Le vrai sens de Pâques
Une méditation du Cardinal Ratzinger, tirée du livre 'La Gloire de Dieu aujourd'hui' : "On voit bien ce que Pâques signifie : Dieu a agi. Il n'est pas indifférent au cours de l'histoire" (31/3/2013)
>>> Image ci-contre: Résurrection du Christ et femmes au tombeau ; Fra ANGELICO ; 1440-41 fresque ; Convento di San Marco, Florence (1)
Jugement et délivrance
La gloire de Dieu aujourd’hui (édition Parole et Silence, pages 67-69, cf. Note )
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La liturgie pascale de l'Église nous permet toujours de percevoir quelque chose de la joie bouleversante avec laquelle les hommes ont continué à accueillir le message de la Résurrection du Christ au cours des siècles. D'anciennes histoires racontent qu'en Russie les croyants se prenaient dans les bras lors de la nuit de Pâques en proclamant : « Christ est ressuscité ! » Ils avaient renoncé à un morceau de leur existence au cours des privations du carême. La fin de celui-ci correspondait de toute évidence à une grande joie. Chacun de ceux qui participaient à cette expérience collective prenait pleinement conscience, dans le rythme de l'année liturgique, du triomphe de la vie et de sa beauté.
Certes, aujourd'hui nous continuons à fêter Pâques mais le voile gris du doute et de la tristesse serre le cœur de la chrétienté, il étouffe la joie pascale au sein même des communautés de croyants. Rudolf Bultmann a décrit avec sévérité la peur de la chrétienté moderne au point d'en conclure que la mort de Jésus ne devait pas avoir été un événement particulier. Et même s'il s'est vraiment passé quelque chose, il faut se demander quelle en était la signification. A qui pouvait bien servir - dit-il - « le miracle d'un cadavre revenu à la vie »? « Que signifie donc un ressuscité au regard de la multitude de morts qui traverse l'Histoire? » Compte tenu de toutes les horreurs de celle-ci, la lumière pascale semble s'éteindre dans l'insignifiance.
Pâques serait-il donc dépassé ? Une parole sans espoir?
Pour prendre conscience de sa véritable valeur, nous devons poser la question à l'envers: qu'en serait-il si la Résurrection de Jésus n'avait pas eu lieu? Il s'agirait d'un mort de plus. Sans Résurrection, l'histoire de Jésus s'arrêterait au vendredi saint. Son corps se serait décomposé et il n'aurait été que « quelqu'un qui a été ». Cela reviendrait à dire que Dieu n'intervient pas dans l'histoire, qu'Il est incapable d'atteindre notre monde, notre vie et notre mort humaines, ou bien qu'il ne le souhaite pas. Cela signifierait qu'il n'y a pas de jugement et pas davantage de justice. Cela signifierait que seul l'instant compte et que seuls les roublards, les malins et les gens sans conscience ont raison.
Il n'y aurait donc pas de jugement. C'est ce que souhaitent beaucoup de personnes et pas forcément les mauvaises gens, car celles-ci confondent jugement et comptes d'apothicaires et prêtent plus de pouvoir à la peur qu'à l'amour confiant. C'est ce qui explique les efforts désespérés consistant à retirer le dimanche de Pâques de l'Histoire, à revenir en amont de ce jour et à faire finir l'histoire au samedi saint. Or ce n'est pas une délivrance qui résulte d'une pareille fuite mais la triste joie de ceux qui considèrent comme dangereuse la justice divine et préfèrent par conséquent qu'elle n'existe pas. On voit bien dès lors ce que Pâques signifie : Dieu a agi. Il n'est pas indifférent au cours de l'histoire. Le droit, l'amour, la vérité sont des réalités, la véritable réalité. Dieu nous aime, il vient à notre rencontre. Plus nous avançons sur son chemin, moins nous devons craindre le droit et la vérité et plus notre cœur sera rempli de la joie pascale. Pâques n'est pas seulement une histoire à raconter, c'est une indication. Ce n'est pas le récit d'un miracle survenu il y a très longtemps mais une rupture qui détermine le sens de l'Histoire. Comprendre cela permet d'exprimer de nos jours encore et avec une joie non dissimulée, le salut lié à Pâques : « Christ est ressuscité, oui, il est vraiment ressuscité ! »
Note
(1) Image et commentaire trouvé sur ce site "ami": http://www.imagesbible.com/
Quatre femmes arrivent devant un sarcophage pour mettre des aromates et embaumer le corps de Jésus mort.
La première, Marie Madeleine, se penche sur le tombeau ouvert et qui devrait être fermé, mais il est vide.
Assis sur le bord un ange leur dit que Jésus est ressuscité et en haut on voit la matérialisation de son récit, Jésus se dresse la palme et le drapeau vainqueur à la main. A gauche un religieux prie mais ce n'est pas un témoin, seulement St Dominique méditant, pour inviter le spectateur à faire de même.
