Une pastorale anti-pastorale


Pourquoi le Pape, tout en sachant parfaitement que ses propos donnent lieu à des malentendus et des falsificatons journalistiques, ne prend jamais la peine de les rectifier ou de les expliquer en personne et directement (1er/3/2016).

 

L'explication serait que François n'est pas (que) "le Pape du Concile", mais qu'il est lui-même un fruit du Concile, et qu'il n'imagine pas d'autre maniière pour l'Eglise de "parler au monde" que de placer la pastorale avant la doctrine. Avec des résultats qui sont sous les yeux de chacun.

Cette analyse intéressante, publiée sur le blog <Campari & de Maistre>, n'est pas forcément à écarter, mais elle constitue l'interprétation, disons la plus bienveillante, que l'on puisse donner de cette curieuse attitude papale...

Une pastorale anti-pastorale


Riccardo Zenobi
www.campariedemaistre.com
23 février 2016
Ma traduction

* * *

L'auteur de ces lignes sait parfaitement que le Pape est régulièrement et systématiquement déformé par les médias, et que ses discours sont toujours rapportés de façon biaisée et donc intellectuellement malhonnête par les journaux, la télévision, etc. Je suis également bien conscient que, si l'on va vérifier les discours dans leur intégralité et non pas "la coupe" qu'en donne la presse, on peut en tirer un texte compatible avec la doctrine catholique.
Ceci, en paroles.
Mais les faits montrent que le pape se laisse tranquillement déformer par les médias, et bien que cela arrive tout le temps et pour tout ce qu'il dit, il ne fait rien pour se faire comprendre, pour lever l'ambiguïté, pour dire «non, regardez, vous n'avez rien compris à ce que j'ai dit».
Rien de tout cela, que ce soit de la part du Pape ou de la Curie romaine ou d'un organisme du Saint-Siège, qui au moins soulève le soupçon que la presse se moque de tout le monde.
Bref, ce Pape s'exprime volontairement de manière ambiguë, parce s'il le faisait involontairement, il se corrigerait au moins un peu, où il pèserait un peu plus ses mots. Mais malgré tout cela, il persiste dans la méthode de faire des discours qui, régulièrement dénaturés, tout aussi régulèrement ne trouvent aucune reformulation ou interprétation rectificative. Le Pape ne fait rien pour se faire comprendre, et cela sème une énorme confusion dans les consciences des fidèles (y compris la mienne), alors que sa tâche est de confirmer les croyants catholiques dans la foi.

J'en tire quelques considérations.

En premier lieu, le Pape sait que les médias le déforment, provoquant des dommages incalculables; cependant, il maintient délibérément l'ambiguïté. Et voici la question que je pose: pourquoi cela? Pourquoi utiliser une stratégie de communication vouée à l'échec et destructrice, sachant bien qu'elle ne donne aucun résultat positif?
Discutant de cela avec une connaissance, nous en avons conclu que le pape croit vraiment que la seule façon possible de parler du Christ à un monde déchristianisé est de mettre le ministère et le dialogue avant la personne du Christ et qui Il est. C'est du reste une stratégie que l'Église suit depuis 50 ans, avec des résultats spectaculairement désastreux. Mais Bergoglio est le premier pape du post-Concile qui n'a pas participé à Vatican II (il avait 29 ans quand il s'est terminé, étant né en 1936), et c'est pourquoi il a vécu et s'est formé dans le climat d'ivresse idéologique qui mettait le dialogue avant tout le reste, et , malheureusement, il raisonne uniquement en ces termes, sans même envisager de changer de stratégie, car il considère toutes les autres façons de communiquer l'Evangile comme condamnées a priori à l'échec, à l'incompréhension et au rejet. En substance, ce pape a pleinement mis en œuvre les exigences du Concile, et bien qu'il sache que ses actions sont en train de dévaster l'Eglise, il est convaincu que c'est le seul moyen d'action resté possible à un prêtre chrétien dans le monde d'aujourd'hui (et il est dans une compagnie très fournie de prêtres / évêques / cardinaux.)

Mais le christianisme, ce n'est pas chercher à plaire ou à être compris par le monde. Évangéliquement, le chrétien doit tenir le langage du «oui, c'est oui, non, c'est non», et il doit savoir que si le monde le hait, c'est parce qu'avant cela, il haïssait le Christ (cf. Jn 15, 18). Et la stratégie de la «pastorale avant tout» n'a pas apporté de résultats positifs, même au niveau pastoral. Pire, «le dialogue à tout prix» a signifié que les catholiques ont été les seuls seuls à payer le coût du dialogue, s'alignant sur les opinions du monde, lequel n'est pas devenu plus chrétien. C'est l'échec total de toutes les ambitions pastorales déclenchées par le Concile Vatican II. Bergoglio peut bien être appelé le Pape du Concile: tandis que ses prédécesseurs se retrouvaient avec la gestion du post-concile sur les bras, François est au contraire l'un des «fruits du Concile», puisqu'il a vu uniquement ce type de pastorale et cette forme de relation de l'Eglise au monde.

Il va sans dire que Vatican II n'est pas un «concile hérétique» ou à rejeter en bloc. Mais étant le premier concile pastoral de l' histoire, c'est au niveau pastoral qu'il doit être jugé, et les résultats sont totalement négatifs. En outre, l'intention du Concile n'était pas de définir des Vérités révélées, mais seulement de changer la méthode d'approche au monde; la thèse selon laquelle Vatican II est «hérétique» n'est donc pas soutenable: pour être tel, [un concile] doit définir des hérésies, et le Concile s'est délibérément abstenu de définir. Mais la pastorale qui en est sortie était totalement contre-productive.
Si on veut sortir de cette confusion, née de documents conciliaires qui se prêtent à une interprétation ambiguë, il faut revenir à la méthode définitoire, proclamer à nouveau la Vérité de la Personne du Christ sine glossa (càd sans édulcoration), sans penser a priori à ce que sera l'effet sur le monde. Le succès d'un «plan pastoral» n'est pas en notre pouvoir, à nous, catholiques, Dieu seul peut le faire.
Nous devons donc renoncer à l'engouement pour le «dialogue à tout prix» et simplement recommencer à adorer notre Seigneur Jésus-Christ, en disant à tous qui Il est. C'est la seule chose que nous puissions faire, parce que tout le reste s'est avéré être un échec total. Il ne nous est resté que Dieu, nous n'avons plus aucun prétexte pour nous bercer de l'illusion que nous pouvons confier l'évangélisation à la seule pastorale.

Adorons à nouveau Dieu et son divin Fils, Jésus-Christ, si nous voulons rester catholiques et chrétiens. L'influence dans la vie civile, sociale et culturelle nous a été enlevée, nous n'avons plus les moyens de faire un travail pastoral.
Telle est la leçon que nous donne involontairement le présent pontificat.