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Deux poids deux mesures

Les "vacances" de François, et celles de Benoît XVI (16/7/2013)

     

L'engouement médiatico-populaire autour du Pape François ne faiblit pas; bien au contraire, la visite à Lampedusa l'a fait redoubler, et la petite journée qu'il a passée à Castelgandofo le 14 juillet a été une apothéose, bien relayée par les vaticanistes, presque tous atteints de françoismania furieuse, et de stupeur amnésique concernant les huit années précédentes, sans qu'aucune raison objective ne vienne pour l'instant justifier leur enthousiasme.

Voici par exemple ce qu'on pouvait lire sur La Stampa hier:

François, un été de travail, et il renonce à Castelgandolfo
Un seul voyage pour le pape: au Brésil, pour les JMJ, puis le mois d'août, il sera au Vatican


Giacomo Galeazzi
Une brève visite à Castelgandolfo hier matin, une autre pour Ferragosto (15 août). A l'exception du voyage au Brésil pour les JMJ, fin juillet, ce sera entièrement un été de travail, que celui de François. Un choix, en ligne avec le climat général d'austérité: beaucoup de fidèles ne partiront pas en vacances, et le Pape non plus ne bougera pas de sa chambre (!!) à la résidence sainte Marthe: il poursuivra les rencontres, et continuera à projeter la réforme radicale de la Curie Romaine qui verra le jour début octobre...

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En lisant cela, je n'ai pu m'empêcher de penser aux commentaires allant de l'insinuation à la menace qui ont accompagné chaque congé estival de Benoît XVI. Chaque maigre congé, devrait-on dire. Alors que chacun d'entre eux a été l'occasion de la préparation d'exigeants voyages à l'étranger (JMJ de Cologne, de Sidney, de Madrid, voyages en Allemagne, Angleterre, etc.), sans parler de la rédaction d'encycliques, et surtout de l'achèvement (inimaginable!) de sa trilogie sur Jésus de Nazareth. Bref, contrairement à JP II, c'étaient tout, sauf des vacances de farniente.
Mais tout était bon pour le dissuader de s'"évader" (de façon d'ailleurs toute relative, chaque vacance étant ponctuée de multiples engagements avec les populations locales, spectacles folkloriques, rencontres avec tel et tel groupe, celle, habituelle et très longue avec le clergé local, et surtout, les angelus dominicaux maintenus). Au point qu'il a fini par choisir de rester à Castelgandolfo, pour faire taire les critiques (et pas forcément à cause de ses problèmes cardiaques, comme on l'a prétendu).

Je n'invente rien; voici un exemple "documenté":
En juillet 2007, donc deux ans après l'élection, Benoît XVI passait une petite quinzaine à Lorenzago di Cadore, dans les Dolomites. Pas forcément par goût, mais pour honorer JP II, qui s'y était lui-même rendu à deux ou trois reprises, et pour lequel avait été aménagée une maisonnette dans un parc, propriété du diocèce - et non une résidence fastueuse! Des vacances de moine, littéralement, dans un cadre naturel magnifique, certes, mais dans un village pauvre et à l'écart de tout (et sans doute privé de ressorces touristiques). Je le sais, j'y étais.
Or, voilà ce que cela devenait dans les colonnes d'un journal depuis lors défunt, reprenant une information qui figurait aussi dans Le Monde:

(Feu) France-Soir, octobre 2007

http://www.francesoir.fr/
Benoît XVI n’a pas fait vœu de pauvreté
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« Cher pape, ça ne va pas. »
Voici comment commence la lettre ouverte du prêtre italien Armando Trevisiol (*), publiée dans le journal italien L’Unita. Le coût du séjour du pape dans les Dolomites, dans le nord-est de l’Italie, en abasourdit plus d’un. Un « privilège de caste », selon le prêtre de la paroisse de Carpenedo, près de Venise. « Quand tu te regardes dans la glace, ton visage doit être celui du Christ sur terre […] mais comment durant de telles vacances peux-tu ressembler à Jésus, mon maître comme le tien, qui n’avait même pas une pierre pour poser sa tête ? », dénonce le prêtre.

Fastueuses vacances
Benoît XVI n’a effectivement pas lésiné sur les moyens : du 9 au 27 juillet dernier, sa superbe (!!!) retraite à Lorenzago di Cadore, dans les Dolomites, aurait coûté 1 million d’euros pour aménager et sécuriser les lieux. Le détail qui fâche d’autant plus le prêtre ? La note a été réglée par la région de Venise, soit par le contribuable transalpin. « Trop de tes fils ne vont pas en vacances pour que tu puisses te permettre des vacances de 2 milliards », s’indigne le prêtre qui, comme de nombreux Italiens, compte toujours en lires lorsqu’il s’agit de sommes importantes. ... Le temps dira si les retombées touristiques de la visite pontificale dans la région justifient le coût exorbitant de son séjour.

Capture d'écran Google, 17 octobre 2007

La dépêche de l'AFP du 16 octobre 2007:
Il n'y a pas que l'Etat français qui doit revoir ses dépenses à la baisse, l'édition du "Monde" de ce soir nous informe qu'un prêtre italien de la région de Venise, Armando Trevisiol, curé de Carpenedo, a écrit une lettre ouverte (publiée hier dans "L'Unità") au Saint-Père lui demandant de réduire son somptueux train de vie.
....
Mais qu'a donc fait Herr Ratzinger pour être ainsi mis en cause par un pauvre curé de campagne ? Il a passé du 9 au 27 juillet dernier de fastueuses vacances à Lorenzago di Cadore, dans les Dolomites. Prix de cette superbe retraite : la bagatelle d'un million d'euros, payés par la Région de Venise, donc par le contribuable transalpin. Effectivement, on comprend la colère du curé de Capenedo...

Un honteux tissu de mensonges, que j'avais déjà essayé de démonter point par point à l'époque, ici: benoit-et-moi.fr/2007/

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Si donc Benoît XVI avait décidé de passer ne serait-ce qu'une quinzaine cet été à Castelgandolfo, je n'ose imaginer ce qu'on aurait entendu!
Et pourtant, cela n'aurait rien retiré à personne, bien au contraire. Pas plus que la présence ou l'absence de François. Les Villas pontificales existent de toutes façons, et sont le principal employeur de la région.

Mais tout ce que fait François est enthousiasmant, tout ce que faisait Benoît était mauvais par antonomase.
Sa démission n'a pas réduit ses ennemis au silence, elle n'a rien changé.
Au point que je me demande s'il n'est pas, d'une certaine façon, "prisonnier" dans "il recinto di Pietro".

Quant à François, ses thuriféraires des médias ne lui rendent pas service. On peut se demander si c'est calculé....

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