Féminisme: l'Eglise à la remorque du monde

Quelques réflexions sur les revendications féministes, relayées par l'OR, des religieuses qui en ont assez de servir de domestiques aux cardinaux (5/3/2017)

Luc 10:38-41

38 Comme Jésus était en chemin avec ses disciples, il entra dans un village, et une femme, nommée Marthe, le reçut dans sa maison.
39 Elle avait une sœur, nommée Marie, qui, s’étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole.
40
Marthe, occupée à divers soins domestiques, survint et dit:
Seigneur, cela ne te fait-il rien que ma sœur me laisse
seule pour servir? Dis-lui donc de m’aider.
41 Le Seigneur lui répondit: Marthe, Marthe, tu t’inquiètes et tu t’agites pour beaucoup de choses.
42 Une seule chose est nécessaire. Marie a choisi la bonne part, qui ne lui sera point ôtée.

Le 2 mars dernier, une certaine Delphine Allaire, collaboratrice de Vatican News en français, rappelait dans un article à quel point le Pape s'implique dans la "cause des femmes" (!)

Le Pape François prend régulièrement position pour encourager les femmes à investir tous les espaces de la société. Dans une lettre adressée à une écrivaine espagnole, il a appelé à un renouvellement anthropologique qui prenne en compte les identités féminine et masculine, dans leur sensibilité culturelle contemporaine.
(www.vaticannews.va).


Le prétexte de l'article était donc la promotion d'un livre "ami" pour faire avancer une cause cruciale (rassurez-vous, rien d'aussi futile que la condition des chrétiens d'Orient, la déchristianisation galopante de l'Occident ou le risque de schisme au sein de l'Eglise) chère au coeur de ceux qui tiennent les rênes de l'Eglise:

Les dix choses que le Pape François propose aux femmes. Ainsi s’intitule le livre de l’écrivaine espagnole María Teresa Compte Grau, qui sera officiellement présenté le 7 mars prochain à la fondation Paul VI de Madrid en Espagne. À cet égard, l’auteure a reçu le 12 février une lettre signée du Pape François en personne, rendue publique le 2 mars.
(ibid)


On pourrait ironiser sur le zèle avec lequel l'"auteure" de l'article, accessoirement sur un site internet censé représenter la position de l'Eglise, adopte la féminisation des noms imposée par le politiquement correct...
On pourrait également épiloguer sur l'intérêt témoigné par le Successeur de Pierre (au point de se fendre d'une lettre!) à un pamphlet mineur sur un thème à la mode évoquant davantage un article de "Elle" ou de "Biba" qu'un commentaire de l'évangile, alors qu'il refuse obstinément de recevoir des cardinaux ou de répondre aux interrogations d'éminents théologiens.
Sans doute que les dits "sujets de société" l'intéressent plus (et surtout sont médiatiquement plus rentables) que la doctrine qu'il est censé préserver.
D'autant plus que, se démarquant selon son habitude de l'Eglise pour se donner le beau rôle (ce qui s'appelle battre sa coulpe sur la poitrine des autres!), il a confié dans sa lettre des «inquiétudes» en forme de regret: «Parfois - écrit-il - dans l’Église, le rôle des femmes glisse plus vers la servitude que vers le véritable service».

Les femmes (enfin, CES femmes!) entendent-elles lui rappeler ses promesses génériques et ses déclarations de bonnes intentions, et lui demander de passer aux faits concrets?
C'est ce que peut laisser supposer l'article publié une semaine plus tard par le supplément mensuel consacré aux femmes (!!) de l'Osservatore Romano, sous la plume d'une journaliste française Marie-Lucile Kubacki («journaliste à l’hebdomadaire chrétien La Vie où elle couvre l’actualité religieuse en France et au Vatican»).
L'article est repris toujours sur le site Vatican News en français, et sous la plume de la même Delphine Allaire.
Décidément, au Vatican, le monde est tout petit!

Des religieuses du Vatican alertent sur leurs conditions de travail
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Dans une enquête publiée par le supplément mensuel "Donne Chiesa Mondo" ("Femmes, Église, Monde") de "l’Osservatore Romano", la journaliste française Marie-Lucile Kubacki traite d’un sujet encore inexploré: le malaise de nombreuses religieuses dans leur travail au Vatican.
(www.vaticannews.va)


Comme c'était prévisible, l'article a bien plu aux médias laïc(iste)s, mais il n'a pas non plus fait exploser le baromètre de popularité du pape, vite oublié (pour cause d'inflation!) et vite remplacé par d'autres sujets.
Témoin ce que je lis sur un site italien, dont j'avoue qu'il m'a fait sursauter par la présence incongrue, pour ne pas dire carrément déplacée, du nom de Benoît XVI:

Les propos de la soeur sont un coup de poing dans l'estomac pour une bonne partie du monde ecclésiastique qui jusqu'à présent considérait comme évidente la présence dans des fonctions purement serviles de personnes consacrées, qui ont fait le choix d'une vie religieuse certainement pas pour faire office de bonne au cardinal de service.
Une pratique courante à laquelle personne n'avait jusqu'ici prêté plus d'attention que cela, et il suffit de considérer la présence aux côtés des derniers papes desoeurs et de novices: les Polonaises pour Woytjla, les Memores Domini pour Ratzinger, pour ne citer que les derniers. Benoît XVI est encore assisté par des soeurs à Mater Ecclesiae, le monastère où il reside au Vatican.
Aujourd'hui, la perception change, et il y en a qui élèvent la voix pour protester. Il est évident que la vocation religieuse ne s'exprime pas seulement dans une fonction contemplative, à tel point que la devise du fondateur du monachisme occidental, Benoît de Norcie, était «ora et labora», mais une chose est de prêter service aux pauvres ou d'accueillir les migrants, une autre est de repasser les chaussettes d'un haut prélat qui se promène dans la voiture bleue du Vatican.

Le choix de l'Osservatore Romano est indubitablement courageux, parce qu'il ouvre un front interne à l'Eglise alors qu'il y a déjà de nombreux fronts ouverts (qu'on pense à celui de la pédophilie) et parce qu'en brisant un voile d'hypocrisie typique de la mentalité curiale, il donne la parole à un monde, celui des religieuses, qui assume de plus en plus une forme critique au sein de l'Eglise.
«Nous devons donner vie à une théologie de la femmes», a répété François, reconnaissant le retard de l'Église sur ce sujet. Les sœurs de plusieurs endroits l'ont prise au mot (souvent très problématiques, les interventions américaines) et elles réclament cet espace, ne se contentant plus de jouer simplement des rôles d'intendance.
La prise de position de la soeur et la décision de l'Osservatore font partie de ce parcours.
(www.quotidiano.net)


Tout n'est pas faux, hélas...
Toutefois, en ce qui concerne la "famille" de Benoît XVI, il est difficile (ou trop facile) de débattre contre les inepties rapportées (le lecteur pourrait retirer de la lecture complète de l'article que les pauvres femmes auraient en substance tout juste le droit de servir le prince à table, debout, comme les laquais dans dans les films en costume), si éloignées de la réalité des faits, et je n'ai pas envie de perdre mon temps.
Mieux vaut en rire, et je laisse pour cela le dernier mot à "l'Abate Faria", l'un des correspondants récurrents sous pseudo de Marco Tosatti, qui met en perspective les revendications des "bonnes soeurs" (d'habitude, je n'aime pas accoler ces deux mots, mais là, elles ne l'ont pas volé!) et le hashtag #metoo ("moi aussi") dont l'avatar français n'est autre que l'élégant #balancetonporc.
Sauf que (et c'est là que ce n'est pas aussi drôle que cela) dans ce cas, on préfère ne pas imaginer qui est le "porc".

Les soeurs #metoo des cardinaux de la Curie


www.marcotosatti.com
3 mars 2018
Ma traduction

* * *

L'Osservatore Romano qui fait parler les religieuses #metoo est vraiment quelque chose qui me fait hurler de rire. Maintenant, je ne veux pas aborder la question de leurs revendications "syndicales", ce serait une question délicate et épineuse dont les facettes feraient peut-être sursauter même le bon Tosatti, habitué à toutes les luttes.

En se mettant à la remorque du féminisme (ou n'importe quel -isme) on pense se laver une conscience dont on ne sait pas bien comment elle s'est salie. Parce que le problème n'est pas tant la revendication "syndicale", mais que les sœurs, en tant que femmes, sont encore reléguées aux tâches domestiques, ce qui contredit tout ce qui aujourd'hui est fait pour penser à ce que la femme devrait être ou devenir.

Mais ce qui me semble vraiment digne de mention, c'est comment l'Église en est désormais réduite à courir derrière la mondanité en tout, puisqu'elle est contrainte à compulser l'agenda des choses à faire, bien que rédigé par des gens totalement étrangers à l'Église elle-même.

Abbé Faria.

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