Gotti-Tedeschi: prix Nobel d'économie pour le Pape
L'ancien directeur de l'IOR commente pour La Bussola le discours de Benoit XVI au Corps diplomatique [1]. (12/1/2013)
Extrait du Discours au Corps Diplomatique
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Poursuivant notre réflexion, il vaut la peine de souligner comment l’éducation est une autre voie privilégiée pour la construction de la paix. La crise économique et financière actuelle, entre autre, nous l’enseigne. Elle s’est développée parce que le profit a été trop souvent absolutisé, au préjudice du travail, et qu’on s’est aventuré sans retenue sur les voies de l’économie financière, plutôt que sur les voies de l’économie réelle. Il convient donc de retrouver le sens du travail et d’un profit qui lui soit proportionné. À cette fin, il est bon d’éduquer à résister aux tentations des intérêts particuliers et à court terme, pour s’orienter plutôt vers le bien commun.
De nombreux articles ont été consacrés sur ce site au banquier Gotti Tedeschi, grand "champion" de la finance "morale" et du rôle de la natalité dans la croissance. (cf. http://tinyurl.com/ccsv42q)
Son nom a été associé (on imagine que la grosse presse tirait les ficelles par derrière, ses positions pro-vie heurtant de front les intérêts qu'elle représente) aux Vatileaks, et son éviction de la direction de l'IOR a été interprétée faussement comme une disgrâce venant du Pape. J'ai encore en travers de la gorge les insultes lues sur un blog français aussi péremptoire que superficiel et mal informé qui titrait triomphalement le 24 avril dernier: le Vatican éjecte le président (ultralibéral) de sa banque, l'IOR.
A lire ce qu'Ettore Gotti-Tedeschi écrit ici sur le saint-Père (et dans les colonnes de la Bussola, dont je pense personnellement qu'elle représente davantage la voix du pape que l'OR...) il semble que ce ne soit décidément pas le cas!
Rappelons qu'il y a un an (donc avant sa disgrâce), présentant un ouvrage intitulé "Les Ragioni dell'economia"), il déclarait aux journalistes qui l'interrogeaient « Au théologien Ratzinger, ce qu’il faudrait c’est le Nobel de l’Economie... C’est le plus grand économiste, parce qu’il connaît les besoins des hommes. Le plus grand connaisseur de l’homme sait ce qu’est l’économie ». (cf. http://benoit-et-moi.fr/2012-I)
Finances et travail, urgence éducative
Ettore Gotti Tedeschi
12/1/2013
http://www.lanuovabq.it
Le 7 Janvier, dans le message au Corps diplomatique (Voeux au corps diplomatique), le pape Benoît XVI a de nouveau rappelé le vrai sens de l'économie, en parlant de finances, travail, profit. On a même voulu interpréter le discours du pape en repranant un mot à la mode, «spread du bien-être».
Voyons d'abord cette expression. «Spread du bien-être» signifierait qu'avant la crise, la différence de richesse entre les riches et les pauvres était inférieure à ce qu'elle est devenue deux plus tard, et comme conséquence de la crise.
L'interprétation est correcte en comparant la différence de bien-être dans les pays dits occidentaux (anciennement riches), alors que c'est l'inverse si l'on compare la différence avec l'extérieur, entre entre les pays occidentaux et orientaux (asiatique), c'est-à-dire entre ex-riches et ex-pauvres. En effet, grâce au processus accéléré de mondialisation rendu nécessaire pour soutenir les déséquilibres de l'Occident (Etats-Unis et en Europe), les pays auparavent dénommés «émergents» sont devenus plus riches, réduisant le spread, tandis qu'à l'intérieur des pays «matures» , ce spread s'est accru entre les secteurs de la population, à cause de l'effondrement de l'emploi réel, des revenus, des retraites, du pouvoir d'achat, des rendements, etc. Et cela à cause de la réduction de la capacité de production, du crédit bancaire, des dépenses sociales; et à l'inverse, en raison de l'augmentation des impôts, del'impôt sur la fortune, et ainsi de suite. Et, si l'on regarde de près, ausi à cause de la diminution de la solidarité, du huit pour mille (l'impôt que les italiens paient volontairement, en général au profit de l'Eglise), de l'aumône.
A de nombreuses reprises, nous avons dit que la chute du taux de natalité aurait comme effet l'effondrement de bien-être. Et c'est ce qui s'est produit. Dans les pays qui ont égoïstement sacrifié les naissances à l'illusion du bien-être consumériste, à présent, il ne reste plus qu'à redimensionner, et le plus vite possible, le dit bien-être. Le contraire s'est produit dans d'autres pays. Avec la délocalisation déséquilibrée de la production réalisée dans les deux dernières décennies, notre monde occidental a sacrifié la production et le bénéfice productif (qui devait être, en grande partie, en contradiction avec le choix de délocaliser pour des raisons de concurrence) et ils ont inventé le bénéfice financier, plus conceptuel que réel, basé sur l'hypothèse que la croissance consumériste serait soutenable (durable) et la dette payée.
Mais il n'en a pas été ainsi, et la grande illusion est terminée. On a privilègié la finance sur le travail parce que le travail a été «exporté» là où il coûte moins cher, afin d'augmenter toujours plus le pouvoir d'achat et la consommtion. Et cela, soulignons-le, parce que l'économie réelle ne se développait pas, et elle ne se développait pas parce qu'on ne faisait pas d'enfants. Comment peut-on faire croître le PIB de manière durable et non temporaire, si la population n'augmente pas (ndt: en France, on a choisi une autre voie, plus "comestique", mais est-elle "durable"?)? C'est pourquoi la finance, qui a géré l'élément-clé du développement (fictif), c'est-à-dire la dette, a pris la place de la production et du travail. Parce que ceux-ci ont été exportés. Et parce qu'on n'a plus fait d'économie pour l'homme. Comme le dit de façon exemplaire Benoît XVI.
Voyons maintenant, en quelques lignes, comment ce problème doit être abordé sans créer d'autres déséquilibres.
Tout d'abord, on ne doit pas créer de nouvelles taxes et impôts sur la fortune parce que, contrairement à ce qui semble, ils se retourneraient indirectement justement sur les classes les plus modestes (je reviendrai dans les jours à venir sur ce sujet), car ces impôts ne créent pas de développement, ce sont plutôt des instruments d'affirmation d'un néo-étatiste improductif qui créera de nouvelles dépenses publiques, et rien d'autre.
Affronter réellement ce problème n'est pas la tâche des seuls économistes, c'est la tâche des éducateurs. Ceci parce qu'après trente ans de valeurs erronées, il est temps de reproposer des valeurs réelles. Et cela ne peut être fait en un clin d'œil, avec une réforme ou une loi.
Changer la culture des valeurs de référence à rechercher et sur lesquelles investir, réclame du temps, mais plus important encore, réclame des éducateurs capables. Y en a-t-il? Y a-t-il des familles qui privilégient l'éducation de leurs enfants sur tout autre choix? Y a-t-il des prêtres qui s'occupent seulement d'enseigner la doctrine et la morale? Des prêtres qui enseignent à se confesser? Ne pensez-vous pas que la confession est une véritable éducation? Seulement cela est la première éducation, l'éducation au sens de la vie, au sens des actions. Le reste est conséquence.
Notre Pontife se révèle une fois de plus être un véritable économiste, et même l'économiste par excellence, c'est-à-dire l'économiste pour l'homme, connaissant bien, Lui, et de manière «unique» les besoins réels des hommes et comment les satisfaire avec l'outil économique. En fait, dans ce message, Benoît XVI n'a rien fait d'autre que rappeler ce qu'il avait déjà écrit dans Caritas in Veritate : l'économie, la finance, ne sont que des moyens. Et comme moyens, elles ont besoin d'une fin vers laquelle tendre pour être bien utilisées. Sinon, elles deviennent stériles. Comment cela s'est produit. C'est ce qu'explique Benoît XVI avec sagesse et une compétence unique.
Alors, pourquoi ne pas le proposer (pour la deuxième fois) comme candidat pour le prix Nobel d'économie? (cf. http://benoit-et-moi.fr/2012-I/0455009fcb0e2340d/045500a0030a47602.html)
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