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Le Rabbin Bernheim

Réflexions personnelles en marge d'une affaire : le " conseiller du Saint-Père" a franchi la ligne jaune (6/4/2013)

>>> Ci-contre: La Rabbin Bernheim est interviewé le 4 janvier 2013 dans "
La Croix"

     

Lu sur Le Figaro.fr

Non content d'avoir plagié son dernier ouvrage, le Grand Rabbin de France, Gilles Bernheim, ne serait pas agrégé de philosophie. Pourtant, ses biographies l'affirment, ainsi que son dernier ouvrage.

Gilles Bernheim, souvent salué pour sa stature intellectuelle, présenté comme «philosophe», avait notamment publié en 2008 un livre cette année avec le cardinal Barbarin, où ils croisaient leurs réflexions sur les rites et croyances
(Article en entier ici)

     

En apprenant que le Rabbin Bernheim, sommité morale décrétée par les médias, avait été pris en flagrant délit de plagiat répété, puis de trucage de cv, avec l'attribution d'une agrégation de philosophie alors qu’il ne figure sur aucune liste de reçus archivées par la Société des Agrégés (listes consultées depuis 1968, Bernheim est né en 1952!), plusieurs réflexions me sont venues à l'esprit.
Je n’ai pas l’intention de m’acharner sur un homme à terre; ces réflexions ne sont nées que de l’association du nom de Barnheim à celui de Benoît XVI.
On se souvient en effet qu’au cours du traditionnel discours de vœux à la Curie, le 21 décembre 2012, Benoît avait rendu un hommage appuyé au Grand Rabbin de France (cf. benoit-et-moi.fr/2012(III)/la-voix-du-pape/voeux-a-la-curie-pour-la-famille)

• En premier lieu, cet article (benoit-et-moi.fr/2013-I/articles/le-pape-allie-objectif-du-rabbin) que j'avais écrit en décembre dernier, citant Sandro Magister.
Celui-ci écrivait en effet (chiesa.espresso.repubblica.it) :

À chaque fois que Benoît XVI s’exprime contre le mariage homosexuel, il est systématiquement assailli de critiques. Mais la dernière fois où il l’a fait - dans le discours qu’il a adressé comme chaque année à la curie avant Noël - il n’en a rien été. Tout le monde est resté silencieux.
C’est le grand rabbin de France, Gilles Bernheim, qu’il a cité pour appuyer ses thèses, qui a été pour lui un bouclier. Et personne, parmi ceux qui défendent des opinions opposées aux siennes, ne s’est senti prêt à prendre pour cibles à la fois une sommité du judaïsme européen et le chef de l’Église catholique.


Je m'étais trompée, Sandro Magister aussi, mais ces propos éclairent bien ce qui est en jeu ici.

• Suite à un billet de Jean Mercier sur la Vie, en date du 10/1/2013 ("Nos amis les juifs"), qui voyait en Gilles Bernheim "le mieux placé pour argumenter [contre le mariage homosexuel] au nom de la tradition biblique", on lisait beaucoup de commentaires très intéressants, dont ces deux-ci:

>>> Sans vouloir ôter quelque mérite que ce soit au texte de Gilles Bernheim, et notamment à sa présentation, j'ai bien cru y lire un décalque fidèle de celui publié quelque temps auparavant (septembre 2012) par le conseil Famille et société de la Conférence des évêques de France, qui fournissait bien davantage que les "éléments de langage" chers à tous les communicants.

>>> Selon Franck Jaoui, porte-parole du Beit Haverim, le grand rabbin de France Gilles Bernheim est l'auteur d'un texte de prise de position sur le mariage gay qui est un véritable « brulôt » à « caractère violemment homophobe », car le grand rabbin y traite les homosexuels en ennemis, en mettant en oeuvre une rhétorique guerrière (Le Monde). Par ailleurs, Ron Naiweld et Yaara Alon pensent que la posture de leader spirituel hiérarchique n'est pas conforme aux intuitions profondes du judaïsme rabbinique (Le Monde)

• Le rabbin, que je croyais intouchable, ne l'était donc pas. En se rangeant du côté des opposants au mariage pour tous (une position qui est loin de faire l'unanimité chez ses coreligionaires), il a commis une imprudence (puisqu'il n'était pas irréprochable) et s'est de facto trouvé dans le collimateur d'un lobby plus fort que lui. Sa vanité, qui l'a fait s'ériger en conseiller de l'Eglise en France, et pour finir, du Pape lui-même, lui est revenue comme un boomerang.

• On sait que le Saint-Père aime nourrir sa réflexion de ses lectures, y compris les plus récentes. Et il lui arrive d'en faire le point de départ de ses discours. C'est ce qui s'était passé par exemple lors du fameux discours de Ratisbonne, lorsqu'il avait cité la fatale conversation entre l'empereur byzantin Manuel II Paléologue (1) et le perse cultivé, qui avait enflammé le monde musulman... après l'intervention soigneusement calculée d'agences de presse basées à New York.
Question: qui a mis cette fois sur la table de Benoît XVI le livre du Rabbin? Serait-ce les évêques français, qui venaient de faire leur visite ad limina? Evidemment, l'argumentaire était excellent, et le Saint-Père qui lui n'est pas un faussaire, et qui, comme tous les vrais universitaires, cite toujours scrupuleusement ses sources, avait toutes les raisons de l'utiliser, en le rendant à son auteur.

• Le rabbin s'est attribué une agrégation qu'il n'a semble-t-il jamais réussie... L'agrégation (un concours en principe de recrutement de professeurs de l'enseignement secondaire - rappelons-le, et même si aujourd'hui beaucoup d'agrégés enseignent en classes préparatoires... ou "pantouflent" ailleurs) est certes un concours difficile - j'en suis moi-même titulaire, pour de vrai!! - mais il faut quand même admettre que chaque année les listes de reçus sont longues, et les lauréats ne se retrouvent pas tous promus au rang d'autorités morales ou de conseillers de l'Eglise.... C'est sans doute la raison pour laquelle le rabbin s'était paraît-il bombardé "major" de sa promotion... Quand on a la bouche ouverte....

• Finalement - et c'est le plus troublant - le Rabbin se trouve cloué au pilori pour avoir fait une bonne action, parmi d'autres, plus discutables, pour lesquelles il était unanimement encensé.

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Note
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(1) "Tout cela m'est revenu à l'esprit quand, tout récemment, j'ai lu la partie, publiée par le professeur Théodore Khoury (de Münster), du dialogue sur le christianisme et l'islam et sur leur vérité respective, que le savant empereur byzantin Manuel II Paléologue mena avec un érudit perse, sans doute en 1391 durant ses quartiers d’hiver à Ankara" (Discours à l'Université de Ratisbonne, 12 septembre 2006 )