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Messe dans le rite ancien: instruction d'usage

Comme promis, voici la traduction du long commentaire de Massimo Introvigne à l'Instruction "Universae Ecclesiae".
Un magnifique exemple de pédagogie, comme c'est toujours le cas chez lui. (15/5/2011)

-> Lire ici:
Universae Ecclesiae

Les spécialistes de la liturgie, et plus largement, les fidèles ayant déjà été confrontés aux problèmes soulevés ici, n'apprendront peut-être rien (enfin, pas sûr!). Mais cela représente une infime minorité, dont j'avoue ne pas faire partie.
Personnellement, j'ai appris beaucoup.

En particulier, Massimo Introvigne fait un rappel historique bien nécessaire (on sait en effet combien la mémoire n'est pas le fort de la plupart des hommes -il y en a même qui s'en servent pour les berner!)
J'ai recherché et indiqué les références au texte original de l'instruction , pour ceux qui auraient envie de s'y plonger.

Messe dans le rite ancien, instruction d'usage
http://www.labussolaquotidiana.it/...
Massimo Introvigne
13-05-2011
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Le 13 mai 2011, la Commission pontificale «Ecclesia Dei», a publié l'instruction attendue "Universae Ecclesiae" sur l'application de la Lettre Apostolique Motu Proprio "Summorum Pontificum" du pape Benoît XVI.
Comme on s'en souvient, cette lettre apostolique du 7 Juillet 2007 libéralisait l'usage de la liturgie "ancienne", célébrée selon le rite dit de Saint Pie V (1504-1572) et faisant usage du Missel de 1962 du bienheureux Jean XXIII (1881 -1963). L'instruction indique l'approbation explicite du pape Benoît XVI et est datée du 30 avril 2011, fête liturgique de saint Pie V.

L'Instruction statue sur un sujet très controversé, et pour en comprendre la portée, un peu d'histoire est nécessaire.

Après la réforme liturgique de 1969 du Serviteur de Dieu Paul VI (1897-1978) - qui ne se limitait pas à passer du latin aux langues vernaculaires, mais modifiait profondément la liturgie - se posait le problème du sort à réserver à la liturgie précèdente, ladite "messe ancienne" ou "messe de saint Pie V", souvent appelée aussi "messe en latin", mais de façon imprécise, parce que la messe selon la réforme de 1969 peut elle aussi être célébrée en latin. Il ne pouvait y avoir aucun doute sur la volonté du Serviteur de Dieu Paul VI de rendre la "nouvelle messe" obligatoire comme rite ordinaire de l'Eglise latine, tandis que les Eglises orientales conservaient leurs anciennes liturgies. Certains ont pensé que l'ancienne messe avait été abrogée, et était interdite sauf autorisation spéciale ou indult concédé à des particuliers ou des congrégations: une objection qui était également fondée sur des commentaires privés et des entretiens du Serviteur de Dieu Paul VI lui-même.

En faveur de l'ancienne messe se dressa un vaste mouvement, qui en partie accepta aussi la nouvelle messe à côté de l'ancienne, en partie rejeta la nouvelle messe, allant dans le second cas se fondre dans la galaxie des mouvements - le plus notoire est la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X fondée par Mgr Marcel Lefebvre (1905-1991) - qui contestaient également tout ou partie des documents de Vatican II. Pour ces mouvements, l'ancienne messe n'était pas l'unique - et peut-être même pas la principale - raison d'un désaccord avec Rome, mais elle en est devenue en quelque sorte l'étandard.

A l'occasion de l'excommunication de Mgr Lefebvre en 1988, ainsi que nous le rappelle l'Instruction Ecclesiae Universae, le Bienheureux Jean-Paul II (1920-2005), par lequel «avec l’indult spécial Quattuor abhinc annos publié en 1984 par la Sacrée Congrégation pour le Culte divin, le Pape Jean Paul II concéda sous certaines conditions la faculté de reprendre l’usage du Missel romain promulgué par le bienheureux Pape Jean XXIII», «avec le Motu Proprio Ecclesia Dei de 1988, le Pape Jean Paul II exhorta les Évêques à concéder généreusement cette faculté à tous les fidèles qui le demandaient».
À la suite de ce motu proprio naquirent les instituts précisément appelés «Ecclesia Dei», composés de prêtres et de religieuses qui voulaient préserver l'ancien rite et, en même temps adhérer au Magistère conciliaire et post-conciliaire des Papes, prenant explicitement leurs distances avec Mgr Lefebvre. Ces instituts, tout en célébrant selon le rite ancien, s'engagaient à ne pas contester non seulement la validité - qui n'était pas contestée non plus par Mgr Lefebvre, au moins dans les grandes lignes - mais aussi la légitimité du nouveau rite.

Avec le motu proprio Summorum Pontificum, Benoît XVI -, dès lors que l'appel aux évêques à être «généreux», pour employer un euphémisme, n'avait pas toujours été entendu - fit un pas en plus. Il clarifia définitivement que l'ancien rite n'avait «jamais été abrogé» et que rite ancien et nouveau rite sont les «deux usages du rite romain».
Il libéra de l'approbation préalable des évêques les messes privées de prêtres individuels - auxquelles toutefois, expliquait-il, «peuvent être admis aussi - en observant les règles du droit - les fidèles qui le demanderaient spontanément», et celles des ordres et des sociétés religieuses, ordonnant qu'elles pourraient être célébrées selon l'ancien rite sans permission. Pour les paroisses et les sanctuaires, le pape demandait aux curés et aux recteurs d'«accueillir volontiers» les demandes des fidèles attachés au rite ancien, et au cas où il y aurait des problèmes avec les prêtres, il invitait les fidèles à s'adresser à l'évêque, à son tour - écrivait Benoît XVI - «instamment prié d'exaucer leur désir».
Si l'évêque «ne peut pas obtempérer», ajoutait le motu proprio, «la question devrait être renvoyée à la Commission pontificale 'Ecclesia Dei' ».

Trois ans après le motu proprio de 2007, comme cela avait été annoncé, une enquête a été effectuée parmi les évêques de rite latin, dont les résultats ont été pris en compte pour l'instruction Universae Ecclesiae.
L'Instruction résume la triple finalité du motu proprio de 2007, articulée ainsi: « a) Offrir à tous les fidèles la Liturgie romaine, selon l'usus antiquior, considéré comme un trésor précieux à conserver; b) garantir et assurer vraiment, à ceux qui le demandent, l'usage de la forme extraordinaire; c) favoriser la réconciliation dans l'Eglise».
Sur le second point, il est souligné que cette faculté «doit être interprétée dans un sens favorable aux fidèles qui en sont les principaux destinataires».

Il est impensable qu'on n'ait pas tenu compte des nombreuses plaintes reçues par la commission "Ecclesia Dei" contre les évêques qui n'ont pas appliqué les normes du motu proprio, quand ils ne le critiquaient pas ouvertement ou n'en favorisaient pas une sorte de boycott. Peut-être en tenant compte de ces problèmes, Ecclesiae Universae rappelle d'abord que « Le Motu Proprio Summorum Pontificum constitue une expression remarquable du magistère du Pontife romain et de son munus propre - régler et ordonner la sainte liturgie de l’Église3 - et il manifeste sa sollicitude de Vicaire du Christ et de Pasteur de l’Église universelle», une formule particulièrement contraignante et solennelle, pour indiquer un magistère dont il serait impensable qu'un évêque catholique se démarque.

Une partie centrale d'Ecclesiae Universae concerne précisément le rôle des évêques. Ils sont appelés à «prendre les mesures nécessaires pour garantir le respect de la forme extraordinaire du rite romain, conformément au Motu Proprio Summorum Pontificum» (n.14).
Prendre les «mesures nécessaires» pour atteindre un certain but exclut évidemment la mise en discusson ou le boycott de ce but.

Certes, dit l'Instruction, les évêques «doivent veiller à garantir le bien commun en matière liturgique et à faire en sorte que tout se déroule dignement, pacifiquement et sereinement dans leur diocèse» (n.13), mais cette vigilance ne peut être arbitraire. Au contraire, elle doit être «toujours en accord avec la mens du Pontife romain clairement exprimée par le Motu Proprio Summorum Pontificum».
En d'autres termes, les évêques n'ont pas à décider s'il est opportun que le nouveau rite, qui conserve évidemment son rôle de rite ordinaire, soit associé au rite ancien comme rite extraordinaire. Cela a déjà été décidé par le pape; aux évêques il revient plutôt de déterminer comment peut être introduit ou maintenu dans leurs diocèses l'ancien rite, dans le strict respect non seulement de la lettre mais aussi de l'esprit du motu proprio, dont le but est de favoriser l'ancien rite et non de l'entraver.

Comme il y a peu de doute que les polémiques ne prendront pas fin avec Universae Ecclesiae , très opportunément, l'Instruction transforme la simple "référence" à la Commission "Ecclesia Dei", prévue par le Motu Proprio en une véritable procédure juridique d'appel: «En cas de litige ou de doute fondé au sujet de la célébration dans la forme extraordinaire, la Commission pontificale Ecclesia Dei statuera».

L'instruction rappelle que pour les messes privées, il n'est pas nécessaire de demander une permission, et qu'en exiger une est un abus. Elle précise toutefois que «si un prêtre se présente occasionnellement avec quelques personnes dans une église paroissiale ou un oratoire en souhaitant célébrer dans la forme extraordinaire, comme le prévoient les articles 2 et 4 du Motu Proprio Summorum Pontificum, le curé, le recteur ou le prêtre responsable de l’église accepteront cette célébration, tout en tenant compte des exigences liées aux horaires des célébrations liturgiques de l’église elle-même» (ndt: n.16)

Il est donc clair que si un groupe de fidèles, accompagné de son propre prêtre, se présente dans une église pour célébrer la messe selon l'ancien rite, le prêtre ne peut pas dire: «Je suis opposé à l'ancienne messe» ou «Je dois demander à l'évêque». Si l'Eglise n'est pas occupée par d'autres célébrations, le curé ou le recteur doit «admettre la célébration».

Ou plutôt, il doit l'accepter à moins que les personnes et les prêtres qui le demandent, ne fassent partie de groupes qui rejettent l'autorité du pape, non seulement en théorie mais aussi en pratique - par exemple, en contestant systématiquement le Magistère - ou bien de groupes qui, tout en acceptant en général l'autorité du pape, rejettent la validité ou la légitimité de la nouvelle Messie. La formule est très précise: «Les fidèles qui demandent la célébration de la forme extraordinaire ne doivent jamais venir en aide ou appartenir à des groupes qui nient la validité ou la légitimité de la Sainte Messe ou des sacrements célébrés selon la forme ordinaire, ou qui s’opposent au Pontife romain comme Pasteur suprême de l’Église universelle» ( n.19).

Sont exclus du bénéfice d'Universae Ecclesiae non seulement les fidèles qui «appartiennent» aux groupes qu'en d'autres occasions, le pape a qualifié d'«anticonciliaire», mais aussi ceux qui, tout en n'en faisant pas partie, les soutiennent, par les discours, l'écriture ou les propositions. Non seulement ceux qui «contestent» l'autorité du Pape, mais aussi ceux qui ne remettent en question «que» la nouvelle messe. Et pour faire partie de ces contestataires, il n'y a pas besoin de mettre en doute la «validité» du nouveau rite, il suffit de contester sa «légitimité».
Les deux concepts, canoniquement, ne sont pas synonymes, et la règle semble presque écrite délibérément pour décrire la position de la Fraternité Saint-Pie X, qui stipule que - sous certaines conditions - la nouvelle messe est valide, mais affirme pourtant qu'elle n'est pas «légitime», c'est-à-dire que ce n'est pas une messe à laquelle les fidèles peuvent assister sans mettre en danger leur foi.

En ce qui concerne les célébrations régulières dans les paroisses et les sanctuaires, l'Instruction offre des précisions sur la question des dénommés «groupes stables» (coetus existens stabiliter fidelium ) qui sont habilités à les réclamer.
«Un cœtus fidelium pourra se dire stable (stabiliter exsistens), au sens où l’entend l’art. 5 § 1 de Summorum Pontificum, s’il est constitué de personnes issues d’une paroisse donnée qui, même après la publication du Motu Proprio, se sont réunies à cause de leur vénération pour la liturgie célébrée dans l’usus antiquior et qui demandent sa célébration dans l’église paroissiale, un oratoire ou une chapelle ; ce cœtus peut aussi se composer de personnes issues de paroisses ou de diocèses différents qui se retrouvent à cette fin dans une église paroissiale donnée, un oratoire ou une chapelle».
Il n'est donc pas obligatoire que tous les membres du groupe stable soient d'une même paroisse, voire du même diocèse.

Même s'il n'y a pas un «groupe stable» assez nombreux, l'évêque n'est pas autorisé à arrêter la pratique, en poussant peut-être un soupir de soulagement. Au contraire, explique l'instruction, «Dans le cas de groupes numériquement moins importants, on s’adressera à l’Ordinaire du lieu pour trouver une église où ces fidèles puissent venir assister à ces célébrations, de manière à faciliter leur participation et une célébration plus digne de la Sainte Messe» (n.17).
Ici aussi, «trouver une église» est une chose évidemment différente de répondre qu'aucune église n'est disponible.

Il faut, bien sûr, «un prêtre idoine» (n.19). Mais, précise l'Instruction, nul besoin d'un liturgiste qualifiés ou d'un professeur de latin. Pour le latin, il suffit «d'une connaissance de base qui lui permette de prononcer correctement les mots et d’en comprendre le sens». «La connaissance du déroulement du rite est présumée chez les prêtres qui se présentent spontanément pour célébrer dans la forme extraordinaire et qui l’ont déjà célébrée» (n.20)

Bien sûr, il s'agit d'un point de départ. L'Église veut que sa liturgie soit la plus digne possible, et pour cela «On demande aux Ordinaires d’offrir au clergé la possibilité d’acquérir une préparation adéquate aux célébrations dans la forme extraordinaire. Cela vaut également pour les séminaires, où l’on devra pourvoir à la formation convenable des futurs prêtres par l’étude du latin, et, si les exigences pastorales le suggèrent, offrir la possibilité d’apprendre la forme extraordinaire du rite» (n.21).
Et s'il n'y a pas de prêtres capables d'enseigner la façon de célébrer l'ancien rite? L'Instruction répond que «dans les diocèses sans prêtre idoine, les Évêques diocésains peuvent demander la collaboration des prêtres des Instituts érigés par la Commission pontificale Ecclesia Dei, soit pour célébrer, soit même pour enseigner à le faire».

D'autres règles stipulent que dans le Missel de 1962 en latin «De nouveaux saints et certaines des nouvelles préfaces pourront et devront être insérés selon les normes qui seront indiquées plus tard» (n.25); que les prêtres qui le désirent pourront utiliser le Bréviaire de 1962 en latin; et qu'est confirmée la faculté d'utiliser l'ancienne formule pour la confirmation, tandis que «Seuls les Instituts de vie consacrée et les Sociétés de vie apostolique qui dépendent de la Commission pontificale Ecclesia Dei ainsi que ceux dans lesquels se maintient l’usage des livres liturgiques de la forme extraordinaire peuvent utiliser le Pontifical romain en vigueur en 1962 pour conférer les ordres mineurs et majeurs» (n.31), ce qui déplaira à certains partisans de l'ancien rite. (!!)

Au-delà de ce dernier élément, le sens général de l'Instruction est clair. Il s'agit d'une Instruction en faveur d'une plus grande diffusion de l'ancien rite, qui vise à éliminer les obstacles dérivant d'une lecture erronée ou malveillante du précédent motu proprio.
Tout cela - comme Benoît XVI l'a précisé dans son discours du 6 mai 2011 aux participants au IXe Congrès international de liturgie non pas pour opposer réforme liturgique et rite ancien, mais pour les intégrer et les «réconcilier». «Trop souvent, a dit le pape à cette occasion, on oppose maladroitement tradition et progrès alors que les deux concepts se complètent intégralement. La tradition est une réalité vivante, qui inclut en quelque sorte tout principe de développement, de progrès. Comme si le fleuve de la tradition portait en lui sa source et tendait vers l'embouchure».
Le pape réclame donc le respect à la fois pour la réforme liturgique du Serviteur de Dieu Paul VI et pour le motu proprio de 2007: «la pleine fidélité à la riche et précieuse tradition liturgique et à la réforme voulue par Vatican II, selon les principes caractéristiques de Sacrosanctum Concilium [la Constitution sur la Liturgie de Vatican II] et les déclarations du Magistère».

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