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La voix de Benoît XVI

C'est la première fois que l'on peut réentendre la voix du Saint-Père émérite depuis le 28 février, c'est donc un moment rare, même s'il risque d'être peu médiatisé: RV en langue italienne propose une synthèse de l'homélie de la messe conclusive du Ratzinger Schülerkreis, et, dans le reportage audio, quelques bribes de cette voix (2/9/2013)

>>> L'image ci-contre est une archive...

Mise à jour: Raffa a déniché l'audio (en allemand).
Juste pour entendre sa voix: www.kathtube.com/player.php?id=32662

Dans un article inégal publié sur le site Il Sussidiario.net (qui prétend de façon aussi artificielle qu'arbitraire trouver chez Benoît l'écho de François), on peut lire ce commentaire:

Ce n'est pas la première fois que Benoît XVI, silencieusement, prend la parole dans la vie de l'Église. Mais cette fois, c'était différent. Parce que Ratzinger n'a pas parlé dans une conversation privée, ou dans une salle privée d'un Palais Sacré, et ses paroles n'ont été ni extorquées ni extrapolées par un invité bavard.

Le pape émérite, en effet, s'est exprimé à nouveau lors d'une messe quasi publique, conclusion du traditionnel colloque organisé chaque année à Castel Gandolfo entre les anciens élèves du théologien allemand que l'on a donc appelé «Ratzinger Schülerkreis».
Une fois terminé le sommet de Castel Gandolfo, auquel Benoît XVI n'a pas assisté, tous les illustres hôtes ont été reçus dans la chapelle du gouvernorat du Vatican où le 264e successeur de Pierre a célébré l'Eucharistie dominicale. Là, le pape allemand s'est trouvé face à l'Evangile que tous les prêtres catholiques de rite romain ont offert au peuple de Dieu pour le XXIIe dimanche du temps ordinaire: la parabole des invités au banquet, qui veulent immédiatement occuper les premières places, sans se soucier des places qui leur ont été assignées par le maître de maison, et l'invitation de Jésus à ne pas inviter à dîner ceux qui peuvent en quelque sorte rendre la pareille, supprimant ainsi l'authenticité et la gratuité de l'invitation. Et devant ces mots, Benoît, pour un moment, a montré à tout le monde que la symphonie que joue aujourd'hui le Pape François a été directement écrite par lui, l'homme noir des médias, le Bon Pasteur que chaque fidèle connaît comme celui qui a tant aimé son troupeau qu'il s'est mis en retrait pour que ce dernier soit opportunément guidé et gardé.
(...)

     

Le Pape émérite lors de la messe avec ses anciens élèves: La place juste pour nous est celle aux côtés du Christ qui descend pour servir
http://it.radiovaticana.va


Nous nous trouvons sur le juste chemin quand nous essayons de devenir des personnes qui "descendent" pour servir et apporter la gratuité de Dieu: telle est la synthèse de l'homélie prononcée par le Pape émérite dimanche (1er septembre) à 9h30 dans la chapelle du Gouvernorat, au Vatican, à l'occasion du Ratzinger Schulerkreis, le traditionnel séminaire estival de ses ex-élèves. La rencontre a eu lieu comme d'habitude à Castelgandolfo, mais Benoît XVI n'y a pas participé. Cette 38e édition a été dédiée à "La question de Dieu sur fond de sécularisation", à la lumière de la production philosophique et théologique de Rémy Brague, penseur français récompensé l'année dernière par le Prix Ratzinger.
Une cinquantaine de personnes ont participé à la messe concélébrée avec le Pape émérite par le cardinal Kurt Koch, le cardinal Christoph Schönborn, Georg Gänswein, l'archevêque Barthélémy Adoukonou, secrétaire du Conseil Pontifical pour la culture, et l'évêque auxiliaire de Hambourg Mgr Hans-Jochen Jaschke.

Voici la transcription du service audio de RV en italien. On peut y entendre la voix de Benoît XVI dans quelques bribes de l'homélie prononcée en allemand.
Ma traduction en français

     

Extraits de l'homélie

Chacun de nous veut trouver sa juste place. Mais quel est vraiment la juste place?
L'homélie de Benoît XVI dans la messe célébrée à l'occasion de la rencontre avec ses ex-élèves est, au fond, une réponse à cette question, et part de l'évangile du jour, dans lequel Jésus invite à prendre la dernière place. "Une place qui peut sembler très bonne peut se révéler être une place très mauvaise", remarque le Pape émérite, faisant allusion à ce qui s'est passé en ce monde, y compris dans les dernières décennies, où nous voyons comment "les premiers" ont été renversés et sont devenus "les derniers", et cette place qui semblait bonne était en fait "erronée". Même dans les discours qui se tinrent lors de la dernière Cène, les disciples se disputèrent pour les meilleures places. Jésus, en revanche, se présente comme "celui qui sert". Lui, "né dans l'étable", et "mort sur la Croix" nous dit - affirme Benoît XVI - que la place juste est celle auprès de lui, "la place selon sa mesure". Et l'apôtre, en tant qu'envoyé du Christ "est le dernier dans l'opinion du monde, et justement pour cela il est proche de Jésus:

Wer in dieser Welt und in dieser Geschichte vielleicht nach vorn gedrängt wird, …
Celui qui, en ce monde, et dans cette histoire, peut-être, est poussé en avant et arrive aux premières places, doit savoir qu'il est en danger; il doit regarder encore plus le Seigneur, se mesurer à Lui, se mesurer à la responsabilité pour l'autre, il doit devenir celui qui sert, celui qui dans la réalité est assis aux pieds de l'autre, et ainsi bénit, et à son tour devient béni.

Et donc, quelle que soit la place que l'Histoire voudra nous assigner, ce qui est déterminant - souligne le Pape émérite - c'est "la responsabilité devant Lui, et la responsabilité pour l'amour, pour la justice et pour la vérité". Dans l'Evangile d'aujourd'hui, le Seigneur rappelle que quiconque s'exalte sera humilié, et quiconque s'humilie sera exalté. Et Benoît XVI fait noter que "le Christ, le Fils de Dieu, descend pour nous servir, et c'est cela qui fait l'essence de Dieu", laquelle "consiste à se pencher vers nous: l'amour, le 'oui' à ceux qui souffrent, l'élévation à partir de l'humiliation"

Wir sind auf dem Weg Christi auf dem richtigen Weg, wenn wir als Er und wie Er …
"Nous nous trouvons sur le chemin du Christ, sur le juste chemin, si, à Sa place, et comme Lui, nous essayons de devenir des personnes qui 'descendent' pour entrer dans la vraie grandeur, la grandeur de Dieu, qui est la grandeur de l'amour".

Benoît XVI fait donc, dans l'homélie, une catéchèse sur le sens de l'abaissement du Christ et sur l'essence de l'amour de Dieu. "La Croix, dans l'histoire, est la dernière place" et "le Crucifié n'a aucune place, c'est une 'non-place', il a été dépouillé, "il n'est personne" et pourtant - remarque Benoît XVI - Jean, dans l'Evangile voit "cette humiliation extrême" comme ""la vraie exaltation".

Höher ist Jesus so; ja, Er ist auf der Höhe Gottes weil die Höhe des Kreuzes …
"Ainsi, Jesus est plus haut. Oui, il est à la hauteur de Dieu, parce que la hauteur de la Croix est la hauteur de l'amour de Dieu, la hauteur de la renonciation à soi-même et le dévouement aux autres. C'est cela, la place divine, et nous voulons prier Dieu pour qu'il nous donne de comprendre cela de plus en plus, et d'accepter avec humilité, chacun à notre façon, ce mystère de l'exaltation et de l'humiliation".

Enfin, le Pape émérite rappelle que Jésus nous invite à "inviter", sans tenir compte des avantages, c'est-à-dire à inviter les paralytiques, les éclopés, les pauvres, parce que Lui-même l'a fait en "nous invitant à la table de Dieu" et en nous montrant ainsi ce qu'est la gratuité. A juste titre, l'économie s'appuie sur la "justice commutative", sur le do ut des ("je te donne afin que tu me donnes"), mais même dans ce domaine, il reste quelque chose de gratuit, rappelle Benoît XVI, soulignant que "sans la gratuité du pardon, aucune société ne peut se développer", au point que les plus grandes choses de la vie, c'est-à-dire "l'amour, l'amitié, la bonté, le pardon... nous ne pouvons pas les payer, elles sont gratuites, de même que Dieu nous donne gratuitement":

So dürfen wir, mitten in allem Ringen für die Gerechtigkeit in der Welt, nie vergessen …
"Ainsi, même dans la lutte pour la justice dans le monde, nous ne devons jamais oublier la 'gratuité' de Dieu, le constant 'donner' et 'recevoir', et nous devons construire sur le fait que le Seigneur nous donne, qu'il y a des personnes bonnes qui nous donnent 'gratis' leur bonté, qui nous supportent à titre gratuite, nous aiment et sont bonnes avec nous 'gratis'; et puis, à notre tour, donner cette 'gratuité' pour rapprocher ainsi le monde à Dieu, pour devenir semblables à Lui, pour nous ouvrir à Lui".

Et puis, Benoît XVI s'arrête sur la liturgie, sur l'humilité de la liturgie chrétienne qui est en même temps incommensurablement grande parce qu'elle nous unit à l'armée des anges et des saints dans la joie festive de Dieu. Et le sang du Christ, qui est au centre de l'Eucharistie, signifie vraiment "entrer dans la splendeur du rassemblement joyeux de Dieu": "Ce sang est son amour - conclut Benoît XVI - il est la Montagne de Dieu, et il nous ouvre à la gloire de Dieu".

     

Evangile du jour

(Lc 14, 1a.7-14)

Un jour de sabbat, Jésus était entré chez un chef des pharisiens pour y prendre son repas. Remarquant que les invités choisissaient les premières places, il leur dit cette parabole :
« Quand tu es invité à des noces, ne va pas te mettre à la première place, car on peut avoir invité quelqu'un de plus important que toi.
Alors, celui qui vous a invités, toi et lui, viendrait te dire : 'Cède-lui ta place', et tu irais, plein de honte, prendre la dernière place. Au contraire, quand tu es invité, va te mettre à la dernière place. Alors, quand viendra celui qui t'a invité, il te dira : 'Mon ami, avance plus haut', et ce sera pour toi un honneur aux yeux de tous ceux qui sont à table avec toi.
Qui s'élève sera abaissé ; qui s'abaisse sera élevé. »

Jésus disait aussi à celui qui l'avait invité : « Quand tu donnes un déjeuner ou un dîner, n'invite pas tes amis, ni tes frères, ni tes parents, ni de riches voisins ; sinon, eux aussi t'inviteraient en retour, et la politesse te serait rendue.
Au contraire, quand tu donnes un festin, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles ; et tu seras heureux, parce qu'ils n'ont rien à te rendre : cela te sera rendu à la résurrection des justes. »