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Des viri probati ordonnés prêtres

A petits pas, François est en train de changer profondément l'Eglise. La prochaine étape serait l'ordination d'hommes mariés. Pour le moment en Amazonie (3/1/2016)

>>> Ci-contre: la fable de la grenouille boullie (benoit-et-moi.fr/ete2010, note de bas de page)

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Prochaine étape: des prêtres mariés


Guido Villa
3 janvier 2017
www.lanuovabq.it
Ma traduction

* * *

Compte tenu du rôle que le portail Vatican Insider joue comme interprète et porte-parole des humeurs et des intentions qui animent les Sacri Palazzi, l'article «Amazonie, là où les prêtres sont un luxe», publié le 21 décembre sous la signature de Rafael Marcoccia, dans lequel est révélé un prochain grand projet à venir, ne peut passer inaperçu: l'ordination sacerdotale en Amazonie de "viri probati", y compris mariés. La conséquence d'une telle initiative serait, tôt ou tard, l'abolition de l'obligation du célibat des prêtres dans l'Eglise catholique de rite latin.

Comme c'est toujours le cas quand on veut introduire des nouveautés éclatantes, cela se passe progressivement: c'est la fable de la "grenouille bouillie", qui réagirait si elle était immédiatement jetée dans l'eau bouillante, et qu'on essaie donc de faire bouillir à feu doux, pour qu'elle ne remarque rien.

Dans le cas actuel, la nouveauté est introduite dans des zones limitées, cherchant la «situation limite» qui en justifie apparemment la mise en œuvre sans trop de protestations: pour l'ordination des "viri probati", la zone d'expérimentation choisie est le Brésil, plus précisément la région amazonienne, très vaste du point de vue territorial et avec peu de prêtres actifs.

L'article de Rafael Marcoccia souligne la nécessité de «solutions courageuses et concrètes» que l'Eglise amazonienne attend, à savoir que «François puisse annoncer bientôt des initiatives pour faciliter le travail d'évangélisation et de la célébration plus fréquente de la messe dans une immense zone et avec une grave pénurie de prêtres». L'idée centrale est de créer un clergé autochtone et indigène qui puisse prendre soin des communautés les plus isolées. Un tel clergé devrait être «réellement impliqué dans la culture, l'histoire, les problèmes, les rêves et les projets du peuple amazonien, y compris, de façon spéciale, l'univers des peuples autochtones, qui sont les peuples originels de la région».

Le motif pour lequel on insiste sur le fait qu'il doit s'agir de clergé autochtone, témoin vivant de la culture locale, est exprimé en termes non équivoques: «Pourraient aussi être choisis des hommes mariés connus pour guider leur famille avec sagesse. "Ce serait important parce que la culture indigène ne comprend pas le célibat", affirme l'évêque de São Gabriel da Cachoeira». Le célibat n'est pas compris par les peuples amazoniens, il doit donc être éliminé.

En paroles, la doctrine ne changerait donc pas, seule changerait l'application pastorale de celle-ci - un concept déjà exprimé lors du débat sur les sacrements aux divorcés remariés - et surtout elle doit être appliquée au cas par cas, autrement dit elle doit respecter les cultures locales et s'y soumettre .

Mais une doctrine qui se plie aux us et coutumes des différents peuples auxquels elle est annoncée, n'est plus la doctrine catholique, c'est-à-dire universelle. À cet égard, le Ciel a parlé, justement en Amérique latine, montrant l'extranéité radicale de ces déclarations avec la foi catholique, quand la Bienheureuse Vierge Marie, vénérée aujourd'hui comme Notre-Dame de Guadalupe - la Morenita -, imprima son image sur le manteau de san Juan Diego au Mexique en 1531, se montrant avec ses cheveux dénoués, un signe qui dans la culture aztèque indique la virginité.

Ce faisant, la Sainte Vierge présentait non seulement sa nature éternellement vierge, mais aussi la valeur de la virginité perpétuelle pour le Royaume des Cieux, quelque chose de totalement inconnu aux peuples autochtones. La Sainte Vierge répétait donc la doctrine éternelle de l'Eglise, en ne la diluant pas dans les coutumes locales, mais simplement, en utilisant un langage compréhensible pour les fidèles de l'endroit.

Un aspect essentiel de la question de l'ordination prévue de "viri probat" est que cette expérience, bien que pour le moment limitée à la région amazonienne, serait bientôt réclamée par d'autres. Quelle différence y a-t-il, par exemple, entre les difficultés causées par le manque de prêtres en Amazonie, et celles qui existent déjà en Allemagne, en Belgique ou en France? L'exception deviendrait immédiatement la règle, et la conséquence inévitable de l'émergence un peu partout de clergé marié représenté par les viri probati ordonnés prêtres, conduirait immédiatement les autres prêtres à réclamer également pour eux-mêmes la possibilité d'abandonner le célibat.

La même chose arrive avec l'accès aux sacrements des divorcés remariés: du 'cas par cas', on passera tout de suite à une règle générale permettant à chacun d'eux d'accéder aux sacrements, tout en continuant à vivre dans un état matrimonial irrégulier. Ainsi, le cardinal Kasper, au sujet de l'"intercommunion", demande qu'elle ne soit autorisée que dans les cas de couples mixtes catholiques-protestants (cf. http:// www.avvenire.it), puis, du cas exceptionnel, on passerait très vite à une règle générale qui l'autorise pour tous les fidèles catholiques et protestants.

La nouvelle de l'ordination possible de "viri probati" au Brésil n'est pas nouvelle: fin 2014, le vaticaniste Marco Tosatti a révélé l'existence d'une lettre de François au cardinal Hummes, brésilien, ancien préfet de la Congrégation pour le Clergé, qui traitait précisément de la possibilité d'ordination de "viri probati" pour le diocèse d' Amazonie (article traduit ici: benoit-et-moi.fr/2014-II). Le porte-parole du Vatican répondit avec ce qui sembla à beaucoup une excusatio non petita: le Père Lombardi nia l'existence d'une lettre du pape sur le célibat des prêtres, chose que Tosatti n'avait pas écrite, se limitant à mentionner l'ordination de "viri probati" (cf. www.lastampa.it).

La question est donc extrêmement grave. Ces jours-ci, l'ancien moine franciscain brésilien Leonardo Boff demande également un clergé marié pour compenser le manque de prêtres (cf. benoit-et-moi.fr/2016/actualite/une-interview-de-leonardo-boff. De plus, tandis que Vatican Insider avance "avec des semelles de plomb" car il s'adresse au public italien, en Allemagne , le portail officiel de la Conférence épiscopale, katholisch.de rapporte les propos de Boff avec une satisfaction non dissimulée, comme si c'était une initiative dont les évêques allemands attendaient avec impatience les développements pour pouvoir l'appliquer également en Allemagne.