Accueil | D'un Pape à l'autre | Retour au Vatican | Collages de Gloria | The hidden agenda | Lumen Fidei | Lampedusa | Benoît et les jeunes

Benedetto Papa

Au lendemain de la démission, voici un très bel article de don Angelo Busetto (1) curé à Chioggia, en Vénétie (6/6/2013)

     

Benedetto Papa…
http://www.nuovascintilla.com

(Jeu de mot, que l'on pourrait traduire par Benoît Pape ou Pape béni)
-----
Comme beaucoup, peut-être comme tous, je suis resté sans voix. Le désarroi, et même l'égarement, devant le Pape qui déclare se retirer, a été total, et pendant de nombreuses heures, et ne m'a permis aucun commentaire qui ne soit la répétition de quelque lieu commun..
Puis s'est affirmé avec de plus en plus d'évidence le sentiment d'une perte, comme quelqu'un qui a été habitué dès l'enfance à avoir sous les yeux la figure paternelle du Pape. La solennité hiératique de Pie XII, l'amabilité pleine d'audace de Jean XXIII, l'intelligence et la décision de Paul VI, la simplicité de Jean Paul I, l'impétuosité multiple de Jean Paul II et l'humanité exquise de ce Pape, Benoît XVI.
Avec chaque Pape, aux différents moments de la vie, une sorte d'identification, non seulement autour des contenus et des modalités de la fonction papale, mais aussi par une appréciation du style personnel de chacun.
Un Pape, un nom: chaque Pape avec son nom, son visage, son âme.
Avec Benoît, un rapport spécial s'est sans aucun doute épanoui. Bien avant qu'il ne soit Pape, je l'avais fréquenté comme théologien limpide capable d'entrer dans les questions de la modernité avec un regard à l'histoire déroulé dans une exposition fluide et sereine; un théologien que l'on pouvait lire avec une aisance immédiate, sanspeiner sur des concepts régressifs ou des phrases compliquées. J'en tirais de la satisfaction pour l'intellect, et une féconde ouverture pour l'expérience, dans la découverte de questions actuelles, ou dans la reprise de thématiques traditionnelles.
Lui affrontait tout à l'horizon d'une foi incarnée dans le temps, dans le contexte d'une raison ouverte et vivante.
Quand ce théologien est devenu Pape, son enseignement a été proclamé dans la barque de Pierre et depuis la rive de l'Eglise, rencontrant de folles attentes dans le monde entier, en particulier à travers les Angélus festifs, les homélies, les audiences du mercredi, les dialogues directs avec les enfants et les prêtres.
Le Pape Benoît s'est présenté, avec sa figure menue et joyeuse, décidée mais pas arrogante, et même avec son accent si caractéristique. Un homme timide, émerveillé (étonné?) de se trouver sur la place du monde, mais en même temps de "chercher Dieu" à l'imitation des moines, dans le silence. Un homme d'Eglise, qui aime Jésus, et reconnaît en Lui, pour soi et pour les autres, l'attractivité et le miroir de la félicité. Combien de fois ai-je noté qu'il disait avec profondeur et clarté les choses que j'aurais aimé dire, et celles que je n'aurais jamais imaginé penser et dire. J'étais tenté de transcrire des passages entiers de ses homélies, fixant ainsi des perles de concept et de langage.
A présent, j'ai presque l'impression qu'un grand trésor va être enterré, sans la possibilité de poursuivre l'annonce et le dialogue avec le monde. Ou peut-être s'agit-il d'une paternité devenue une semence qui en son temps, et comme le veut le Seigneur, pourra encore germer pour tous.

---

(1) Don Angelo Busetto, curé à Chioggia, en Vénétie, professeur de théologie dogmatique à Padoue, [et auteur de livres - non traduits en français: I giorni del prete (1995); Tracce di teologia (2003); Vita da prete (2005)] collabore à la Bussola, et j’ai déjà traduit plusieurs articles : http://tinyurl.com/kznghzg