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L'exégète du pape (II)

Antonio Socci commente à son tour les propos présumés du Pape à Scalfari.

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L'exégète du pape

A présent, le Vatican doit démentir Scalfari

www.antoniosocci.com
18 Mars 2015
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Il a recommencé. Il est clair qu'Eugenio Scalfari a une curiosité spéciale (peut-être même une certaine inquiètude) pour notre destin éternel.
Le dimanche 15 Mars, dans son éditorial de la Repubblica, le «fondateur» a de nouveau attribué à François, dont il est l'ami, le confident et l'intervieweur, des thèses embarrassantes et rien moins qu'explosives.
Scalfari écrit:

«Quiconque a eu le don de connaître le Pape François sait que l'égoïsme est l'ennemi le plus dangereux de notre espèce. (...) Si l'égoïsme devient excessif et étouffe l'amour pour les autres, il obscurcit l'étincelle divine qui est en lui, et s'auto-condamne. Qu'advient-il à cette âmeéteinte? Sera-t-elle punie? Et comment? La réponse de François est nette et claire: il n'y a pas de punition, mais l'annulation de cette âme. Toutes les autres participent à la béatitude de vivre dans la présence du Père. Les âmes annulées ne prennent pas part à ce banquet, avec la mort du corps, leur parcours prend fin...»

Il avait déjà écrit la même chose dans un autre éditorial publié sur la Repubblica le 21 septembre 2014:

«Le pape estime que, si l'âme d'une personne se referme sur elle-même et cesse de s'intéresser aux autres, cette âme ne libère plus aucune force et meurt. Elle meurt avant que meure le corps, comme âme, elle cesse d'exister. La doctrine traditionnelle enseignait que l'âme est immortelle. Si elle meurt dans le péché, elle en rendra compte après la mort du corps. Mais pour François, il n'en est évidemment pas ainsi. Il n'y a pas d'enfer, ni de purgatoire».

Cette théorie ne nie pas seulement un pilier fondamental de la foi catholique, l'immortalité de l'âme (de toutes les âmes), mais nie aussi une autre pierre angulaire de cette même foi, c'est-à-dire la possibilité concrète de la punition éternelle de l'enfer dont Jésus lui-même parle plusieurs fois et très clairement dans l'Evangile («Alors il dira aussi à ceux qui seront à sa gauche: "Allez-vous-en loin de moi, les maudits, au feu éternel, qui a été préparé pour le diable et pour ses anges"» Mt 25,40; «il y aura des pleurs et des grincements de dents» Mt 8, 12).

Pratiquement, Scalfari a à nouveau attribuer au pape une thèse qui nie au moins deux dogmes, chose gravissime qui - si elle avait vraiment été formulée par Bergoglio - aurait des conséquences énormes.
Puisque le fondateur de la Repubblica n'est pas un quidam lambda (ndt: "Pinco Pallino"), puisqu'il prétend être un ami et confident du pape Bergoglio et qu'il a été maintes fois crédité comme tel par lui, ayant été reçu pour de longues conversations, publiés comme interviews, il serait juste que le Vatican, sous une forme, ou une autre, réfute les hérésies qui sont attribuées au pape.
En effet, je ne veux pas croire que Bergoglio pense cela. Mais ce serait l'occasion de le dire clairement, démentant Scalfari.
Parce qu'un journaliste aussi important et reconnu par le pape qui écrit en lui attribuant de façon répétée des thèses hétérodoxes, crée scandale parmi les fidèles et devrait avoir un démenti clair et définitif.
Dans le cas contraire,il restera au moins le doute qu'au Vatican, on veuille utiliser délibérément une double registre (*), laissant imprudemment circuler hors de l'Eglise certaines doctrines et idées attribuées au pape.

Mais j'espère que personne ne veut être compté parmi ceux qui scandalisent les simples, considèrant les paroles que Jésus prononce à leur sujet (Mt 18:1-14) (**)

Notes de traduction

(*) Le "double registre" en question est l'objet du dernier billet de Sandro Magister, intitulé LA DOUBLE DÉMARCHE DU PAPE ARGENTIN (cf. chiesa.espresso.repubblica.it).
La vaticaniste a répertorié les multiple interventions du Pape, depuis le Synode d'octobre 2014, toutes parfaitement conformes au Magistère, sur les thèmes de la vie et de la famille.
Mais il tempère:

La nouveauté de ce pontificat est que, parallèlement à ces réaffirmations de la doctrine de toujours, le pape donne libre cours à des doctrines et à des pratiques pastorales d’orientation différente et parfois opposée.
Une autre nouveauté, qui n’est pas moins importante, est que cette discordance provient de l’intérieur même de la hiérarchie catholique et même parfois d’autres déclarations de ce même pape qui sont prises comme emblème du changement, à commencer par le "Qui suis-je pour juger ?" qui est désormais devenu universellement la marque de fabrique de ce pontificat.

(**) François a commenté à sa manière ce passage de l'évangile correspondant dans l'homélie à Sainte Marthe du 10 novembre 2014:

Personnellement je suis frappé de la façon dont Jésus finit son discours : après avoir parlé du scandale, il dit en effet : "Malheur à celui qui scandalise l’un de ces petits, le peuple de Dieu ; les faibles dans la foi, les enfants, les jeunes, les personnes âgées qui ont vécu toute une vie de foi, malheur à qui les scandalise ! Mieux vaut mourir".
En parlant d’une manière aussi forte Jésus s’adresse aussi à nous chrétiens. Et en conséquence, nous devons nous poser la question : est-ce que je scandalise? Et avant encore : Qu’est-ce que le scandale? A ce propos, le Pape a expliqué que le scandale « est dire et professer un style de vie – "je suis chrétien" – et ensuite vivre comme un païen qui ne croit à rien. Et cela fait scandale, car le témoignage manque : la foi confessée est vie vécue».
(www.osservatoreromano.va/fr/news/des-chretiens-scandaleux )

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