Le célibat des prêtres au Synode sur l'Amazonie

Très inquiétantes perspectives. Suivant sa technique habituelle désormais consolidée, le Pape, aidé de ses affidés, en particulier le card. Hummes, va "entamer le processus" qui doit conduire à l'abolition du célibat sacerdotal. Article de Giuseppe Nardi (25/3/2019, mise à jour le 26)

Le cardinal Hummes

Le cardinal Hummes : « Le synode sur l’Amazonie prendra une décision sur les prêtres mariés »

Le sacerdoce en Amazonie


23 mars 2019
Giuseppe Nardi
katholisches.info
Traduit de l'allemand par Isabelle

* * *

Le cardinal Claudio Hummes, le plus élevé en rang des ecclésiastiques engagés dans la préparation du synode le confirme : le Synode sur l’Amazonie traitera de l’ordination d’hommes mariés. Prendra-t-il aussi une décision sur ce sujet ?

Le cardinal Claudio Hummes, franciscain, fut d’abord évêque de Santo André, puis archevêque de Fortaleza avant de devenir archevêque de Sao Paulo. Après 31 ans passés à la tête de différents diocèses, il fut, en 2006, appelé à Rome, à la surprise générale, pour y devenir Préfet de la Congrégation pour le Clergé. Avant son départ déjà, il y allait de son petit couplet en faveur de l’abolition du célibat sacerdotal et de l’admission d’hommes mariés au sacerdoce. Si, sous la pression du Saint-Siège, il rétracta publiquement ces déclarations, il ne changea manifestement pas d’avis. À peine Benoît XVI s’était-il retiré, à la plus grande joie du Brésilien aux racines allemandes, que Hummes revint à son projet. Il fait partie des électeurs de François à qui, dit-on, il aurait conseillé son nom de pape.

Hummes verrait aussi très bien les femmes en « prêtresses ». Avec l’évêque missionnaire, depuis lors émérite, l’autrichien Erwin Kraütler, de la congrégation des Missionnaires du précieux Sang, il fut – ouvertement à partir de 2014 – la figure de proue de l’imminent Synode sur l’Amazonie. Le Synode comme tel ne fut annoncé par le pape François qu’à l’automne 2017. Jusque-là, les préparatifs se déroulaient sous le couvert de ce qui s’appelait l’« Atelier-Amazonie » (voir à ce sujet l’article de Katholisches.info de novembre 2014).

La question centrale, emballée et camouflée par des préoccupations indigénistes et écologistes jusqu’à en être méconnaissable, est une attaque contre le sacrement de l’ordre. Le concept des viri probati, des diacres ordonnés introduits sans aucune nécessité par le Concile Vatican II, serait étendu à l’état sacerdotal. C’était là, à l’époque déjà, le véritable objectif des modernistes. Les ordres mineurs furent amputés et le diaconat transformé. Il s’agissait là seulement d’un « compromis », car les résistances contre une abolition effective du célibat sacerdotal, à tout le moins pour le clergé séculier, étaient trop grandes. Avec l’élection de Jean-Paul II, puis de Benoît XVI, ce n’était plus à l’ordre du jour. C’est ce qui explique qu’à l’heure actuelle les principaux promoteurs de la suppression du célibat aient déjà 80 ans et plus.

La plus grande pression contre le célibat vient de l’Eglise des pays de langue allemande. C’est l’agenda « allemand » qu’on cherche à concrétiser, non pas directement, mais en faisant le grand détour par la lointaine et exotique Amazonie.
Lorsque, à la fin 2015, on fut informé pour la première fois de l’intention d’introduire un Synode sur l’Amazonie qui viserait au relâchement de la discipline du célibat ecclésiastique, cela fut contredit avec mépris. Depuis lors, les choses sont claires. La question est discutée de plus en plus ouvertement et cela signifie au premier chef que les adversaires du célibat se sentent sûrs d’eux.
Dans une interview publiée hier dans le journal brésilien O Estado de Sao Paulo, le cardinal Claudio Hummes a confirmé sans détours que le Synode sur l’Amazonie que François a convoqué pour l’été prochain parlera de l’ordination de prêtres mariés.
Le journal en question titrait : « Le Synode tentera l’expérience de prêtres mariés pour l’Amazonie ».
Le journal s’est entretenu avec le cardinal Hummes, en sa qualité de président du Red Eclesial Panamazonica (REPAM). Ce réseau fut fondé au sein de l’Eglise fin 2014, spécialement pour la préparation du Synode. Le cardinal est président de l’ensemble du réseau, tandis que l’évêque Mgr Kraütler dirige la branche brésilienne du REPAM. Ils occupent ainsi les deux positions clés.

Voici les passages centraux de l’interview :

Question : Dans le domaine de l’évangélisation, vous avez toujours été préoccupé par le manque de prêtres en Amazonie. Est-il possible de faire un pas en avant pour obtenir plus de ministres ordonnés ?
Le cardinal Hummes : Le pape parle de nouveaux chemins. La discussion sur les ministères concerne justement ces nouveaux chemins. Actuellement, l’Eglise ne dispose pas de suffisamment de prêtres pour les communautés. On manque de prêtres. C’est le prêtre qui célèbre la messe, qui entend les confessions et donne l’onction des malades.

Question : Est-il possible que l’on autorise l’ordination d’hommes mariés, des chrétiens à la vertu éprouvée ?
Le cardinal Hummes : C’est le Synode qui dira oui ou non. Il sera cependant nécessaire, comme la préparation l’a montré, de discuter particulièrement de cette question des ministères dans l’Eglise de l’Amazonie. Cela ne signifie pas que cela vaille pour le monde entier, mais bien pour cette situation particulière d’extrême nécessité.

Question : La même chose vaut-elle aussi pour les femmes ? La possibilité d’introduire un sacerdoce féminin ou un diaconat féminin existe-t-elle ?
Le cardinal Hummes : C’est une perspective beaucoup plus lointaine.


Le cardinal Hummes indique-t-il, dans sa réponse à la deuxième question, que ce synode particulier aurait l’autorité de décider ?
En septembre 2018, le pape François a introduit, par la constitution apostolique Episcopalis Communio, de nouvelles règles pour les synodes épiscopaux. Ces règles sont censées renforcer la « synodalité » de l’Eglise. La nouveauté la plus importante se trouve à l’article 18 :

§ 1. (…) S’il est approuvé expressément par le Pontife Romain, le Document final [de l’Assemblée du Synode] participe du Magistère ordinaire du Successeur de Pierre.

§ 2. Dans le cas où le Pontife Romain aurait concédé à l’Assemblée du Synode un pouvoir délibératif, selon la norme du can. 343 du Code de droit canonique, le Document final participe du Magistère ordinaire du Successeur de Pierre après l’avoir ratifié ou promulgué.
Dans ce cas, le Document final est publié avec la signature du Pontife Romain et celle des Membres.


Lors du Synode sur la jeunesse qui s’est tenu au Vatican en octobre 2018, les nouvelles règles ne furent pas encore appliquées. Comme le pape François n’a sûrement pas promulgué à la légère la constitution Episcopalis Communio, elle pourrait entrer en application pour la première fois pour le Synode sur l’Amazonie. L’admission d’hommes mariés au sacerdoce pourrait être décidée à une majorité des deux tiers, par les évêques des diocèses du bassin amazonien, par les chefs de dicastères et par des membres du synode désignés par le pape, un nombre facilement maîtrisable. Des synodes nationaux ultérieurs peuvent ensuite étendre les dispositions à d’autres pays.
Les milieux qui s’en tiennent à l’hypothèse que François « n’ira pas aussi loin » que d’admettre à la prêtrise des viri probati, semblent prendre leurs désirs pour la réalité. La voie ouverte par Episcopalis Communio convient tout à fait à François et correspond à une manière d’institutionnaliser le chemin parcouru par lui en lien avec le synode sur la Famille et l’exhortation post-synodale Amoris Laetitia. François pourrait, en se référant aux nouvelles dispositions promulguées par lui, se déclarer lié à la décision, sans devoir se prononcer sur le fond de la question. Il pourrait même dire que ce n’est pas lui qui a introduit cette nouveauté. En septembre 2017, en Colombie, il a rappelé avec insistance que c’était « une fable » que de prétendre qu’il allait introduire des prêtres mariés, en ajoutant : « Est-ce bien clair !? »
Si l’on suit l’entourage pontifical, par exemple le cardinal Hummes, ce qui ressemble bel et bien à une fable, c’est plutôt l’affirmation que l’on ne veut pas de prêtres mariés.

Mise à jour (26/3): un courrier de lecteur


Je reçois à l'instant cet intéressant commentaire:


En lien avec votre traduction de l’article de Nardi, je me permets de vous renvoyer au document préparatoire du synode. Il faudrait bien sûr s’étendre sur le caractère a-chrétien de son contenu écolo-New Age où il n’est guère question que de “Terre Mère”, de migrations et d’empreinte carbone, sans parler de la sagesse innée de ces peuples amérindiens dont certains pratiquaient les sacrifices humains et l’anthropophagie rituelle à grande échelle... Hélas, Laudato si et les autres textes de ce désastreux pontificat nous ont habitués à cette approche doublement gnostique et lénifiante, où la réalité du péché et de ses conséquences a été évacuée au profit d’une vision irénique où tout se résoudrait par un meilleur sens du partage dans le respect de notre “Maison commune”. Un discours de propagande, du niveau scientifique d’un élève de troisième bien “formaté” par l’éducation nationale.
Mais j’attire surtout votre attention sur le paragraphe suivant, que je cite en entier, en soulignant les passages qui montrent qu’il n’est pas nécessaire d’être prophète pour savoir à quoi s’attendre depuis juin 2018 :

En ce sens, le Concile Vatican II nous rappelle que le Peuple de Dieu tout entier participe au sacerdoce du Christ, même s’il faut distinguer le sacerdoce commun et le sacerdoce ministériel (cf. LG 10). D’où l’urgence d’évaluer et de repenser les ministères nécessaires aujourd’hui pour répondre aux objectifs d’«une Église avec un visage amazonien et une Église avec un visage indigène» (Fr. PM). Une priorité est de préciser les contenus, les méthodes et les comportements en vue d’une pastorale inculturée, capable de répondre aux grands défis de ce territoire. Une autre est de proposer de nouveaux ministères et services pour les différents agents pastoraux qui correspondent aux tâches et aux responsabilités de la communauté. Dans cette ligne, il convient de discerner le type de ministère officiel qui peut être conféré aux femmes, en tenant compte du rôle central joué aujourd’hui par les femmes dans l’Église amazonienne. Il est également nécessaire de promouvoir le clergé autochtone et natif de ce territoire, en affirmant son identité culturelle propre et ses valeurs. Enfin, il faut repenser de nouveaux chemins pour que le Peuple de Dieu ait plus fréquemment un meilleur accès à l’Eucharistie, centre de la vie chrétienne (cf. DAp 251).


Comme vous le voyez, tout y est.

Laurent V.

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