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La liberté

Le cardinal Ratzinger répond à deux questions de Peter Seewald dans le livre-interviewe de 2000 (10/5/2013)

In Voici quel est notre Dieu, Edition Plon MAME, 2001, pages 65-66.

>>> Sur le thème de la liberté, voir aussi: La paternité de Dieu

     

La liberté
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- D’après l'enseignement chrétien, nos qualités sont des cadeaux de Dieu pour la vie. Pour que cela se passe bien pour nous. La liberté est-elle aussi une qualité ou est-elle, plutôt, une grâce de Dieu?

- Par « grâce » nous comprenons une attention de Dieu à l'homme. Par grâce, Dieu s'occupe de lui d'une manière nouvelle et spécifique et lui donne ce qui n'est pas déjà contenu dans la création. La liberté, en revanche, est constitutive de la structure originelle de la création, de l'existence spirituelle de l'homme. Nous ne sommes pas fixés et prédéterminés selon un modèle précis. La liberté est destinée à chacun en particulier pour qu'il élabore lui-même sa vie et que, par son oui intérieur, il puisse prendre le chemin qui corresponde à ce qu'il est. C'est dans ce sens que je ne dirais pas que la liberté est une grâce mais un don de création.


- On peut toutefois se demander ce que vaut cette liberté. Si l'on en fait un but et qu’on prend la liberté de faire ce qui déplaît à Dieu, on est puni pour l'éternité.

- Dans la Parole de Dieu, que signifie donc en réalité la punition ? Est-ce pour Dieu une façon de nous réprimander parce qu'il veut faire passer sa volonté propre ? Non, la punition est l'état où aboutit l'homme lorsqu'il s'écarte de ce qu'il est en profondeur. Par exemple, lorsqu'il tue quelqu'un. Ou s'il ne respecte pas la dignité d'un autre homme, s'il vit à l'encontre de la vérité et ainsi de suite. Il s'est servi de sa liberté mais il en a, en même temps, abusé. Il a détruit et foulé aux pieds ce en vue de quoi il a été créé, l'idée de son existence, et, par là, il se détruit lui-même.
Être libre signifie que j'accepte volontairement les possibilités de mon être. Cela ne se passe pas comme s'il n'y avait qu'à dire oui ou non. Car avant de dire non, j'ai une infinité de manières d'exploiter les possibilités du bien.
Penser que lorsqu'on dit non au mal on a déjà abdiqué sa liberté est une perversion de la liberté. La liberté ne trouve le grand espace où elle peut développer toute sa créativité que dans le domaine du bien. L'amour est créateur ; la vérité est créatrice : c'est seulement dans ce domaine que s'ouvrent mes yeux et que s’élargit ma connaissance.
Lorsque nous considérons la vie des grands hommes, des saints, nous voyons comment, au cours de l'histoire, ils ont fait apparaître de toutes nouvelles possibilités pour l'homme que quelqu'un d'ordinaire n'aurait jamais perçues. En d'autres termes, la liberté ne devient réellement efficace que si elle développe ce qui n'est pas encore découvert et qu'il est possible de découvrir dans le grand domaine du bien et élargit ainsi les possibilités de la création. Elle se perd si elle croit sa volonté propre confirmée uniquement dans la négation. J'aurai dans ce cas utilisé ma liberté, mais, en même temps, je l'aurai déformée.