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Complot (3)

et la lettre de Jeannine (20/6/2013)

Cf/
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Chère Béatrice,

Je vous rejoins pour parler d'Arte. Je n'ai pas regardé l'émission mais j'ai visionné hier l'enregistrement effectué par mon mari.

Le titre est racoleur : " Le calvaire de Benoît XVI " mais préfigure bien de ce que l'on va trouver pendant ces 55 minutes d'accusations et d'autosatisfaction de la part de Gianluiggi Nuzzi. Pour moi calvaire implique : souffrances, échecs, déceptions, trahisons mais exclut : joie, satisfaction, réussite , donc sur ce plan-là pas de surprise. Ceux qui l'ont suivi en espérant une démolition systématique de Benoît XVI mais aussi de l'Eglise n'auront pas été déçus. Tous ceux qui ont mis des obstacles sur le parcours de ce pape "incompétent", que ce soit des évêques, des cardinaux, des laïcs mal intentionnés, tous ces traîtres ont certes nui à Joseph Ratzinger devenu, par la grâce de Dieu, le pape Benoît XVI mais ont trahi par la même occasion cette Eglise qu'il sont censés aimer, servir et qui les fait vivre matériellement. Une expression populaire " la reconnaissance du ventre " s'applique aussi à ceux qui sont censés posséder une certaine élévation intellectuelle et surtout spirituelle.

Je savais que cette émission à une heure de grande écoute serait uniquement à charge et elle aurait pu être pire. J'gnore les émissions radio mais je pense qu'elles contiennent des outrances verbales, des critiques acerbes, des vulgarités qui nous ont été épargnées. Je n'ai pas suivi, l'automne dernier la série "Ainsi soient-ils" malgré les chaudes recommandations d'une relation de passage en France donc je ne peux pas juger. Je me méfie des thèmes, des séries traitant de sujets de société, présentant de nombreux témoignages soigneusement triés par leurs concepteurs pour refléter l'air du temps et l'orientation qu'ils veulent donner à leurs émissions. On me rétorquera que je rate ainsi de nombreuses occasions de compléter mes connaissances mais, pour moi, mieux vaut ignorer que d'être manipulée par une information non objective. Cette position très tranchée est valable pour tous les domaines. Pour les téléspectateurs désireux de maintenir leur position hostile à l'Eglise, il n'y a pas eu tromperie. Si l'inverse s'était produit : un autre miracle, je me serais inquiétée.

Que vous soyez choquée par l'absence totale du rappel des moments joyeux, festifs, émouvants, m'étonne. L'émission n'avait pas pour but de retracer huit années de pontificat mais bien d'étayer tout ce qui s'apparente à une manœuvre pour se "débarrasser" de ce pape inapte, dérangeant parce que trop épris de Vérité et pour discréditer l'Eglise surtout à un moment où elle bouge beaucoup.

G. Nuzzi a cherché jusqu' au bout à se faire adouber pour avoir rendu un fier service à l'Eglise en décortiquant, avec une véritable délectation, une grande minutie, toutes ses insuffisances. Rien de mieux qu'un téléfilm pour le remettre en selle et reparler de sa production littéraire. J'ai mieux réalisé l'ampleur de cette fuite de documents à tel point que je me demande s'il n'y en a pas d'autres en réserve, idée que j'avais formulée au début de l'affaire. Comment peut-on se salir à ce point et atteindre un tel degré d'abjection?

Je lui suis reconnaissante néanmoins d'avoir signalé que Jean-Paul II, le grand pape, a laissé un lourd héritage de non-dits à son successeur et d'avoir ajouté, même si c'est pure hypocrisie, qu'il préférait Benoît XVI. Le journaliste italien n'a pas été à charge non plus. Le cardinal Tauran est un fin et discret diplomate, le cardinal Poupard est retiré des affaires et apprécie beaucoup ,il me semble, d'être sollicité pour s'exprimer. Tous les cardinaux n'ont pas l'élévation d'esprit de Benoît XVI et n'ont pas reçu cet appel si beau mais si particulier à se consacrer à la prière dans l'isolement, une autre forme de leur service à l'Eglise. Peter Seewald a été quelconque mais il aurait été autre s'il s'était agi de parler du pontificat en général. Ainsi qu'il le dit le clash du majordome indélicat n'a pas déstabilisé Benoît XVI qui s'est trouvé devant une situation tout bonnement incompréhensible pour lui, inenvisageable par lui. Cependant ce journaliste allemand aurait dû, par délicatesse, ne pas donner de précisions sur les problèmes physiques liés à l'avancée en âge mais il possède les mêmes travers que ses confrères. Les autres intervenants sont pratiquement des inconnus pour moi et ils n'ont guère eu le temps de s'exprimer.
Le reportage était une "pub", une ode au génie de Nuzzi, , qui ne comprend pas pourquoi le nouveau pontificat ne souhaite pas bénéficier de ses bonnes intentions à l'égard de l'Eglise; ne pas apprécier une telle valeur, une telle plume, quelle ingratitude!! D'ailleurs il ne s'est pas découragé pour si peu, et, si j'ai bien compris, il fera une autre tentative d'incursion plus tard.

Je n'ai pas poursuivi mes investigations pour les cent jours du pape François. Je ne sais ce que ce documentaire a pu apporter de plus car les informations les plus diverses, d'origines très différentes, les écrits qui sont livrés avec une certaine profusion, se résument tous pour moi en un portrait établi dès le premier soir et qui s'est affiné au cours des premières semaines. Maintenant le modus vivendi paraît bien établi et accepté de plus ou moins bon cœur. Visage débonnaire avec un large sourire, gestes amples, très simples depuis la papamobile, grande facilité pour embrasser, joyeuse proximité avec la foule des admirateurs qu'il côtoie de près, comme il le faisait en Argentine, le type du bon vivant. L'homme est proche des faibles, des personnes âgées, chaleureux, s'inquiétant par exemple auprès d'un garde suisse en exercice de son état de fatigue. Quand je pense au Père Lombardi qui a de suite réagi à l'évocation d'une possible encyclique qui serait signée par le Pape François, j'avoue avoir bien ri lorsque j'ai lu que c'était François qui annonçait lui-même prendre l'affaire en main et la faire aboutir avec la double signature Benoît XVI et François, le tout accompagné d'un qualificatif élogieux sur le travail de son prédécesseur.
Il est plein d'attentions pour lui, il a beaucoup de qualités humaines qui me manquent totalement mais il me déconcerte. Le fossé entre lui et moi est énorme : il est le feu et moi la tiédeur. Il vit comme à Buenos-Aires et doit penser qu'un évêque, quand bien même serait-il celui de Rome, ne doit pas être coupé de ses prêtres, de ses fidèles. Cette proximité est vitale pour lui. Il a bien précisé qu'il ne voulait pas faire le pape, alors!! Les foules sont présentes, nombreuses, enthousiastes, mais il va lui falloir transformer ce départ fulgurant en quelque chose de solide reposant sur des réformes réclamées, attendues et conformes à ce qui est espéré. La rentrée en octobre verra bouger les lignes. Rien n'a changé dans les postes clés, tout est dans l'expectative mais le jour où sa réforme sera prête l'annonce en sera brutale; c'est dans sa façon d'exercer sa fonction pour mieux servir, selon ce qu'il ressort de différents témoignages à son sujet; alors le consensus subira peut-être des fluctuations. Les promus seront ravis car sous l'amour de l'Eglise et le désir de mieux la servir il y aura la satisfaction très humaine d'avoir été remarqués, distingués par le grand patron. Pour ceux qui laisseront la place, il y aura la sensation désagréable d'être dépossédés d'une fonction et de devoir quitter un milieu élitiste, un sentiment d'injustice, la déception d'être remplacés par "des" qui sont moins bien qu'eux. C'est l'éternel refrain qui accompagne les jeux de chaises dans les multinationales.
Une religieuse italienne de Milan avec qui je discute , par téléphone, à bâtons rompus et qui connaît fort bien mes réticences pour cette nouvelle façon d'être pape , essaye de me convaincre que cette nouveauté est celle réclamée par les jeunes qui sont l'avenir de l'Eglise. Nos entretiens sont animés et pleins de bonne humeur, des moments de détente. J'ajoute que c'est elle qui m'a demandé si j'avais remarqué que François ne lève plus le pouce pour saluer lors des bains de foule; incapable de répondre, il va falloir que je me renseigne.

Nul ne connaît les véritables raisons de la décision prise par Benoît XVI mais je pense qu'il ne regrette rien et d'ailleurs que pourrait-il regretter: rien ne lui aura été épargné !!. Je lui voue une affection et une admiration sans bornes et ce n'est pas de l'aveuglement de ma part. Je suis en train de regrouper, année par année, les catéchèses, de vrais bijoux, que je complète par des évaluations d'ambiance et de nombre de participants que je trouve dans les comptes-rendus de Zenit. Je me régale et je revis des rencontres privilégiées, avec le temps les moments forts perdent un peu de leur intensité car d'autres plus récents viennent s'ajouter.

Jeannine