Son péché: être allemand

Très juste commentaire d'un non-croyant dans un journal italien, "Il resto di Carlino" (18/2/2013)

Le journal est Il resto del Carlino, et l'auteur m'est inconnu, Roberto Giardina (*): au vu de ce texte, il appartient à une catégorie de personnes que les pharisiens ont en horreur: les athées-devots. Et pourtant, au long du Pontificat, et à travers les graves crises, ce sont eux qui se sont révélés être les meilleurs soutiens du Saint-Père.

Tout était consenti au Pape polonais, Wojtyla santo subito... Rien au Pape allemand, un Ratzinger auquel on reproche le péché d'être né en Allemagne. Un jugement qui me dérange, même moi qui ne suis pas croyant. Un Pontife, on devrait le savoir, n'a pas de passeport. Papa Benedetto est venu à Cologne durant l'été 2005, peu de mois après l'élection, pour la rencontre mondiale des jeunes, évènement préparé pour son prédécesseur. Je l'ai vu en bateau, descendant le courant le long du Rhin qui resemblait au Gange, un million de fidèles les pieds dans l'eau qui lui faisaient fête. «Mais les églises, le dimanche, sont vides - avertissait le Pntife - le consumérisme est à condamner, même le consumérisme de la foi». Paroles que peu voulaient entendre.
Au contraire de Jean-Paul II, Papa Ratzinger se sentait mal à l'aise parmi la foule.
Un profeseur de la vieille école, aimé de ses étudiants, jusqu'à ce qu'arrive 68, un fin théologien, avait pris la place d'un pape au tempérament médiéval, un guerrier. C'est une constatation, pas un jugemnt.
Le pape allemand déçut ses compatriotes, qui pourtant l'avaient accueilli au cri de libération de "wir sind Papst", nous sommes tous Pape avec lui, le signal que le passé était surmonté. Les fautes ne sont pas pour toujours, même si on n'oublie pas. On attendait qui sait quelles réformes pour conquérir de nouveaux fidèles, alors que Papa Benedetto préférait être suivi par peu de gens, mais justes, au moins selon ses valeurs
Aujourd'hui, tous les fidèles, dans sa patrie et dans le monde, redécouvrent un vicaire du Christ qui émeut, et qui fascine même les non croyants, même sans le talent de communicateur de Wojtyla.

Ratzinger restera dans l'histoire pour deux évènements: il a été le premier Pape allemand après presque mille ans, et le premier Pape à quitter la Chaire après sept cents ans (ndt: il restera, Dieu merci, pour bien plus que cela... à moins que l'on ne confonde l'Histoire avec "les" histoires... écrites par les medias).
Du premier, il n'est pas responsable; le second est une preuve de grandeur et de profonde simplicité. Même Dante s'est trompé, quand il a traité Célestin V de grand lâche pour son refus. Il faut de la force pour imposer un renoncement, sutout à la cour du Vatican. Plus un pape vieillit, plus influents deviennent ses collaborateurs. Il a même été critiqué par quelque cardinal, mais les gens ont compris, l'approuvent, le sentent plus proche et lui font fête.
A partir de mars vivra, espérons-le, longtemps, entouré de grande affection, se consacrant à ses études, Joseph Ratzinger, qui fut le Pape allemand du nouveau millénaire.

(*) Originaire de Palerme, écrivain, il est correspondant à Berlin pour plusieurs journaux italiens (cf. bompiani.rcslibri.corriere.it/)