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Les minarets de John Allen

Intéressant point de vue américain sur le récent vote suisse. Comment Jean-Paul II avait réagi en 1995 à l'inauguration d'une grande Mosquée à Rome. Eléments statistiques et projections démographiques sur la présence musulmane en Europe... et en France (2/12/2009)


Quand il ne parle pas directement de Benoît XVI, John Allen sait être fort intéressant.
Le titre en anglais de son dernier billet - sans ponctuation - est: Papal example a rebuff to Swiss vote on minarets, que j'ai traduit (?) par: "L'exemple papal, une rebuffade envers le vote suisse sur les minarets"
Mais le titre est trompeur, car le Pape dont il est question est Jean-Paul II. Et je ne suis pas sûre d'avoir bien compris, à la lecture de l'article, en quoi il s'agissait d'une rebuffade...

Comme d'habitude très bien documenté, l'article rappelle les propos de Jean-Paul II lors de la catéchèse du 21 juin 1995, alors qu'il saluait l'inauguration de la grande Mosquée de Rome.... non sans réclamer avec insistance la "réciprocité" (il n'a pas été entendu!).
De toutes façons, la situation de 2009 n'est déjà plus celle de 1995.
Le plus intéressant vient après: il est réjouissant d'apprendre, ou plutôt de voir confirmé par un américain - et de surcroît, libéral! - le poids de l'immigration musulmane en Europe, et particulièrement en France! Nos medias sont beaucoup plus discrets.
Pour le reste, les analyses politiques ne peuvent pas surprendre, et les projections démographiques et les perspectives pour le futur... il se peut que nous ne soyons plus là pour les voir validées, ou que nous ayions oublié d'ici là les prévisions de Jonn Allen.
Article original en anglais sur le site de NCR.

John Allen, 30/11/2009

Dans un résultat-surprise, le peuple suisse a approuvé hier une interdiction constitutionnelle à la construction de minarets, les hautes tours sur les mosquées islamiques d'où l'appel à la prière est lancé cinq fois par jour. L'initiative a été approuvée par 57,5% contre 42,5%, sur quelques 2,67 millions d'électeurs. Seulement quatre des 26 cantons, se sont opposés, accordant ainsi la double approbation qui fait partie de la Constitution suisse (càd l'approbation par référendum, et par les parlements, ndt).

L'interdiction avait été proposée par les forces politiques d'extrême droite, et avait été dénoncée dans la période qui a précédé le vote à la fois par le gouvernement et par un large échantillon de dirigeants religieux - y compris la conférence des évêques catholiques de Suisse, qui avait émis un avertissement mettant en garde contre "la peur qui est mauvaise conseillère."

La mesure est considérée comme l'expression la plus claire à ce jour d'un sentiment anti-islamique croissant en Europe, alimentée par la hausse des niveaux d'immigration. Bien que les chiffres varient, certains analystes prédisent que l'ensemble de la population musulmane va atteindre 15% du total européen.

Dans le contexte du résultat d'hier, il pourrait être intéressant de faire un bref voyage en arrière dans le temps, jusqu'au 21 Juin, 1995 - le jour où la plus grande mosquée d'Europe a ouvert à Rome, complète, avec un dôme de 66 pieds (20 mètres) et un minaret. Le Vatican avait effectivement soutenu la construction de la mosquée contre l'opposition d'extrême-droite en Italie, et d'une certaine façon, sa réponse reste un paradigme pour les questions soulevées par le vote suisse.

Les musulmans italiens ont pour la première fois lancé l'idée de construire une mosquée dans les années 1930, mais ils ont été éconduitss par Mussolini, à moins qu'une église catholique ne puisse simultanément être construite à La Mecque. Ils ont demandé à nouveau en 1973, alors que le gouvernement italien était dirigé par l'ultra-catholique Giulio Andreotti, qui a discrètement consulté le pape Paul VI. La réponse a été que le Concile Vatican II (1962-65) avait entériné la liberté de religion, de sorte que l'Eglise n'aurait aucun motif pour s'opposer à la demande musulmane.

Le gouvernement saoudien a largement financé la construction de la mosquée, qui a été achevée plus de vingt ans après. Elle a été inaugurée le 21 Juin, 1995, et le pape Jean-Paul II a envoyé un message à la fois de félicitations et de défi lors de son audience générale ce jour-là. (L'événement est tombé un mercredi.)
Le Pape a salué l'ouverture de la mosquée, mais a également insisté sur ce qui a par la suite été connu sous le nom de "réciprocité" - que les chrétiens et autres minorités religieuses dans les pays islamiques puissent avoir les mêmes libertés dont les musulmans jouissent désormais en Occident.

Ce qui suit est le texte intégral de ce que Jean-Paul avait dit ce jour-là:

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«Aujourd'hui, une grande mosquée est inaugurée à Rome. Cet évènement constitue un signe éloquent de la liberté religieuse reconnue pour chaque croyant. Il est significatif que, ici à Rome, le centre de la chrétienté et le siège du Successeur de Pierre, les musulmans ont leur propre lieu de culte dans le plein respect de leur liberté de conscience ».

«Dans un moment important comme celui-ci, malheureusement, il faut également souligner que, dans certains pays islamiques, les mêmes signes de reconnaissance de la liberté religieuse font défaut. Combien le monde, au seuil du troisième millénaire, attend de tels signes!

"La liberté religieuse fait aujourd'hui partie de nombreux documents internationaux, et représente l'un des piliers de la civilisation contemporaine. Heureux que les musulmans puissent désormais s'unir dans la prière dans la nouvelle mosquée de Rome, je voudrais également exprimer le vif désir que le droit d'exprimer leur propre foi sera reconnue pour les chrétiens et tous les croyants dans tous les coins du monde. À cette fin, je prie le Seigneur, et j'invoque l'intercession de Marie, sa mère toujours vierge, qui est également honorée par les fidèles de l'Islam ».
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La controverse du minaret en Suisse semble susceptible de devenir un nouveau point de friction dans les relations entre l'Occident et l'Islam, l'une des dix tendances que j'ai présentés dans mon livre The Future Church.
Dans son récent ouvrage, The Difference God Makes, le cardinal Francis George de Chicago écrit: «Parmi les dialogues [impliquant les religions], celui entre chrétiens et musulmans promet d'être le plus important pour l'avenir de la race humaine."

L'Europe est à maints égards la nouvelle ligne de front de cette relation.
Voici quelques informations sur l'Islam en Europe selon The Future Church:

"L'augmentation de l'immigration musulmane en Europe a fait naître dans le monde catholique une alarme particulière, soulevant dans certains milieux la crainte d'un renversement démographique de la bataille de Lépante en 1571, qui avait sauvé la chrétienté de la menace ottomane.
Dans son livre Le Cube et la Cathédrale, George Weigel imagine un futur dans lequel le meuezzin appelle les musulmans à la prière depuis la Basilique Saint-Pierre, et la cathédrale de Notre-Dame de Paris a été transformé en "Hagia Sophia on the Seine" - une église chrétienne devenue un grand musée islamique. Weigel exagère pour "enfoncer le clou" , mais son image saisit néanmoins les craintes réelles de certaines personnes.

"Etant donné les difficultés auxquelles le christianisme institutionnel est confronté en Europe, combinées avec les dangers très réels du radicalisme islamique - les émeutes de Paris (!), les attentats de Londres, l'assassinat de Theo van Gogh en Hollande - il est trop facile de justifier la panique.
Certains dirigeants chrétiens, toutefois, sont plus optimistes quant à la façon dont les choses pourraient évoluer dans le long terme.
En réalité, affirment-ils, l'Europe n'est plus chrétienne depuis un certain temps, et donc, protéger l'identité chrétienne du continent pourrait être un anachronisme. Dans ce contexte, ils estiment que l'arrivée d'une marée de nouveaux Européens qui partagent avec les chrétiens certaines valeurs spirituelles et morales fondamentales pourraient s'avérer être une aubaine, si un nombre croissant de musulmans accédaient à la classe moyenne et faisaient la paix avec le pluralisme. "

"Personne ne sait exactement combien de musulmans il y a aujourd'hui en Europe, en partie parce que certains sont sans papiers, et en partie parce que certains recensements européens ne renseignent pas sur l'orientation religieuse.
En s'appuyant sur diverses sources, le US National Intelligence Council estime que la population musulmane en l'Union européenne est passée de 5 millions en 1985 à 15 millions en 2005, soit une croissance de 200%. La plus grande communauté musulmane dans la zone de l'UE est en France, avec cinq millions de musulmans, soit 8,3% d'une population de 60,4 millions d'habitants. L'Allemagne est en deuxième place avec 3,5 millions de musulmans, soit 4,3% de sa population, et le Royaume-Uni compte 1,6 millions de musulmans, soit 2,7% de sa population. "

"Pour 2025, le National Intelligence Council projette dans l'UE une population musulmane de 28 millions; en 2050, il en prévoit 40 millions, ce qui représenterait 15% d'une population d'environ 500 millions d'Européens. (Cette estimation n'inclut pas la possibilité de l'admission de la Turquie dans l'UE). Dans certains pays, la proportion de musulmans pourrait être plus élevée. A la mi-siècle, les musulmans pourraient être de 25% de la population en France et en Allemagne. "

"Dans l'ensemble de l'Europe, cependant, certains experts estiment que le total des musulmans se stabilisera aux alentours de 15%. Philip Jenkins affirme que le meilleur parallèle pourrait être celui de la population catholique des Etats-Unis, qui est passé à 25% à la fin du 19ème et au début 20ème siècle, et est ensuite restée stable. Entre autres choses, la baisse des taux de fécondité au Moyen-Orient et en Afrique du Nord indiquent que les niveaux actuels d'immigration pourraient ne pas continuer. "

«En dehors de la crainte de la violence djihadiste, l'inquiètude actuelle des catholiques autour de l'immigration musulmane en Europe est également liée à la politique.
Jusqu'à présent, le gonflement des populations musulmanes a bénéficié à la gauche laïque dans la plupart des pays, sur la base du soutien au multiculturalisme, des systèmes de protection sociale renforcés, et les Palestiniens. Pourtant, il y a aussi un chœur croissant venant de la gauche européenne, aujourd'hui critique des accomodements envers les musulmans, insistant sur le fait que les valeurs laïques des Lumières doivent être défendues contre ceux qu'ils considèrent comme des extrémistes religieux. En 2006, douze intellectuels de gauche européens (?) ont émis un manifeste qui suggère que la vraie ligne de fracture se situe entre «théocrates et démocrates," une taxonomie qui semble mélanger les musulmans et les chrétiens pratiquants.
De nombreux analystes estiment que le foyer naturel d'une classe moyenne musulmane en Europe sera en fin de compte le centre-droit qui défend la moralité traditionnelle et un rôle fort pour la religion dans la vie publique. Dans une certaine mesure, cet avenir est désormais en Allemagne, où, aussi ironique que cela puisse paraître, un nombre restreint mais croissant de musulmans deviennent chrétiens-démocrates. "

"Les Philippines, où le parti actuellement au pouvoir est connu comme "Christian Muslim Democrats" - fusion de partis de centre-droit d'inspiration à la fois chrétienne et musulmane - témoignent qu'il ne s'agit pas d'une simple fiction. En 1996, un accord de paix historique, accordant une large autonomie à la région à majorité musulmane de Mindanao a poussé de nombreux musulmans des Philippines à rejeter l'insurrection armée, acceptant l'insertion pacifique dans le système politique. Certains experts considèrent l'expérience comme une preuve que l'antagonisme pourrait être converti en partenariat dans de bonnes conditions. "

L'Europe des minarets Le délit d'homophobie en Italie