Abus: l'étau se resserre autour de François

Un évêque argentin, nommé par lui, Mgr Zanchetto, qui a démissionné de son diocèse pour avoir couvert des cas de pédophilie et mystérieusement obtenu "en échange" une promotion à un poste prestigieux à la Curie, met le Vatican (i.e. le Pape) dans l'embarras (8/1/2019)

 

Dès le mois de décembre 2017, Sandro Magister s'étonnait des conditions étranges dans lesquelles ce Zanchetta venait tout juste d'être nommé assesseur de l’Administration du Patrimoine du Siège Apostolique: «Une nomination étonnante étant donné que la fonction d’assesseur auprès de l’APSA n’existait pas jusqu’ici et a été créée pour l’occasion». (cf. magister.blogautore.espresso.repubblica.it)

On comprend de mieux en mieux pourquoi François ne se rend pas en Argentine...

Zanchetta, une nouvelle affaire d'abus effleure Sainte-Marthe


Josè Arturo Quarracino
8 janvier 2019
www.lanuovabq.it
Ma traduction

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Les accusations contre l'évêque Zanchetta, suspendu de son poste au Vatican, pour une enquête sur des abus sexuels. Il a quitté son diocèse argentin en 2017 à cause de problèmes de santé, aujourd'hui le Vatican parle d'autoritarisme. Quelle est la bonne version? Mais sa promotion à un poste d'assesseur de l'ASPA (Amministrazione del Patrimonio della Sede Apostolica) soulève des questions sur sa carrière fulgurante: le Saint-Siège connaissait ses problèmes avec les prêtres, mais il a été promu à un poste important de la Curie.


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Mauvaises nouvelles sur le front de la couverture d'abus sexuels par le Vatican. Ce qui est grave, c'est que le nouveau cas dénoncé non seulement provient de la patrie de François, mais frappe un évêque, un de ses amis personnels depuis qu'il était un simple prêtre dans le diocèse de Quilmes, dans la banlieue sud de la province de Buenos Aires. Il s'agit de Mgr Gustavo Zanchetta, qui a mystérieusement démissionné de son poste d'évêque d'Oràn en août 2017 (le pape François l'avait nommé en juillet 2013), puis été nommé en novembre suivant conseiller de l'APSA, l'organe chargé de la gestion du patrimoine économique du Saint-Siège, jusqu'à son retrait forcé annoncé ces jours-ci pour l'ouverture d'une enquête pour abus sexuels.

Une fois de plus, un cas de couverture d'abus sexuel effleure donc la résidence de Sainte Marthe, et toujours concernant des amis personnels du pontife, d'abord avec l'ex-cardinal Theodore McCarrick et maintenant avec Mgr Gustavo Zanchetta.

Dans le premier cas, le témoignage de l'évêque Carlo Maria Viganò a été lapidaire et direct, mais n'a donné lieu à aucune réfutation. Dans le second cas, la forme dans laquelle sa renonciation a été gérée, en un temps record et en dehors du protocole officiel de l'Église dans des cas analogues, et sa promotion plus qu'immédiate dans un organisme aussi sensible que l'Administration apostolique du Saint-Siège (APSA) jette une ombre sur le Pape François: difficile, en effet, de croire qu'on puisse abandonner un diocèse sans attendre l'acceptation de cette renonciation et passer immédiatement après d'un humble diocèse dans une province argentine à une très haute charge, créée dans des temps records et sur mesure par le Vatican, sans que son ami Pape soit impliqué d'une façon quelconque.

L'évêque Gustavo Oscar Zanchetta [né en 1964], qui a aujourd'hui commencé à tomber en disgrâce, est arrivé à l'épiscopat d'Oràn (dans la province de Salta, en Argentine) en 2013 simplement parce qu'il faisait partie du "cercle des amis" du cardinal Bergoglio et ce malgré les nombreux témoignages négatifs qui étaient parvenus au nonce en Argentine et au Saint-Siège au moment de sa nommination.

Plus qu'un "pasteur qui sent l'odeur de la brebis", beaucoup de fidèles le décrivent comme un "pasteur avec une peau de loup", portant au grand jour les trafics économiques et les abus de pouvoir pratiqués dans le diocèse de Quilmes, où il avait été vicaire épiscopal des affaires économiques, procureur général de l'évêché et représentant légal de tous les collèges du diocèse. Nommé évêque d'Oràn à l'âge de 49 ans, un an plus tard, il est impliqué dans une mésaventure qui eut une forte répercussion publique dans la presse locale, mais fut ignorée par la hiérarchie ecclésiastique vaticane. Cela s'est passé en décembre 2014, quand il utilisa sa condition ecclésiastique et ses relations politiques pour ne pas se soumettre à un contrôle d'alcool et de drogue sur une route de la province de Salta, suite à un contrôle de la Gendarmerie Nationale.

Comme nous l'avons dit plus haut, sa démission de l'évêché d'Oràn a fait grand bruit, non seulement en raison de son âge au moment de sa démission (52 ans), mais aussi en raison du caractère inopportun de la procédure: il a quitté son diocèse par une simple lettre, il a abandonné le diocèse et s'est immédiatement réfugié sous la protection de Mgr Andrès Stanvnik, OFM [de "l'Ordre des Frères Mineurs", i.e. franciscain], évêque de Corrientes, à 800 km du diocèse de Salta, évoquant des "problèmes de santé" qui le forçaient à démissionner parce que ces problèmes «ne me permettent pas de remplir pleinement le ministère pastoral qui m'a été confié, surtout compte tenu de la vaste extension de notre territoire diocésain et des énormes défis que nous, comme Église, avons dans le nord du pays», comme on peut le lire dans la lettre de Zanchetta.
Pourtant, le 25 décembre, le 28 décembre 2018 et le 4 janvier de cette année, le journal El Tribuno de Salta a publié quelques-uns des articles rédigées par la journaliste Silvia Noviasky, qui révèlent que la véritable raison du retrait de Mgr Zanchetta en 2017 était essentiellement due à la dénonciation de plusieurs cas (entre 9 et 10) d'abus sexuels commis sur des séminaristes, entre 2014 et 2015, et dénoncés par trois prêtres du diocèse.

La manière dont le prélat qui fait actuellement l'objet d'une enquête du Saint-Siège a réagi et démissionné révèle que «le problème de santé» était en fait une tentative d'occulter et de détourner l'attention des abus sexuels aujourd'hui dénoncés.

Même le nouveau directeur du Bureau de presse du Saint-Siège, Alessandro Gisotti, a totalement démenti les affirmations officielles de Zanchetta, déclarant le 4 janvier que l'évêque argentin avait renoncé en raison de «ses difficultés à diriger le clergé diocésain et ses relations tendues avec les prêtres», - façon de dire que les problèmes que l'évêque d'Oràn avait connus étaient dus à son "autoritarisme" [cf. fr.zenit.org].

Ce qui est frappant dans cette déclaration, c'est qu'elle fait connaître les raisons de la renonciation de Zanchetta qui n'ont jamais été officiellement mentionnées. Cela signifie que le Vatican et son "chef suprême" connaissaient les problèmes "sacerdotaux" de l'évêque aujourd'hui dénoncé, et que non seulement, il [le Pape] n'a pas empêché de le couvrir, mais qu'il lui a confié des responsabilités encore plus grandes et encore plus délicates. Et dans ce cas, on ne peut certainement pas dire que le pape Bergoglio n'avait pas d'informations de première main, ni qu'il n'était pas au courant de ces évènements.

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