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Abroger les lois

Vu d'Italie, le discours du Pape François aux parlementaires français (17/6/2013)

Voir aussi:
>>> François aux parlementaires français
>>> Qui est vraiment le pape François?

     

Don Gabriele Mangiarotti, prêtre saint-marinien qui collabore épisodiquement à la Bussola, revient sur les propos du Pape François aux parlementaires français. Il déplore qu'ils aient suscité si peu de réaction en Italie, alors qu'en France, dit-il, ils ont éveillé "intérêt et préoccupation".
Je n'ai pas vu tellement de réactions, pour ma part, et elles sont généralement neutres, de la part des médias généralistes (catégorie dans laquelle je ne range pas certains journaux habitués à la provocation), ce qui ne laisse pas d'inquièter - au moins d'indiquer une volonté de banaliser, voire d'ignorer, la voix du Pape.
Comme en témoigne ce court article lu sur le Figaro.

Erwann Binet, député PS et rapporteur du projet de loi sur le mariage homosexuel, a estimé aujourd'hui qu'il n'y avait "pas lieu de polémiquer" sur les propos de pape Françoisencourageant les parlementaires français à "amender ou abroger" les lois si nécessaire, les jugeant "soft".
"Il n'y a pas lieu de polémiquer (...), les propos du pape sont bien plus soft, ai-je envie de dire, que certains de ceux que nous avons pu entendre ces derniers mois dans notre pays, y compris par des représentants de l'Eglise", a déclaré l'élu isérois, interrogé par BFM-TV. Selon le parlementaire, qui ne se trouvait pas dans la délégation reçue par François, le pape "n'a même pas cité le mariage pour tous, je crois qu'il n'y a pas de provocation de sa part".

Si c'est lui qui le dit...

Certes, nous avons l'habitude de la mauvaise foi des journalistes et des hommes politiques, subvertissant les paroles du Pape et n'en retenant (comme le rappelle ci-dessous don Mangiarotti) que ce qui croise leur propre agenda: qu'on se rappelle le fameux angélus où Benoît XVI aurait demandé à Nicolas Sarkozy d'accueillir généreusement les Roms (cf. benoit-et-moi.fr/ete2010). Mais il n'est jamais arrivé durant le Pontificat de Benoît XVI, que l'on montre une telle indulgence pour le Pape, sur un sujet où il est frontalement en désaccord avec les lois du monde.
Je n'ai évidemment aucun doute que François visait la loi Taubira. C'était transparent, mais pas noir sur blanc, et les médias ont bien compris le message. Il a manifestement fait le choix du non-interventionisme, contrairement à Benoît XVI, qui ne craignait pas de mettre les points sur les "i", car il pensait - selon moi à juste titre - que c'est au Pape de donner l'exemple.
L'avenir dira si la stratégie de François est la bonne, ou si elle conduit à un repli, voire un effacement culturel, de l'Eglise.

     

Abroger les lois
http://www.culturacattolica.it/
Don Gabriele Mangiarotti
16 Juin, 2013

«Votre tâche est certes technique et juridique, et consiste à proposer des lois, à les amender, ou même à les abroger» a dit le Pape François à la délégation de parlementaires français du groupe d'amitié France-Saint-Siège. Et qui sait pourquoi ces mots semblent tombés dans l'oreille d'un sourd, au moins ici en Italie. Parce qu'apparemment, en revanche, en France, ils ont suscité intérêt et préoccupation.
Cela me semble maintenant le problème auquel est confronté l'enseignement de l'Eglise: on cite seulement ce qui est selon ses propres idées, sa propre conception, ses propres intérêts, et ainsi, ce qui est affirmé est édulcoré (ou supprimé) en fonction de l'interprète.

Dans la situation concrète, il me semble qu'il y a deux points à mettre en évidence, sur ce que le Pape François a dit clairement:

1. Tout d'abord, nous sommes confrontés à un magistère qui ne se conçoit pas comme isolé, sans histoire. Le fait même de vouloir publier une encyclique (celle sur la foi) qui est le résultat d'un travail commun avec son prédécesseur, indique que le Pape François a fait sienne la position «catholique»: l'herméneutique de la continuité. En ce sens - et en ce qui concerne l'engagement des chrétiens dans la vie politique - la continuité implique la prise en charge de la doctrine sociale chrétienne comme la référence normative ultime.

2. Le pape François, d'un côté connaît la situation sociale, culturelle et politique des interlocuteurs (ici, la France de Hollande et Taubira) et de l'autre, il sait que la responsabilité de la présence politique revient aux laïcs, à qui il s'adresse. En ce moment, je ne pense pas que les lois auxquelles il se réfère sont des lois marginales, par exemple sur la taille des panneaux routiers. Nous savons tous que des millions de Français ont manifesté contre l'introduction du «mariage pour tous». Il est donc impensable que le Pape n'ait pas eu à l'esprit, entre autres choses, ce «monstre» de loi.

Je crois que c'est le devoir des catholiques, en particulier ceux qui travaillent dans le domaine magnifique de l'information, de contribuer à ce que l'enseignement intégral du Pape soit connu. Le monde laïco-laïciste se charge déjà assez de fausser ou de censurer ce que le pape, avec sa douceur et sa clarté, veut communiquer. Bougeons-nous, secouons-nous de la torpeur d'aquiescer à tout!

Une fois de plus, il est clair que la tâche qui nous est confiée par le Seigneur, si exigeante en ces moments dramatiques, n'a pas besoin de déserteurs, mais d'hommes passionnés et créatifs.
Et voici une citation plus récente: «Le but de l'économie et de la politique, c'est le service de l'humanité, à commencer par les plus pauvres et les plus vulnérables, partout où ils se trouvent, y compris le ventre de leur mère».
N'est-ce pas clair?