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Le silence de Dieu

Grâce à Raffaella, nous pouvons revoir sur Youtube une partie de l'extraordinaire échange du pape avec les jeunes, en septembre 2007, à Loreto. (13/8/2013)

>>> Une autre partie était consacrée à l'un des thèmes de prédilection du Pape François: celui des "Périphéries".
>>> A propos de Loreto, voir aussi: Quand Benoît parlait aux jeunes

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Voici donc la video, et la transcription officielle sur le site du Vatican: on oubliera le style de la mise en scène, et le caractère factice des questions, dont il a par ailleurs été question dans ces pages (cf. Le Pape 'a braccio', et les jeunes acteurs).

>>> Lien direct sur le site de Raffa: http://ilblogdiraffaella.blogspot.it/2013/08/benedetto-xvi-parla-ad-una-ragazza-del.html

Question:
"Je crois en Dieu qui a touché mon cœur, mais les peurs, les questions, les craintes que je porte en moi sont très nombreuses. Il n'est pas facile de parler de Dieu avec mes amis; beaucoup d'entre eux voient l'Eglise comme une réalité qui juge les jeunes, qui s'oppose à leurs désirs de bonheur et d'amour. Devant ce refus, je ressens toute ma solitude d'être humain et je voudrais ressentir la proximité de Dieu. Votre Sainteté, dans ce silence, où est Dieu?".


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La réponse du Pape:
Oui, nous tous, même en étant croyants, nous connaissons le silence de Dieu.
Dans le Psaume que nous venons de réciter, il y a ce cri presque désespéré: "Parle Dieu! Ne te cache pas!" et un livre vient récemment d'être publié avec les expériences de Mère Teresa et l'on constate ce que nous savions déjà avec plus d'évidence encore: même avec toute sa charité, sa force de foi, Mère Teresa souffrait du silence de Dieu.
D'un côté, nous devons supporter ce silence de Dieu également pour pouvoir comprendre nos frères qui ne connaissent pas Dieu.
De l'autre, avec le Psaume, nous pouvons toujours à nouveau crier à Dieu: "Parle, montre-toi!".
Et sans aucun doute, dans notre vie, si notre cœur est ouvert, nous pouvons trouver les grands moments dans lesquels la présence de Dieu devient réellement sensible pour nous également.
Je me souviens en ce moment d'une petite histoire que Jean-Paul II raconta au cours des Exercices spirituels qu'il prêcha lorsqu'il n'était pas encore Pape. Il raconta que, après la guerre, un officier russe qui était scientifique lui avait rendu visite: "Je suis sûr que Dieu n'existe pas. Mais si je me trouve en montagne, devant sa majestueuse beauté, devant sa grandeur, je suis également sûr que le Créateur existe et que Dieu existe".
La beauté de la Création est l'une des sources où nous pouvons réellement toucher du doigt la beauté de Dieu, nous pouvons voir que le Créateur existe et qu'il est bon, que ce que les Saintes Ecritures disent du récit de la Création est vrai, c'est-à-dire que Dieu a pensé et fait avec son cœur, avec sa volonté, avec sa raison, ce monde, et il l'a trouvé bon.
Nous aussi nous devons être bons, pour avoir le cœur ouvert à percevoir la véritable présence de Dieu.

Puis, en entendant la Parole de Dieu lors des grandes célébrations liturgiques, lors des fêtes de la foi, dans la grande musique de la foi, nous ressentons cette présence.
Je me souviens, en cet instant, d'une autre petite histoire que m'a racontée récemment un évêque en visite "ad limina": il y avait une femme non chrétienne très intelligente qui commença à écouter la grande musique de Bach, Haendel, Mozart. Elle était fascinée et un jour elle dit: "Je dois trouver la source d'où peut provenir tant de beauté", et la femme s'est convertie au Christianisme, à la foi catholique, parce qu'elle avait trouvé que cette beauté a une source, et la source est la présence du Christ dans les cœurs, c'est la révélation du Christ dans les cœurs, c'est la révélation du Christ dans ce monde.
Donc, de grandes fêtes de la foi, de la célébration liturgique, mais également le dialogue personnel avec le Christ: Lui ne répond pas toujours, mais il y a des moments où il répond réellement.
Et puis l'amitié, la compagnie de la foi.
A présent, réunis ici à Lorette, nous voyons que la foi unit, l'amitié crée une compagnie de personnes en chemin. Et nous sentons que tout cela ne vient pas de nulle part, mais a réellement une source, que le Dieu silencieux est aussi un Dieu qui parle, qui se révèle et surtout que nous-mêmes nous pouvons être des témoins de sa présence, que de notre foi apparaît réellement comme une lumière également pour les autres.

Je dirais donc que, d'une part, nous devons accepter que, dans ce monde, Dieu soit silencieux, mais ne pas être sourds à ses paroles, à sa manière d'apparaître en de nombreuses occasions et nous voyons surtout dans la Création, dans la belle liturgie, dans l'amitié au sein de l'Eglise, la présence du Seigneur et, emplis de sa présence, nous pouvons nous aussi apporter de la lumière aux autres.

J'en viens ainsi à la deuxième, ou à la première partie de votre question: il est difficile de parler aux amis d'aujourd'hui de Dieu et peut-être plus difficile encore de parler de l'Eglise, parce qu'ils ne voient en Dieu que la limite de notre liberté, un Dieu de commandements, d'interdictions et dans l'Eglise, une institution qui limite notre liberté, qui nous impose des interdits.
Mais nous devons tenter de rendre visible à leurs yeux l'Eglise vivante, non cette idée d'un centre de pouvoir dans l'Eglise avec ces étiquettes, mais des communautés de compagnie dans lesquelles malgré tous les problèmes de la vie, qui existent pour tout le monde, naît la joie de vivre.
Ici, un troisième souvenir me vient à l'esprit. Je me suis rendu au Brésil et dans la Fazenda da Esperança, cette grande réalité où les toxicomanes sont soignés et retrouvent l'espérance, retrouvent la joie de vivre et témoignent que c'est précisément la découverte que Dieu existe qui les a conduits à guérir du désespoir. Ainsi, ils ont compris que leur vie a un sens et ils ont retrouvé la joie d'être dans ce monde, la joie d'affronter les problèmes de la vie humaine.
Ainsi, dans chaque cœur humain, malgré tous les problèmes qui existent, il y a la soif de Dieu et là où Dieu disparaît, disparaît aussi le soleil qui donne lumière et joie.
Cette soif d'infini qui est dans nos cœurs apparaît également dans le phénomène de la drogue justement: l'homme veut élargir la profondeur de la vie, avoir davantage de la vie, avoir l'infini, mais la drogue est un mensonge, une escroquerie, parce qu'elle n'élargit pas la vie, mais elle la détruit.
Ce qui est vrai, c'est la grande soif qui nous parle de Dieu et nous met en chemin vers Dieu, mais nous devons nous aider réciproquement.
Le Christ est venu précisément pour créer un réseau de communion dans le monde, où tous ensemble, nous pouvons nous porter l'un l'autre et nous aider ainsi à trouver ensemble le chemin de la vie et comprendre que les Commandements de Dieu ne sont pas des obstacles à notre liberté, mais les chemins qui conduisent vers l'autre, vers la plénitude de la vie. Prions le Seigneur afin qu'il nous aide à comprendre sa présence, à être emplis de sa Révélation, de sa joie, à nous aider l'un l'autre dans la compagnie de la foi pour aller de l'avant, et trouver toujours davantage avec le Christ le vrai visage de Dieu et ainsi la vie véritable.
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