Benoît XVI a enchanté

Billet d'humeur d'Antonio Socci qui met en parallèle l'admirable discours du Pape émérite du 4 juillet dernier et... le Meeting de Rimini

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Le retour de Benoît XVI

 

Le dernier billet d'Antonio Socci intitulé «Le Meeting de Rimini sombre dans le rouge» parle de la grande rencontre estivale annuelle de Communion et Libération, dont le titre de cette année «Di che è mancanza questa mancanza?» (Ce manque est le manque de quoi?) susciterait selon lui pas mal de quolibets. J'ai traduit seulement la première partie (le reste est tout aussi intéressant, mais parle moins aux non-italiens), parce qu'elle ramène au discours admirable prononcé le 4 juillet par Benoît XVI.
Le reste, donc, est une évocation teintée d'humour nostalgique des invités du Meeting, en gros des gauchistes patentés venus se montrer - inconnus en France, à part le premier ministre Renzi (très occupé entre autre à faire voter une législation sur le délit d'homophobie, et à introduire subrepticement le gender dans les écoles primaires), sous la houlette de Mgr Galantino, l'inneffable secrétaire de la CEI nommé par le pape. Au point que Socci compare le Meeting à la fête de L'Unità, l'équivalent transalpin de "notre" fête de l'Huma.
Antonio Socci évoque l'époque où les invités d'honneur du même Meeting s'appelaient Joseph Ratzinger et même Jean Paul II. La comparaison est cruelle:
«Aujourd'hui il y a ... Galantino. La comparaison est embarrassante. Comme pour dire qu'avant il y avait Bach et Mozart, et maintenant, il y a le type qui massacre l'accordéon dans une maison de retraite, dans le feuilleton populaire "Villa Arzilla"».
On apprend au passage que le journaliste irlandais John Waters, qui s'est fait connaître comme le leader de l'opposition au mariage gay dans son pays, présent à toutes les 17 dernières rencontres, n'a pas été invité cette année.

Di che è mancanza questa mancanza?

www.antoniosocci.com
5 juillet 2015
(ma traduction)
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(...)
Pour comprendre non seulement ce qui «manque» au Meeting 2015 et à l'actuel C&L, mais, en ce moment historique, également à l'Eglise (et au monde), je vous invite à considérer un fait, apparemment marginal advenu hier: Benoît XVI à Castel Gandolfo, a reçu deux doctorats honorifiques.
C'est le cardinal Stanislaw Dziwisz ex-secrétaire de Jean Paul II et maintenant archevêque de Cracovie, qui les lui a conférés. Le doctorat honorifique a été décerné par l'Université pontificale "Jean-Paul II" de Cracovie et par l'Académie de Musique de Cracovie.
En cette circonstance, après un long silence, le Pape a dit plusieurs choses: il a parlé de son grand ami, le pape polonais («Sans lui, mon chemin théologique et spirituel n'est même pas imaginable») et puis de la musique qui était l'objet du doctorat.
Le Pape Benoît - malgré la brièveté du discours - a enchanté (comme d'habitude), mais - si on a su les comprendre - il a dit des choses de vraie actualité.
Il ne s'est pas occupé de climatiseurs, de vers, de reptiles, de tri sélectif des ordures, comme l'encyclique «Cantique de Frère Sola» (allusion au titre humoristique d'un précédent article, cf. benoit-et-moi.fr/2015-I)) signée par Bergoglio (1), mais il a dévoilé le mystère de la beauté de la musique.

L'AMOUR, LA MORT ET DIEU
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Il a dit qu'il y a en particulier trois endroits d'où naît la musique, «l'expérience de l'amour» qui ouvre à la créature «une nouvelle grandeur et amplitude de la réalité»; puis «l'expérience de la tristesse», spécialemeny quand on est touché «par la mort et la douleur». Enfin, le troisième «est la rencontre avec le divin»
Le pape observe:

«Peut-être est-il possible d'affirmer qu'en réalité, dans les deux autres domaines aussi - l'amour et la mort - le mystère divin nous touche et, dans ce sens, c'est l'«être touchés» par Dieu, qui, globalement, constitue l'origine de la musique (...) On peut dire que la qualité de la musique dépend de la pureté et de la grandeur de la rencontre avec le divin, avec l'expérience de l'amour et de la douleur. Plus pure et plus vraie sera cette expérience, plus pure et plus grande sera la musique dont elle naît et se développe».

A ce point Ratzinger a mis le doigt sur une plaie. Il a rappelé qu'avec la réforme liturgique post-conciliaire a refait surface le «très ancien conflit» entre ceux qui veulent la musique sacrée dans la liturgie et ceux qui favorisent la participation active des fidèles.
Benoît XVI a résolu le conflit de façon géniale, en disant que justement la liturgie célébrée par saint Jean-Paul II dans ses nombreux voyages à travers le globe, devant des milliards d'êtres humains, a montré «toute l'étendue des possibilités expressives de la foi dans l'événement liturgique» et aussi combien «la grande musique de la tradition occidentale «la grande musique de la tradition occidentale n'est pas étrangère à la liturgie, mais est née et a grandi par elle, et de cette manière contribue toujours de nouveau à la façonner».

Le pape a ensuite souligné l'unicité de la chrétienté (pour tous ceux qui croient que toutes les religions sont égales): «Dans le cadre des cultures et des religions les plus variées, il existe une grande littérature, une grande architecture, une grande peinture et de grandes sculptures. Et partout, il y a aussi de la musique. Et pourtant, dans aucune culture il n'existe une musique d'une grandeur comparable à celle née dans le contexte de la foi chrétienne: de Palestrina à Bach, Handel, jusqu'à Mozart, Beethoven et Bruckner. La musique occidentale est quelque chose d'unique, qui n'a pas d'égal dans d'autres cultures. Cela devrait nous faire réfléchir».

Après cette allusion à l'Occident, il a ajouté (et prêtez attention au caractère dramatique des premiers mots):
«Nous ne connaissons pas l'avenir de notre culture et de la musique sacrée. Mais une chose est claire: là où advient réellement la rencontre avec le Dieu vivant, qui dans le Christ vient à nous, là naît et grandit aussi à nouveau la réponse, dont la beauté provient de la vérité elle-même. »

Il a conclu:
«Cette musique, pour moi, est une démonstration de la vérité du christianisme. Là où se développe une telle réponse, s'est réalisée la rencontre avec la vérité, avec le vrai créateur du monde. Pour cette raison, la grande musique sacrée est une réalité de rang théologique et de signification permanente pour la foi de toute la chrétienté, même s'il n'est pas du tout nécessaire qu'elle soit exécutée toujours et partout. D'autre part, cependant, il est également clair qu'elle ne peut pas disparaître de la liturgie et que sa présence peut être une manière tout à fait spéciale de participation à la célébration sacrée, au mystère de la foi. ».

Peu de mots, fascinants, simples mais puissants par l'intelligence de la réalité et le génie catholique.

Qel rapport - vous demanderez-vous - avec le Meeting 2015? Rien. Mais c'est justement cela le drame.
Ce qui manque au Meeting - mais encore plus à l'actuel C&L et à L'Eglise), c'est ce regard, cette intelligence de la foi: dans le goufre ouvert devant ce «manque», nous avons tous sombré...

En marge...

(1) A ce propos, je ne résiste pas au plaisir de reproduire ce que l'impitoyable Antonio Socci a écrit le même jour sur sa page Facebook:

PETITS EXEMPLES DE COHÉRENCE
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Comparer ces deux citations:

¤ les habitudes nuisibles de consommation (...) ne semblent pas céder mais s’amplifient et se développent. C’est ce qui arrive, pour donner seulement un exemple simple, avec l’augmentation croissante de l’utilisation et de l’intensité des climatiseurs. Les marchés, en cherchant un gain immédiat, stimulent encore plus la demande. Si quelqu’un observait de l’extérieur la société planétaire, il s’étonnerait face à un tel comportement qui semble parfois suicidaire.
(Pape Bergoglio, encyclique Laudato Si', n.55)
.
¤ Tous lui ont recommandé (au pape Bergoglio) de ne pas se fatiguer, sa cousine Isa lui a suggéré «de mettre la pédale douce». Carla et Vanna l'ont invité à prendre un peu de vacances. Mais rien n'y a fait: «Je n'en ai jamais pris, je suis bien à Santa Marta,
j'ai l'air conditionné, je continue à travailler» raconte Carla.
(
Vatican Insider du 23 Juin 2015)
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Comme c'est typique de la mentalité de la gauche: PREDICARE BENE E RAZZOLARE MALE... (Bien prêcher et mal agir, "fais ce je je dis, et pas ce que je fais")
Je propose cette petite perle parce que justement aujourd'hui, je lis un commentaire à l'encyclique, comme à l'habitude exaltant, où il est dit que le pape Bergoglio renverse la doctrine sociale de l'Eglise en proposant avant tout le changement de l'homme avant celui des structures ...