Loué soit le Seigneur

Simple nostalgie d'un salut oublié... ou (beau) rêve d'Aldo Maria Valli? (3/2/2019, mise à jour le 4/2)

 


J'ignore si ce qu'il dit ici peut s'appliquer à nous Français, et je ne sais pas davantage si son souhait est réalisable, ou s'apparente simplement à un beau rêve. Mais l'idée me plaît (bien que ou parce que j'imagine le tollé dans certains milieux...)
N'oublions pas que, certes dans un registre moins "spirituel" les bavarois se saluent - comme les habitants du Bade Wurtemberg, autre land allemand à prédominance catholique, et les autrichiens - en disant non pas bonjour mais Gruss Gott (abréviation de «Es Grüsse dich Gott») qu'on peut traduire par Dieu vous bénisse - une référence claire aux racines catholiques - (je ne dis pas chrétiennes, car la formule est peu appréciée des protestants). Mais pour combien de temps encore? Je lis dans un article du Figaro datant de 2011 que la rumeur d'une interdiction du Grüss Goot, (pour ne pas heurter la sensibilité de nos frères musulmans!!) dans les écoles a déjà circulé. Apparemment il n'y a pas eu de suite... pour le moment. Gageons que si la question revenait sur le tapis, les premiers à la soutenir seraient les évêques eux-mêmes, les Reinhart Marx et autres Kasper.

Loué soit Jésus Christ! L'importance d'un salut oublié


Also Maria Valli
www.aldomariavalli.it
31 janvier 2019
Ma traductio

* * *

Je dis la vérité: pour moi, un prêtre doit toujours - et je souligne toujours - saluer en utilisant la formule “Sia lodato Gesù Cristo” ["Loué soit Jésus Christ", en français nous dirions plutôt - il me semble - "Loué soit le Seigneur"], et l'interlocuteur devrait obligatoirement répondre "Qu'il soit toujours loué". Je trouve que c'est un très beau salut qui, d'une manière simple et immédiate, chante les louanges de Jésus en lui donnant la première place sur tout. Je dis plus: pour moi, les laïcs catholiques devraient aussi se saluer de cette façon.

Et au contraire....

Au contraire, la formule est tombée dans les oubliettes, et les prêtres ne l'utilisent même plus dans les homélies. Eventuellement, ils commencent par un "bonjour" et concluent de façon anonyme. Et à la fin de la célébration? Le cas échéant, ils disent "bon dimanche" et "bonne semaine".

D'un autre côté, comment s'en étonner dès lors que le prêtre a été transformé en animateur de télévision muni d'un micro? Comment s'en étonner, dès lors qu'à la place du célébrant, nous avons désormais le prêtre amuseur? Comment s'en étonner dès lors qu'à la place du culte de Dieu, nous avons mis le culte de l'homme?

Je lis qu'à la question d'un lecteur sur le fait que les prêtres, avant et après l'homélie, ne saluent plus par "Loué soit Jésus Christ", un religieux lui a répondu: "Mais le missel ne prévoit plus ce salut. Il ne l'interdit pas, mais il ne le juge pas opportun parce qu'il est issu de la prédication en dehors de la messe. L'homélie fait partie de la messe; les fidèles ont déjà été salués au début.

Mais qu'est-ce que c'est que cette réponse? Outre le fait qu'il me semble que la formule n'était pas non plus prévue avant (mais je n'en suis pas sûr), nous parlons ici de "bonne éducation" liturgique et spirituelle. Nous sommes, pour ainsi dire, à l'abc de la relation avec notre Jésus. Ce n'est pas que la manière de saluer mon Jésus doive être déduite des codes! Et que signifie "les fidèles ont déjà été salués"? Si Jésus est à la première place, ne serait-il pas préférable de le saluer une fois de plus plutôt qu'une fois de moins? Alors, selon la même logique, lorsque la maman enseigne à son fils qu'il faut toujours dire "s'il te/vous plaît" et "merci", l'enfant pourrait répondre: "Mais je l'ai dit hier! Et de toute façon, ce n'est écrit dans aucune loi".

Comme c'était beau quand Jean-Paul II, de sa voix puissante, se présenta à la foule le soir du 16 octobre 1978 avec un "Loué soit Jésus Christ!". Il y avait déjà là le programme du pontificat.

Dire "bonjour" ou "bonsoir" ou utiliser d'autres formules mondaines au début et à la fin de l'homélie contribue à éliminer toute distinction entre l'espace et le temps du sacré, réservés à Dieu, et l'espace et le temps profanes. C'est un moyen efficace d'homogénéiser et de mélanger tout, mais de cette façon l'Église ne se rapproche pas des hommes. De cette façon, nous nous éloignons simplement de Dieu et ne respectons plus le sacré.

Si cela ne tenait qu'à moi, j'utiliserais même la formule latine "Laudetur Jesus Christus". À quoi il faudrait répondre "Nunc et semper !".

Aujourd'hui, nous avons des enfants du primaire qui appellent le curé de la paroisse "don". Et quand ils lui disent bonjour, ils lui disent "bonjour, don". Pauvres enfants. Piégés par le démocratisme. Rendus incapable de reconnaître et donc de respecter l'autorité. Personne ne leur dira jamais que le prêtre est alter Christus.

Maintenant, on va me traiter de traditionaliste, mais cela m'est égal.

La forme est substance et celui qui dit le contraire est un tricheur.

Ceux qui ne disent plus "Loué soit Jésus-Christ" et qui permettent qu'on s'adresse au prêtre en lui disant "bonjour don" sont les mêmes qui disent qu'il n'est pas important de s'agenouiller ou de garder les mains jointes, car "l'important est ce que nous avons dans notre cœur" et tout le reste est hypocrisie. Mais l'homme n'est pas seulement esprit. L'homme est esprit et corps, et l'attitude du corps influence, et comment, ce que nous avons dans notre cœur.

Dans les "lettres de Berlicche" (1), Clives Staples Lewis est très clair à ce sujet. Le diable expérimenté Berlicche conseille au jeune apprenti démon Malacoda, son neveu, de faire tout son possible pour "spiritualiser" la foi de la personne qui a été confiée aux "soins" de Malacoda. Apprends-lui à ne pas fléchir les genoux, recommande Berlicche, et tu verras que tu l'auras très vite en main. Convainc les chrétiens "que la position du corps n'a aucune influence sur leurs prières"! Fais en sorte, ajoute Berlicche, qu'ils oublient "ce que tu dois contamment leur rappeler", à savoir "qu'ils sont des animaux et que tout ce que fait leur corps a une incidence sur leur âme"!

Je pense qu'aujourd'hui, Berlicche peut être satisfait. En fait, il dit: "L'un de nos grands alliés, à présent, c'est l'Église elle-même".

Comment lui donner tort?
Loué soit Jésus Christ !

NDT


(1) En anglais "The Screwtape Letters" (1942), traduit en français sous le titre "Tactique du diable" (ed. Empreinte temps présent, 2010) Nous en avons parlé à plusieurs reprises dans ces pages. Berlicche (nom donné au maître-démon dans la traduction en italien) est en fait Screwtape, et Malacoda est Wormwood. Le passage cité par AM Valli se trouve à la p. 27 de l'édition mentionnée plus haut.

Mise à jour (4/2/2019)


Un lecteur m'écrit:

Les salutations chrétiennes qui sont indulgenciées sont les suivantes :
a) Loué soit Jésus-Christ. (L'autre personne répond) Dans tous les siècles, ou ainsi soit-il.
abis) (ancienne formulation du 18ème siècle) Loué soit Jésus-Christ. (L'autre personne répond) A jamais. Ainsi soit-il.
b) Loués soient Jésus et Marie. (L'autre personne répond) Aujourd'hui et toujours.
c) Vive le Sacré Cœur de Jésus. (L'autre personne répond) Vive le Cœur Immaculé de Marie.

Donc en français, on dirait la même chose que les italiens pour la première partie. Malheureusement, même chez les catholiques pratiquants, (et même ceux dits traditionnels), cela ne se fait plus. Tout se perd.

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