Voeux à la Curie et voyage au Brésil

Le 21 décembre dernier, le Pape a revécu devant les cardinaux de la Curie, au cours de la traditionnelle cérémonie des voeux, les étapes de l'année écoulée.

Une sorte de bilan, en s'attardant sur les évènements significatifs, parmi lesquels le voyage en Brésil a été le plus marquant. J'ai noté avec intérêt que, s'il a évoqué la lettre envoyée aux catholiques de Chine, et celle envoyée par les "138 intellectuels musulmans", il n'a fait aucune allusion aux remous liturgiques qui ont accompagné le motu proprio.
Il a aussi eu des mots très beaux pour qualifier son voyage en Autriche:

La pluie de la foi, en Autriche

Aux autres évènements saillants de l'année je ne peux, malheureusement faire qu'une brève allusion. ... Ainsi la merveilleuse visite en Autriche. L'Osservatore Romano, avec une belle expression, a caractérisé la pluie, qui nous accompagna, comme "pluie de la foi" : non seulement les averses n'ont pas diminué notre joie de la foi en Jésus-Christ expérimentée en regardant vers sa Mère, mais au contraire elles l'ont renforcée. Cette joie a pénétré le rideau des nuages qui nous menaçaient. En regardant avec Marie vers le Christ nous avons trouvé la Lumière qui, au milieu de toutes les ténébres du monde, nous indique le chemin.
(La pluie d'Autriche )

Evangélisation, et dialogue inter-religieux

Le Pape est également revenu avec insistance sur le thème de l'évangélisation, qui a récemment fait l'objet d'une note de la Congrégation pour la doctrine de la foi (Mission), parallélement à la nécessité du dialogue inter-religieux et à la désormais fameuse lette aux "138" (ici). (à ce propos, le site Petrus rapporte qu'une rencontre serait imminente)

-----------------
Le disciple de Jésus Christ doit être également "missionaire", messager de l'Évangile.
A cela aussi, on peut lever une objection: est-il légitime, aujourd'hui encore d'"évangéliser" ? Toutes les religions et les conceptions du monde ne devraient-elles pas plutôt cohabiter pacifiquement et chercher à faire ensemble le meilleur pour l'humanité, chacun à sa manière?
Eh bien, il est indiscutable que nous devons tous cohabiter et coopérer dans la tolérance et dans le respect réciproques. L'Église catholique s'engage pour cela avec une grande énergie et, avec les deux rencontres d'Assise, elle a même laissé des indications évidentes en ce sens, indications que, lors de la rencontre à Naples de cette année, nous avons renouvelées.
À ce sujet il me plaît de rappeler ici la lettre qui m'a été aimablement adressée le 13 octobre dernier par 138 leaders religieux musulmans pour témoigner leur commun engagement dans la promotion de la paix dans le monde.
Avec joie j'ai répondu en exprimant mon adhésion convaincue à des telles nobles intentions et en soulignant en même temps l'urgence d'un engagement commun pour la défense des valeurs du respect réciproque, du dialogue et de la collaboration.
La reconnaissance partagée de l'existence d'un Dieu unique, Créateur prévoyant et Juge universel du comportement de chacun, constitue les prémisses d'une action commune pour défendre le respect effectif de la dignité de chaque personne humaine, en vue d'édifier une société plus juste et plus solidaire.
Mais cette volonté de dialogue et de collaboration signifierait-elle en même temps que ne pouvons plus transmettre le message de Jésus-Christ, plus proposer aux hommes et au monde cet appel à l'espérance qui en découle?
Qui a reconnu une grande vérité, qui a trouvé une grande joie, doit la transmettre, et ne peut absolument pas la garder pour lui. Un don aussi grand n'est jamais destiné à une unique personne. En Jésus Christ s'est élevée pour nous une grande lumière, LA grande Lumière : nous ne pouvons pas la mettre sous l'éteignoir, mais nous devons l'élever afin qu'elle éclaire tous ceux qui sont dans la maison.

Brésil

Pour nous qui avons suivi le périple brésilien pas à pas (http://beatriceweb.eu/), c'était passionnant d'entendre le principal intéressé expliquer ses intentions, et montrer ainsi comment tout son magistère témoigne d'une grande cohérence, autour d'un noyau: être les témoins du Christ.

Sandro Magister

C'est aussi le thème de la chronique hebdomadaire de Sandro Magister.
----------
Dans le discours qu'il a adressé à la curie à l'occasion de la présentation des vœux de Noël, Benoît XVI est revenu sur les objectifs de son voyage dans le plus grand pays d'Amérique Latine: remettre l'Eglise en situation de mission et annoncer Jésus à tous les peuples du monde. Y compris les musulmans
...
Ce déplacement, qui a peu marqué l’opinion publique, a suscité différentes critiques au sein de l’Eglise et a marqué le début, à Aparecida, d’une conférence des évêques d’Amérique Latine moins réussie – elle aussi – que d’autres dans le passé.

-----------
La critique était en fait excessive, et blessante. C'est sans doute une des raisons pour lesquelles Benoît XVI a choisi de s'expliquer -évidemment, il ne nous doit rien, mais il l'a fait.

Ayant suivi ce voyage au jour le jour, et en direct à la télévision, j'en avais retiré l'impression qu'il fallait absolument le discréditer, pour neutraliser son influence.
Avant même son retour à Rome, il avait été décidé qu'il s'agissait d'un "flop"! A tel point que le cardinal Bertone et le Père Lombardi, avaient dû faire une mise au point.

Le Brésil, six mois après


Polémique au Brésil

L'occasion, providentielle, a évidemment été fournie par des propos tenus lors de l'ouverture de la Cinquième conférence, propos qu'on s'était bien gardé de citer en entier, en extrayant seulement une phrase, alors que l'ensemble du paragraphe développait une idée récurrente chez lui, que les divinités d'avant l'ère chrétienne n'étaient finalement que l'attente de quelque chose de plus grand, une vérité à laquelle on n'était pas encore parvenus :

"Mais, qu'a signifié l'acceptation de la foi chrétienne pour les pays de l'Amérique latine et des Caraïbes? Pour eux, cela a signifié connaître et accueillir le Christ, le Dieu inconnu que leurs ancêtres, sans le savoir, cherchaient dans leurs riches traditions religieuses. Le Christ était le Sauveur auquel ils aspiraient silencieusement. Cela a également signifié qu'ils ont reçu, avec les eaux du Baptême, la vie divine qui a fait d'eux les fils de Dieu par adoption; qu'ils ont reçu, en outre, l'Esprit Saint qui est venu féconder leurs cultures, en les purifiant et en développant les nombreux germes et semences que le Verbe incarné avait déposés en elles, en les orientant ainsi vers les routes de l'Evangile.

En effet, à aucun moment l'annonce de Jésus et de son Evangile ne comporta une aliénation des cultures précolombiennes, ni ne fut une imposition d'une culture étrangère.

Les cultures authentiques ne sont pas fermées sur elles-mêmes ni pétrifiées à un moment déterminé de l'histoire, mais elles sont ouvertes, plus encore, elles cherchent la rencontre avec les autres cultures, elles espèrent atteindre l'universalité dans la rencontre et dans le dialogue avec les autres formes de vie et avec les éléments qui peuvent conduire à une nouvelle synthèse dans laquelle soit toujours respectée la diversité des expressions et de leur réalisation culturelle concrète.
".

La réaction, télécommandée, fut immédiate, la communauté concernée étant moins influente, elle a eu moins de retombées que le discours de Ratisbonne, mais l'intention était identique:
------------------
" Les peuples indigènes d'Amérique latine indignés par les propos du pape
L'Organisation nationale indigène de Colombie (ONIC) a exprimé lundi l'émoi des Indiens d'Amérique après les propos du pape Benoît XVI selon lequel le catholicisme n'avait pas été imposé sur le nouveau continent.
"Nier que l'imposition de la religion catholique a été utilisé comme un mécanisme de domination sur les peuples indigènes, c'est vouloir occulter l'histoire", a déclaré à l'AFP Luis Evelis Andrade, directeur de l'ONIC.

"En tant que peuples indigènes, si nous sommes bien croyants, nous ne pouvons accepter que l'Eglise nie sa responsabilité dans l'anéantissement de notre identité et notre culture", a-t-il ajouté.

Après une visite de cinq jours au Brésil et peu avant son retour à Rome dimanche, le pape avait nié la responsabilité de l'Eglise dans la destruction des civilisations précolombiennes.

Les propos de Benoît XVI ont tranché avec la position de son prédécesseur Jean-Paul II qui s'était excusé auprès des peuples indigènes pour la participation des chrétiens dans la conquête de l'Amérique."

-------------------

Apocalypto

Hasard, coïncidence, signe, je viens de voir le film extraordinaire de Mel Gibson, "Apocalypto", qui, selon le synopsis publié sur internet, se déroule "dans les temps turbulents précédant la chute de la légendaire civilisation Maya".

La suite ici: Apocalypto