sachant protégées par l’actuel Pape régnant (..). Il ne faudra donc pas s’étonner que l’agressivité des propositions aille crescendo au fur et à mesure qu’avanceront les sessions du Synode.

Comment cela est-il possible?

C’est qu’avec l’assentiment du Pape, on a défini une procédure synodale de musellement, qui n’est pas la recherche de la déclaration individuelle de positions mais la recherche, anonyme de consensus. Chose qui a été facile à obtenir simplement en limitant à 3 minutes chacune des interventions personnelles des pères synodaux et en donnant un plus grand poids aux réunions de groupes par langues (les cercles mineurs) que l’on obligera à élaborer des accords consensuels dans un document commun.
Qu’est ce que cela signifie ? Qu’on ne votera pas sur les propositions de chacun des pères synodaux, mais qu’indépendamment des positions personnelles qu’ils pourraient avoir (aussi orthodoxes qu’elles puissent être), l’unique document significatif sera le document final de chaque cercle rédigé par le consensus de ses membres. Consensus qui n’exigera même pas de trouver un centre commun d’idées de la totalité des membres, mais où la simple opinion de la majorité sera suffisante pour faire taire tous les avis exprimés simplement en ne reprenant pas leurs propositions. C'est-à-dire que sans qu’il soit nécessaire de faire “préparer” le document par les présidences de chaque cercle, il suffira que l’on ait une majorité progressiste dans chaque cercle pour que les documents qui en résultent fassent trembler les fondations de l'orthodoxie. Et si la majorité n’est pas clairement et suffisamment en accord avec le changement doctrinal, il reste encore à connaître la capacité de manœuvre des présidences pour modifier ces consensus en les éloignant d’une orthodoxie théorique.

Mais si ce n’était pas suffisant, il reste encore un tour de plus. Les documents des cercles mineurs ne sont que des documents de travail. À la fin du Synode, ce seront les rapporteurs nommés par le Pape qui rédigeront un document définitif qui sera présenté au Saint Père après le vote des pères synodaux. Mais ce que sera ce vote n’est pas clair: exigera-il la majorité, devra-t-elle être qualifiée, que se passera-t-il en cas de non atteinte d’une majorité ? Tout document, quel qu’il soit, sera-t-il présenté simplement en indiquant le nombre de votes qu’il a obtenus, ou même pas? Chaque jour nous arrivent des nouvelles de changement de procédure qui ne font que confirmer comment la trame de cette procédure veut fermer toute parcelle de subterfuge à la sagesse doctrinale, comme par exemple d’exiger des majorités qualifiées pour rejeter des propositions hétérodoxes qui ont été admises à la majorité simple.

Si j’ai de nouveau brièvement rapporté le fonctionnement du Synode, ce n’est que pour souligner la prépondérance donnée au consensus indépendamment de son contenu. Et ce n’est pas un détail mineur. Étant donné que nous savons exactement quels ont été les votes du Synode 2014 pour chacune des propositions débattues nous savons vers où ont penché les pères synodaux en 2014 et c’est pourquoi, connaissant l’identité de ces pères synodaux de 2014 en comparaison avec les actuels pères synodaux, nous pouvons prédire vers où il faut prévoir que penchera le résultat du Synode 2015.

Le panorama, en résumé, ne semble vraiment pas encourageant, parce que si le Synode 2014 a a permis, avec la bénédiction du Pape, de traiter de la « bonté » de l’homosexualité et de la communion des divorcés, l’ensemble des pères synodaux actuels, plus orientés à gauche que leurs prédécesseurs de 2014, ne restera pas en accord seulement avec les insinuations de l’an dernier. Il est raisonnable de s’attendre à ce que le consensus fasse un pas de plus dans l’hétérodoxie et que pour cela le document final apporte suffisamment de matériel en faveur des changements pastoraux opposés au magistère de l’Église.

Tout paraît mesuré, pesé, planifié avec une anticipation suffisante pour ne laisser aucun pli. On a conçu des règles du jeu pour permettre le changement des normes, avec le ballon au point de pénalty et des buts laissés sans gardien, pour que la manœuvre réussisse sans opposition aucune. Pas même l’opposition publique, parce qu’il n’y aura aucun document officiel publié, ni possibilité de publier un document synodal final, et de plus, chaque jour, il paraît de plus en plus possible qu’il n’y ait pas d’exhortation papale finale.

C’est pour cela que le véritable drame commencera le 24 octobre, car alors la totalité de la décision à prendre, la totalité des mesures à adopter, seront exclusivement dans les mains du Saint Père. Le même Saint Père qui demande à ne pas avoir de « préjugés », à « se débarrasser des rigorismes », de « s’ouvrir au Dieu des surprises », en mettant en discussion ce que l’Église a toujours aimé et ce qu’elle a toujours défendu au prix, tant de fois, du sang de ses martyrs (n’oubliez pas, Chrétiens, saint Jean-Baptiste et saint Thomas More).

Bien sûr, le Synode me fait peur, mais ce qui me fait plus peur encore, c’est le Saint Père parce que tout ce qui se passe, tout ce qui se débat, on le doit à son parrainage, à son assentiment, à son soutien bienveillant, non seulement en permettant que le pire de l’Église, - ceux qui depuis des années ont essayé de démolir la doctrine et la morale de l’Église -, qu’ils occupent des postes de responsabilité synodale (ce qui est déjà grave), mais en bénissant comme voulu de Dieu, comme propulsé par son Saint Esprit, que ce qui, hier, était saint, aujourd’hui peut être adapté aux temps.

Et si tout, avant ce Synode, semblait être une apparente catéchèse inoffensive de signes, - étant donné que la culture de l’image nous prédisposait à accepter tout changement -, derrière le tourbillon de Bergoglio, il n’y a pas un simple changement d’image, il n’y a pas une simple et sympathique spontanéité, il n’y a pas le simple portrait d’une personnalité papale débordante, excessive, apparemment désinhibée, mais un changement de paradigmes. Les accolades aux homosexuels, les appels téléphoniques aux divorcées les invitant à communier, le rapprochement affectueux envers les protestants…Tout va en accord avec un dessein de museler un synode crucial dans son pontificat. Parce que c’est François qui a mis en discussion, libérée de tous « préjugé », la doctrine de l’Église ; parce c’est François qui a fait tourner tous ses actes et ses pensées, tout au long de son pontificat, autour de cet événement conçu pour la plus grande gloire de la pastorale contraire à la doctrine…

Ce n’est donc pas François qui a eu besoin de la mafia de Saint Gall, pour arriver à la papauté, c’est plutôt la mafia de Saint Gall qui a eu besoin du Pape. Ils se sont voulus mutuellement. Nier qu’il y ait une unité de critères, de projets, entre eux, semble puéril. Si Bergoglio en son temps a été un disciple de Martini, aujourd’hui il est un maître privilégié.

C’est pour cela que le Synode postérieur au 24 octobre m’inquiète. C’est le Synode post-synodal, le Synode des mafias, des silences publics, du travail dans l’ombre. Parce que combien de mafias similaires à celle de Saint Gall pourront travailler discrètement avec le Saint Père. Sans phares, sans lumières, mais bien plus avec un « très précieux » document synodal qui probablement servira de support « consensuel » à la folie. . C’est pour cela que s’est levé le silence officiel, pour qu’il n’y ait aucun compte-rendu. Pour que l’on puisse travailler dans la liberté de celui qui tient le manche de la poêle.