Un Pape anticlérical

... ou au moins un Pape qui a une claire idée du laïcat. Carlota a traduit un article du journaliste catholique navarrais José Joaquín Iriarte (19/3/2013)

Image ci-contre: Le pape François quitte la basilique Sainte-Marie Majeure après y avoir prié jeudi 14 mars

     

Carlota
19 mars
---
Après le Pape-des-pauvres, le réformateur-de-la-curie-augias, le pape-de-la-décentralisation (vive le néo-gallicanisme, ou tout autre pays, qui va enfin officiellement pouvoir relever la tête), voilà le pape-anticlérical. Décidément notre Souverain Pontife François, s’il est l’adepte des pauvres vestures, et déjà pourtant bien habillé pour cette fin d’hiver !

J’ai trouvé un article du journaliste catholique navarrais José Joaquín Iriarte qui s’interroge sur ce nouveau qualificatif qui n’en doutons n’est pas prononcé par les habituels laudateurs du Système par amour de l’Église du Christ, sachant que si effectivement ils applaudissent un pape anticlérical donc contre les curés (ah une église purifiée sans intermédiaires surtout catholiques ou … !), ces mêmes spécialistes de l’Église pontifient à qui mieux-mieux et se déclarent chefs de file de bien des auto - proclamés chapelles et comités…La deuxième partie de cet article qui présente plus spécialement l’anticléricalisme du cardinal Bergoglio est de très bon augure, mais par forcément pour ce à quoi aspirent les médias !

(http://www.intereconomia.com)

     

Un Papa anticlérical
----
François sans rien d’autre, comme le poverollo. Rien à voir avec François 1er qui prêterait à confusion avec le François 1er de France, le monarque qui rivalisa avec l’empereur Charles V (Charles Quint) et dont la discorde supposa des conséquences négatives pour l’Occident chrétien.
François comme celui d’Assise, comme l’artisan de la transformation de l’Église, là, pour le XIIIème siècle.
Quand on lui a demandé le nom sous lequel il voulait être appelé il a répondu d’une manière concise en latin: Franciscus. Il a du le dire avec la même simplicité avec laquelle quelques minutes plus tard il est apparu et a parlé à la loggia de la basilique Saint Pierre, avec un authentique naturel qui a donné son empreinte à sa première sortie du Vatican pour mettre aux pieds de la statue de Sainte Marie Salus Populi Romani un bouquet de fleurs dans l’une des quatre basiliques pontificales : Sainte Marie Majeure, très liée au Royaume d’Espagne. Et acte suivant, il a pris l’initiative, - une encyclique vivante sur le vrai sens de la pauvreté - d’aller à la résidence où il était logé avant le conclave pour prendre ses affaires et payer sa note, comme le ferait le dernier curé du dernier village du « bout du monde ».
Les papes, - comme les rois, n’ont jamais d’argent sur eux, ni carte de crédit, ni chéquier, mais ce pape connaît, vit la vertu de la pauvreté, qui ne consiste pas à ne pas avoir mais être détaché.

Des nombreuses choses que l’on peut dire du Pape François, se détache sa profonde humilité, ses habitudes de sobriété et son style sans fioritures. Il n’y a pas en lui la plus légère affectation. Il est naturellement simple. Une simplicité qui n’implique pas un manque de fermeté. Un fait intéressant, et en plus quand il s’agit .d’un religieux, c’est une claire vision du laïcat. Quand il a pris congé comme président de la Conférence Épiscopale Argentine, il a été interviewé dans une agence de son pays. À cette occasion il a souligné un problème qui n’a pas été éradiqué : « Nous les curés, a-t-il dit, avons tendance à cléricaliser les laïcs. Nous ne nous en rendons pas compte mais c’est comme rendre contagieux ce qui est nôtre. Et les laïcs, pas tous, mais beaucoup, nous demandent à genoux que nous les cléricalisions, parce que c’est plus commode d’être servants de messe que protagoniste d’un chemin du laïc » (…). « Le laïc, a-t-il ajouté est un laïc et doit vivre comme un laïc avec la force du baptême, ce qui lui donne l’habilitation pour être un ferment de l’amour de Dieu dans la société même, pour créer et semer l’espérance, pour proclamer la foi, non pas depuis un pupitre mais depuis sa vie de tous les jours. Et en portant sa croix quotidienne comme nous la portons tous. La croix du laïc, non pas celle du curé. Celle du curé, que le curé la porte, que Dieu lui a donné une épaule suffisante pour cela ».

Sa dénonciation est d’une actualité totale. Pourquoi celui qui est aujourd’hui le Pape François précisait-il ces choses ? Parce qu’ aujourd’hui le cléricalisme abonde, l’excessive présence de fidèles qui tournent dans les sacristies et papillonnent autour de l’autel. Je dis une excessive présence, non la présence quand elle est nécessaire. Il y a des laïcs que ne se contentent pas de vivre le sacerdoce réel du tout chrétien par le fait qu’il est baptisé mais qui aspirent, c’est l’impression, à exercer un sacerdoce ministériel, essentiellement différent. Ils sont des corruptions du rôle du laïcat dans l’Église dont la mission n’est pas en une mixture clerc-laïc, mais de conserver chacun sa propre identité.

Je me réjouis que l’élu des cardinaux électeurs au pouvoir suprême de l’Église soit un jésuite, un religieux, un clerc qui soutient une pensée anticléricale. Quelques laïcs qui se font remarquer, apparaissent aux yeux des fidèles comme l’alter ego du curé. Je crois que, parmi d’autres aspects, la beauté de la liturgie s’en ressent. Laïcs et clercs forment le Peuple de Dieu, ils ont la même route de navigation et le même port de destination, mais le capitaine (qui représente l’armateur) à sa place, et le chef machine à la sienne.

Espérons que, avec un peu de chance, ses collègues dans l’épiscopat soient contaminés par la mentalité laïque du nouvel Évêque de Rome et qu’ils invitent leurs paroissiens à donner un espace libre à l’autel, et les laïcs à employer leur temps à être « un ferment d’amour de Dieu dans la société même », dans la rue, à l’air libre.

Après son intronisation de mardi, avec la solennelle cérémonie de la Place Saint Pierre, il reste comme plat de résistance des premiers pas du Souverain Pontife argentin, sa visite à Castel Gandolfo où samedi prochain il partagera la table et le couvert avec son prédécesseur. Quelle conversation savoureuse ils maintiendront au repas et à table, le Pape émérite et le nouveau Pape! Le théologien et le pasteur (**).
Il semble que la nouvelle étape a besoin avec plus d’insistance du sifflet du berger. Au piano qui, dans ses déménagements, accompagne toujours celui qui fut le Souverain Pontife de Bavière, l’on peut interpréter indifféremment une symphonie de Mozart (Ratzinger) et un tango argentin (Bergoglio). Maintenant l’on joue le rythme de Buenos Ayres.

--

(*) Ce texte me fait d’autant plus plaisir que, notamment, même sans parler des « fidèles de sacristie », chez nos élus, en France comme en Espagne ou ailleurs, n’entendons-nous pas : « moi je suis catholique (certains mêmes sont au premier rang à la messe de leur fief électoral encore un peu campagnard et conservateur) mais la religion est une affaire privée ». Et comme maire, député ou sénateur, ils votent ou ont voté depuis des années les lois scélérates de la République ou de n’importe quelle monarchie constitutionnelle, et ont placé la culture de mort et des nouveaux droits sur l’autel de leur réélection. Sans doute c’est plus facile comme citoyen lambda de déposer un bulletin dans une urne que se présenter sous l’étiquette d’un parti pour faire carrière, mais c’est aussi moins bien payé.
Au fait tous les Français qui iront voter avec leurs pieds le 24 mars 2013 à Paris contre la loi Taubira (« mariage » de deux personnes du même sexe), ne seront pas défrayer de leurs frais de transport, et pour la plupart ils n’ont pas les revenus des élus de la nation. Ils se priveront peut-être de vacances à une autre occasion.

Pour ce qui est de la beauté de la liturgie, il est évident que si des jeunes et des moins jeunes qui n’étaient pas nés ou à peine nés en 1969 (quand en France la liturgie Vatican II fut imposée, avec ses « dérives » à venir auxquelles fait allusion l’auteur), ont tellement apprécié de pouvoir bénéficier grâce à Benoit XVI de la « légalisation » du rite ancien, où là évidemment des laïcs et en plus en costume de ville ne « papillonnent pas autour de l’autel », c’est parce qu’ils ont trouvé ou retrouvé le sacré de l’Eucharistie !

(**) Raccourci littéraire, don José, si je puis me permettre, car si je ne sais encore rien de François, pape théologien, je crois pouvoir témoigner de Benoît, pape pasteur, même si peut-être comme vous le suggérez certains moutons auraient eu besoin plus que d’autres de recevoir un bon coup de crosse sur la tête pour moins s’écarter du chemin de la bergerie…Mais il n’y a que le berger qui peut décider…
Par ailleurs, je ne sais pas si l’ « anticléricalisme » de François pourra se réaliser mais il est de bon augure.