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Saint-Marin (I)

Les angoisses et les attentes de Mgr Negri: interviewe dans l'OR (19/6/2011)

J'ai vu passer cette semaine dans la presse italienne plusieurs interviewes de l'attachant évêque de Montefeltro.
Il confiait en particulier sa nervosité, son angoisse (sentiments très humains, et bien compréhensibles), en particulier à cause des menaces d'attentat contre la personne de Benoît XVI, à l'approche du grand évènement que représente pour lui et sa communauté la visite du Pape. Une visite obtenue "de haute lutte" et reçue comme un grand don.
Dans l'une des interviewes, Mgr Negri, nommé évêque de San Marino en 2005, rencontrant le Saint-Père peu après son élection lui avait demandé: "Santità, venez chez moi". Et Benoît XVI de répondre en souriant "Donnez-moi un peu de temps: nous sommes tous les deux en phase de rôdage...".

La Croix nous rappelle que:
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[La visite intervient] vingt-neuf ans après celle de Jean-Paul II en 1982. Troisième plus petit État d’Europe (61 km⊃2;) après le Vatican et la Principauté de Monaco, Saint-Marin est la doyenne des républiques. Sa constitution date du 8 octobre 1600. Enclavée entre les régions italiennes de l’Émilie-Romagne et des Marches, elle compte environ 30 000 habitants, dont 1 000 étrangers. Par ailleurs 5 000 Saint-Marinais résident à l’étranger.

Au cours de ce déplacement, le pape présidera une messe dans le stade olympique de Serravalle, à Saint-Marin. Il rencontrera les membres du gouvernement et du corps diplomatique, visitera la basilique et vénérera les reliques de saint Marin, diacre italien du IVe siècle, tailleur de pierres. Sur la place de la Liberté, le pape sera accueilli solennellement par les capitaines-régents. À 18 h 30, Benoît XVI se rendra en hélicoptère à Pennabilli, en territoire italien, où, après la visite de la cathédrale, il rencontrera les jeunes du diocèse.

Entretien avec Mgr Luigi Negri, à la veille de la visite du pape pour le diocèse de Saint-Marin - Montefeltro
(Source: Raffaella)
Une expérience commune de foi qui va au-delà des différences sociales

Mario Ponzi

"Ici se vit une expérience de foi tellement enracinée dans le cœur des gens qu'elle réussit non seulement à surmonter les distances, mais aussi à valoriser les différences sociales qui se rencontrent inévitablement dans un tissu aussi hétérogène que le nôtre."

Il se fait sérieux, Mgr Luigi Negri, évêque de Saint-Marin - Montefeltro quand, présentant la visite de Benoît XVI dimanche 19 Juin , il nous parle du profond contraste entre ce qui pourrait sembler deux corps d'une âme. Un peu plus de 68.000 habitants, éparpillés sur une superficie de huit cents kilomètres carrés, comprenant trois provinces, 82 paroisses plus les deux cures de la République de Saint-Marin, servi par 58 prêtres séculiers, et 23 réguliers, et deux cathédrales, deux patrons, un ermitage, un monastère franciscain, un sanctuaire. C'est le diocèse en chiffres. Ce n'est que depuis 1977 que la circonscription religieuse a pris son nom actuel. Avant, et pendant plus de douze siècles, le titre était tout simplement le diocèse de Montefeltro. Saint-Marin en a toujours été une partie intégrante, ainsi la centaine d'autres châteaux dans la région. A Benoît XVI, elle se présente dans son identité unique, formée elle est par deux provinces italiennes et par un État indépendant, la République de Saint-Marin, justement: deux réalités évidemment très proches, mais aussi très éloignées l'une de l'autre. Nous avons parlé avec Mgr Luigi Negri.

- La forme spéciale du diocèse implique-t-elle quelques difficultés pastorales?
- Certes, notre situation est exceptionnelle. Je pense qu'elle l'est aussi du point de vue canonique. Le diocèse fait référence à l'ancien siège épiscopal de Montefeltro, auquel a été ajouté en 1977 le territoire de la République de Saint-Marin, qui est une organisation internationale libre, indépendant et souveraine. Mais cela, au-delà de l'«étrangeté», ne comporte aucune difficulté pour la vie de l'Eglise locale qui est fortement unie, vit une expérience de bonté dans la foi, dans la charité, qui non seulement dépasse, mais aussi valorise les différences.

- De quelles différences parlez-vous?
- Du point de vue de l'Eglise, je le répète, il y a une certaine uniformité d'un côté comme de l'autre. Le peuple chrétien du territoire a depuis longtemps repris conscience de la grande tradition de foi et de charité qui avaient caractérisé l'identité de ces lieux. Ce n'est qu'ainsi qu'il a été possible d'affronter ce sécularisme anti-catholique qui dans ces régions s'est fait beaucoup sentir et qui, encore aujourd'hui, a tendance à détruire l'identité chrétienne et à la remplacer par une identité qui pourrait se définir comme mass-médiatique. Cela fait six ans que nous travaillons dans cette direction.

- Et les difficultés?
- Pensez aux différences au niveau socio-économique entre les populations. D'un côté il y a, ou du moins il y a eu jusqu'à il y a quelques mois, le bien-être absolu et souverain d'un état - la République de Saint-Marin - qui a certainement vécu au-dessus de ses moyens et qui maintenant, après avoir traversé, comme le reste du monde, une grave crise sous plusieurs aspects, se trouve face à la reprise de sa propre identité de liberté, de responsabilité pour répondre, dans la sphère sociale, laux noeuds qui se sont formés. Des noeuds qui sont certainement financiers, économiques, liés également à la conjoncture pas facile des relations avec l'Italie, qui de son côté, ne m'a pas semblé aussi libre et grande qu'elle l'est dans sa tradition. Et l'autre partie du diocèse montre justement combien nous avons besoin de repenser, comme disent les sociologues, le système-Pays. Mais je pense qu'il est nécessaire de fonder ce "repensement", ou plutôt qu'il faut redécouvrir et renouveler ce qui est la vraie racine du système-Pays, qui est l'homme, la personne, la famille. Les dangers qui risquent d'assécher cette racine sont nombreux: la permissivité morale, l'irresponsabilité, la crise de la famille, le manque de capacité éducative. Ce sont tous les risques qui pèsent lourdement sur une société qui jusqu'à présent a vécu de l'hédonisme de la Riviera adriatique.

- D'où vient cette situation, selon vous?
- Je crois que cette situation, très grave et complexe, remonte à quelques décennies et est la fille d'un certain délaissement que ces régions ont connu. Depuis l'unification de l'Italie, ces terres ont été reléguées à des zones frontalières entre des régions différentes, dont personne ne s'est occupé, sinon pour percevoir des impôts. Il est vrai aussi que pour la plupart, il s'agit d'institutions petites, car les communes sont petites. Mais toutes les institutions, même les plus petites, reproduisent souvent les mêmes erreurs, les mêmes défauts que les gestions centralisées, et vivent souvent de manière encore plus exaspérée la tentation de se réaliser dans le consumérisme, dans ce que les jeunes d'aujourd'hui appellent le "sballo" (la fête). Depuis mon arrivée dans ce diocèse, j'ai célébré les funérailles d'une quinzaine de jeunes gens qui sont morts sur le chemin du retour des temples du divertissement à tout prix et sans limites. Cela montre avant tout une crise de valeurs, puis une crise plus profonde de la famille. Mais seuls quelques-uns, en particulier parmi ceux qui ont des responsabilités précises, semblent s'en inquièter. Dans ces régions aussi, malheureusement, on enregistre un manque d'attention substantiel aux problèmes réels du pays. Et on le voit dans quelques-unes de nos réalités. Benoît XVI, par exemple, ne fera pas un long trajet dans la papamobile pour se déplacer de l'endroit où l'hélicoptère va se poser jusqu'au cœur de Pennabilli. Et pourtant, il parcourra quelques centaines de mètres de routes que je fréquente déjà depuis six ans pour tourner dans mon diocèse, dont je connais chaque pierre, et je connais chaque goutte de sueur ou de larmes qui les baignent quotidiennement.

- Et qu'est-ce que ces gens attendent du pape?
- Qu'il sache restaurer l'espérance de la foi. Il y a un climat d'attente que je définirais palpable, en ce sens que les gens ici sont animés par une profonde affection pour le Pape. Du reste, l'adhésion à l'Église a toujours caractérisé la vie de la population. Et les gens ont toujours ressenti le successeur de Pierre comme un point de référence essentiel, un exemple, un témoin. Donc, ils attendent le Pape pour une rencontre de foi. Certes, il n'y a aucune teinte folklorique dans cette visite même si, j'en suis convaincu, une certaine presse la verra ainsi, sous l'aspect du folklore. Le Pape vient pour l'Eglise et à mon avis, il vient aussi pour parler à beaucoup de gens de bonne volonté. Il y en a sûrement parmi eux ceux qui ne fréquentent pas une église: mais ils ont aussi le sentiment que va arriver quelqu'un qui peut satisfaire leur désir profond de vérité, de bien, de beauté, de justice. Les estimations numériques parlent de plus de vingt-deux mille personnes qui ont réservé rien que pour le Stade Serravalle - même une épingle ne pourrait plus rentrer - pour assister à la messe du Pape concélébrée par tous les évêques de l'Émilie-Romagne, et plus de cinq mille jeunes à Pennabilli. Impossible, ensuite, de prédire combien seront à d'autres endroits et même le long du court trajet en voiture, que le pape va faire.

- Quelles sont vos attentes de cette visite?
- Tout le bien possible. J'espère que Benoît XVI, voyant notre engagement et appréciant notre témoignage, saura comment nous réconforter ou, comme je lui ai demandé explicitement, au besoin nous corriger si et là où nous nous sommes trompés. Tout le monde attend sa parole. Même les nombreuses personnes qui ont dévié de la route principale, ou qui n'ont jamais parcouru cette route.

(© L'Osservatore Romano, 18 Juin 2011)

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