Le rapport de Mgr Figueiredo

L'ex secrétaire de McCarrick explique dans l'introduction les raisons qui l'ont conduit à divulguer les documents en lien avec son ancien boss qui sont en sa possession (29/5/2019)

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Le Pape ment

 

"Suivez le chemin de la vérité où qu'il mène"

L'ex-cardinal Theodore E. McCarrick m'a ordonné prêtre il y a exactement vingt-cinq ans aujourd'hui. J'ai servi comme secrétaire personnel dans l'archidiocèse de Newark (septembre 1994 - juin 1995) et j'ai aussi aidé McCarrick durant ses nombreuses visites à Rome au cours de mes 19 années de ministère. Après une longue réflexion, j'ai pris la décision de rendre publics une partie de la correspondance et d'autres renseignements sur McCarrick que je possède et qui découlent de mes nombreuses années de service à McCarrick. Avant de révéler ce qui est en ma possession, j'ai consacré du temps à la prière et au discernement. Ma décision fait suite à mes tentatives, commencées en septembre 2018, de partager et de discuter ces documents avec le Saint-Siège et d'autres responsables de l'Eglise.

Comprenant pleinement que le débat sur McCarrick est devenu hautement politisé, je désire seulement présenter les faits qui aideront l'Église à connaître la vérité. Dès le début de ce rapport, je promets affection constante, loyauté et soutien au Pape François et à son Magistère dans son inlassable ministère comme successeur de Pierre [*], comme je l'ai assuré au Pape Benoît XVI, reconnaissant pour leur sollicitude paternelle et leurs efforts dans la lutte contre le fléau des abus. En fait, ma décision de rendre le rapport public en ce moment est encouragée par le motu proprio du Saint-Père Vos Estis Lux Mundi ("Vous êtes la lumière du monde. Une ville située sur une montagne ne peut être cachée", Mt 5,14) [motu proprio de François, promulgué le 9 mai 2019, qui établit de nouvelles règles de procédure pour lutter contre les abus sexuels], sur la base du principe fondamental qu'il est impératif de rendre publiques, au bon moment et avec prudence, des informations qui ne sont pas encore venues à la lumière et qui concernent directement les accusations d'activité criminelle, les restrictions imposées à mon ex-archevêque, et qui sait encore quoi et quand.

J'espère sincèrement que ces informations aideront l'Église alors qu'elle essaie de créer une culture de la transparence. Ce rapport, qui est peut-être le premier d'une série, est une contribution au désir du Pape François et du Saint-Siège «de suivre la voie de la vérité où qu'elle mène»... et a pour but d'aider les évêques des États-Unis dans leur promesse faite en août dernier de «répondre aux nombreuses questions sur la conduite de l'archevêque McCarrick car nous sommes déterminés à trouver la vérité dans cette affaire» (Déclaration du Cardinal Daniel DiNardo, Président de la Conférence des évêques américains, 1er août 2018). Ce que l'archevêque Wilton Gregory a exprimé pour son Église locale, après sa nomination à l'archidiocèse de Washington, je veux le faire pour l'Église universelle.

Dans les sections suivantes, je présente la correspondance, avec les faits que je considère opportuns relativement aux questions qui entourent encore McCarrick. Ces faits montrent clairement que des prélats de haut rang étaient probablement au courant des actions de McCarrick et des restrictions qui lui ont été imposées sous le pontificat de Benoît XVI. Ils montrent aussi clairement qu'avant même le pontificat de François ces restrictions n'étaient pas appliquées. Ce n'est pas à moi de juger jusqu'à quel point c'est la faute de l'absence de sanctions canoniques plutôt que de simples restrictions (...) Mon intention en publiant le rapport est de présenter les faits - et non un jugement ou une condamnation - pour la protection des mineurs et des personnes vulnérables, le salut des âmes et le bien de l'Église universelle. En tant que prêtre ordonné par l'archevêque McCarrick et qui l'a servi de près, je réfléchis souvent aux dommages que l'on aurait pu éviter dans la vie physique, psychologique et spirituelle de nombreuses personnes si les restrictions avaient été rendues publiques et appliquées dès qu'elles ont été imposées.

L'abus d'autorité dans la hiérarchie et la "couverture", dans leurs différentes graves manifestations, ont également eu des conséquences pour moi. Comme l'a dit le Pape François: «Beaucoup de ceux qui ont souffert de cette manière ont même cherché un soulagement dans le parcours de la dépendance» (Homélie, 7 juillet 2014). Surtout en tant que prêtre, je regrette inconditionnellement les dommages que j'ai causés en cherchant la consolation dans l'alcool. Aujourd'hui, je suis profondément reconnaissant pour le traitement thérapeutique que je reçois, qui m'a permis d'embrasser une vie de sobriété. Mon espoir est que mon ouverture encouragera et aidera d'autres prêtres, religieux et séminaristes qui se sont trouvés piégés dans ces abus d'autorité, couverts par les Évêques et les Supérieurs.

Si Dieu le veut, la page web ci-jointe (www.theFigueiredoReport.com) et mon adresse email privée et sécurisée (ajaf@protonmail.com) peuvent devenir un véhicule pour partager ces expériences dans un contexte sûr et, si on le désire, confidentiel (...).

Mon souhait est que mon expérience contribue à une nouvelle culture dans l'Église, une culture dans laquelle aucune victime, jeune ou vieille, aucun prêtre ou séminariste, aucun religieux ou supérieur, aucun évêque ou nonce n'a peur de dire la vérité, une culture dans laquelle chacun sait où chercher de l'aide et chacun est tenu responsable (...).

Monseigneur Anthony J. Figueiredo
28 mai 2019

NDT


(*) On peut supposer que c'est, de la part du monsignore, une concession aux circonstances et une nécessaire précaution; malgré ces belles paroles, il n'ignore évidemment pas que ce qu'il s'apprête à publier va causer pas mal d'embarras au Pape

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