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Le "signe" du Cardinal Schönborn

Andrea Tornielli mentionne une anecdote lue dans The Telegraph: selon le cardinal Schönborn, le Pape François aurait été élu après une série de «signes» surnaturels au Conclave (16/5/2013)

L'article original en anglais est ici: www.telegraph.co.uk
Extrait:
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Le Cardinal Christoph Schönborn, archevêque de Vienne, qui était lui-même largement cité comme un possible successeur au pape Benoît, a déclaré qu'il avait personnellement eu deux «signes forts» que le cardinal Jorge Mario Bergoglio serait «l'élu» du vote à venir.
Il a dit que seule une intervention divine peut expliquer la rapidité avec laquelle le cardinal argentin - qui ne figurait pas dans les principales listes de papabili compilées par des experts du Vatican - a été élu.
S'expriment à une conférence anglicane à Londres, il a également déclaré l'archevêque de Canterbury, le Révérendissime Justin Welby, avait une «étrange similitude» avec le nouveau pape.
Il a dit que les deux élections étaient un «petit miracle» et un «signe du Seigneur» et que les deux églises devraient œuvrer à plus d'unité.
S'adressant à un auditoire de 5000 personnes dans le Royal Albert Hall, lors d'une conférence organisée par la Holy Trinity Brompton Church, dans l'ouest de Londres, il a dit qu'il était certain que le soir du 12 Mars, quand le conclave a commencé, aucun des cardinaux ne savait qui serait choisi.

«Ce fut une formidable expérience de l'Esprit Saint», a-t-il dit.
«Nous avons été conduits par l'Esprit Saint à cet homme - il était assis dans le dernier coin de la Chapelle Sixtine: Cet homme, il est l'élu».
Il a ajouté: «J'ai reçu au moins deux signes forts: l'un que je peux dire, l'autre était durant le Conclave, je ne peux pas en parler - mais de véritables signes du Seigneur me donnant l'indication "c'est lui" ».
Le Cardinal a dit que juste après une messe spéciale avant que le conclave ne commence, il a rencontré un couple de latino-américains de ses amis.
Il raconte: «Je les ai rencontrés à l'extérieur de la basilique et je leur ai demandé: "Vous avez l'Esprit Saint (??), pouvez-vous me donner des conseils pour le conclave qui va commencer dans quelques heures?". Et la femme m'a dit à l'oreille "Bergoglio", et cela m'a vraiment frappé: si ces gens disent Bergoglio, c'est une indication de l'Esprit Saint... Et je suis sûr que beaucoup d'entre nous ont reçu des signes similaires lors du conclave, sinon il n'aurait pas été possible d'avoir cette élection si tôt et si rapidement».

Commentaire

Bien entendu, je ne peux pas écarter l'intervention de l'Esprit Saint dans l'élection du Pape (1), mais il y a plusieurs choses qui me gênent, dans cet article.
D'abord, je me souviens qu'au lendemain du 19 avril 2005, le cardinal Schönborn avait eu, au micro de KTO, des mots vraiment beaux sur Benoît XVI... mais il n'avait pas évoqué l'Esprit Saint, ni parlé de "signes" (cf. http://beatriceweb.eu, cela vaut aussi la peine de réécouter en particulier la fin de l'interviewe, où le journaliste parle de "la campagne de presse négative": schonborn0001.wmv ). Et pourtant, l'élection avait été encore plus rapide que celle du 13 mars dernier.
Second point, les listes de papabili des "experts" du Vatican, évoqués ici pour justifier la surprise (pour qui?) de l'élection, ne sont rien d'autres que du pipeau, et l'on peut supposer que les cardinaux ne les consultent pas, ou du moins qu'elles n'ont pas d'influence sur leur choix.
Tertio, les cardinaux avaient bien discuté entre eux durant les Congrégations générales précédant le Conclave, et certainement déblayé le terrain, ce qui explique la rapidité de l'élection. Cet argument avait d'ailleurs été mentionné par le même Schönborn dans l'interviewe du 20 avril 2005 citée plus haut.
Quatrième point, sans nier que "Dieu nous parle à voix basse" (dixit le cardinal Ratzinger, cf. beatriceweb.eu/Blog06), et souvent aussi dans les petites choses, le signe surnaturel "public" évoqué par le cardinal Schönborn me paraît en fait platement matérialiste... L'amie sud-américaine lui a sans doute simplement suggéré que le cardinal Bergoglio (un compatriote, par surcroît!) était son favori.
Enfin, je ne peux m'empêcher de penser que ces confidences représentent une forme de transgression du secret du conclave (pas au sens strict, certes, encore que...), s'inscrivant dans l'opération de promotion du Pape François actuellement menée par les médias... pour des raisons pas encore claires.

* * *

(1) Le 12 mars dernier, juste avant le début du Conclave, l'Avvenire rapportait une réponse que fit (avec son humour très pince-sans-rire que peu ont perçu) en 1997 le cardinal Ratzinger à la question:
«Est-ce l'Esprit Saint, le responsable de l'élection du Pape?»

«Je ne dirais pas cela, dans le sens que ce serait l'Esprit Saint qui le choisirait. Je dirais que l'Esprit Saint ne prend pas exactement le contrôle de la question, mais en bon éducateur qu'il est, il nous laisse beaucoup d'espace, beaucoup de liberté, sans nous abandonner complètement. Ainsi, le rôle de l'Esprit Saint devrait être compris d'une façon plus "élastique", non pas que ce soit lui qui dicte le nom du candidat pour lequel un (électeur) doit voter. Probablement, l'unique sécurité qu'il nous offre, c'est que la chose ne peut pas être complètement "ruinée". Il y a trop d'exemples de papes que l'Esprit Saint n'aurait évidemment pas choisis»

Il est donc d'autant plus important - concluait l'article - de prier pour que les cardinaux électeurs se laissent illuminer par l'Esprit Saint - et pas dicter leur vote .