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L'amertume du cardinal

Propos du cardinal Müller lors d'une réunion-débat publique en Allemagne, et quelques précisions de Mgr Gänswein. Article de Marco Tosatti (15/9/2017)

Si ce que rapporte la presse allemande, à laquelle se réfère Marco Tosatti, est exact (et il n'y a aucune raison d'en douter), on peut penser que son "départ" forcé de la CDF a DE FAIT rendu sa liberté de parole... à l'ex-préfet, même s'il s'autocensure par nécessité. C'est donc plutôt une bonne nouvelle!

Müller: au Vatican le pouvoir a la priorité sur la foi en crise. Un développement à corriger.

Marco Tosatti
www.marcotosatti.com
14 septembre 2017
Ma traduction

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Le cardinal Gerhard Müller a récemment présenté en Allemagne son livre (Le Pape. Mission et mandat). À Mannheim, lors d'une rencontre organisée par Gloria Thurn und Taxis au Reiss-Engelhorn Museen étaient également présents Mgr Georg Gänswein et Mgr Wilhelm Imkamp, directeur d'un site de pèlerinage, le Maria Vesperbild. La rencontre - une sorte de table ronde - était modérée par un historien de l'église protestante, Christoph Markschies.

Le cardinal, ex-préfet de la foi, a fait quelques déclarations intéressantes, en particulier sur la relation entre magistère papal et théologie. Une «compétence théologique» profonde et organisée doit être le fondement de «l'autorité magistérielle». Comme le rapporte le Tagespost, est-il possible de «se baser uniquement sur l'inspiration de l'Esprit Saint? Une idée qui donne des frissons, pour le professeur dogmatique. Müller se réfère ici à l'exemple de saint Robert Bellarmin (1542-1621); lequel indiqua à Clément VIII [pape de 1592 à 1605] en termes clairs son manque de compétence théologique.

Selon une autre source, le Mannheimer Morgen, le cardinal a cité les mots exacts de saint Robert Bellarmin: «Vous n'y connaissez rien!», ainsi qu'il l'a dit au pape. Le journal en ligne continue: «Cela s'est passé il y a très longtemps. Mais le cardinal Gerhard Ludwig Müller l'a explicitement nommé comme son modèle, et il a mentionné cette phrase avec joie». Selon le Morgen, il est clair que la blessure du récent licenciement de la charge de préfet de la foi «est encore profonde, très profonde».

Le Mannheimer Morgen rapporte ensuite quelques phrases du cardinal sur la situation actuelle au Vatican. Au lieu de la Congrégation (pour la Doctrine de la Foi, ndr), c'est la Secrétairerie d'Etat qui est aujourd'hui considérée comme l'institution la plus importante: «Diplomatie et questions de pouvoir sont désormais prioritaires et il s'agit d'un développement erronéet crucial qui doit être corrigé». La foi chrétienne devrait être au centre, selon Müller, et le Pape devrait simplement être «un serviteur du salut».

À titre d'exemple, le cardinal a cité la récente visite du secrétaire d'État, le cardinal Pietro Parolin, à Moscou, et l'impression publique qu'on en a eue. Les images de Parolin avec Poutine et le Patriarche Kirill, selon Müller, «donnent une vision fatale, car on peut tomber dans le piège de penser que la religion et la politique sont une seule chose».

Quand l'Église s'est concentrée sur la politique et le pouvoir, cela n'a jamais été une bonne chose. «Le centre de la papauté n'est pas le Pape lui-même, mais la foi chrétienne», a dit le cardinal, qui souhaite également «une préparation théologique plus claire dans les documents officiels».

Intéressant, aussi, ce qu'a dit l'archevêque Gänswein. Selon le Tagespost, le préfet de la Maison pontificale a déclaré: «Il ne me semble pas que les catholiques aient abandonné l'unité avec le pape. Si des cardinaux critiquent les déclarations et les comportements du pape, qu'y a-t-il de mal?». Et il a souligné que le Pape lui-même a demandé que l'on parle avec clarté. «L'Office papal doit tolérer qu'un cardinal et un autre aient des opinions différentes». Dans l'histoire, il y a eu des critiques aux Papes, et Gänswein a conclu: «Je ne vois pas cela comme une critique à l'Office papal, mais une critique de certaines déclarations qui ont été mal interprétées par certaines personnes, y compris en dehors de l'Église».