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L'oblation de soi

"Doux et ferme dans son service à l'Eglise": un texte d'un prêtre du Diocèse de Concordia Pordenone (province du Frioul Vénétie), écrit au lendemain de la renonciation. (15/4/2013)

Sur certains médias, on en est au point d'insinuer que le mieux que Benoît XVI a fait en huit ans, c'est sa démission.
La réflexion de don Cescon me paraît indiquer une interprétation pas assez soulignée: c'est la dimension sacrificielle du geste de Benoit.

Article original: http://www.db.ilpopolopordenone
Ma traduction.

     

Doux et ferme dans son service à l'Eglise
Don Bruno Cescon
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Le Pape de la raison et du sentiment, du traité théologique et de la parole limpide, de la douceur et de la fermeté, a décidé de descendre du trône pontifical pour se consacrer au silence et à la prière.
Il met en évidence de façon exemplaire dans sa personne ce qu'il a cherché et proposé avec ses livres et son enseignement durant toute sa vie. Il a écouté sa conscience qui le confirmait dans la constatation de sa fragilité physique, insuffisante pour guider une Eglise qui a anticipé le monde dans sa globalisation.
Eclairé par sa foi, par ce Christ qu'il approche avec affection et tendresse dans son dernier livre, il a voulu servir la communauté chrétienne avec un geste d'un inséparable humilité. Qui est une forme de responsabilité envers l'Eglise à l'égale de celle de Jean-Paul II. Une autre façon de rester sur la Croix et de regarder l'avenir, peut-être pour que d'autres suivent ce chemin. Avec ce choix, il a exprimé son style de pontificat, sa façon d'être martyr, mûrissant dans la prière une décision qu'il aura certainement vécue avec une dense souffrance au fond de lui.
Il doit avoir traversé le désert qui ne laisse pas « apercevoir » la piste entre les dunes, et enlève les forces. Mais ensuite, la lumière s'est faite dans son âme, et même "l'illumination" comme l'écrit Saint Augustin, philosophe et théologien qu'il a longuement étudié et aimé.
Sachant que le mandat de paître son troupeau n'est pas lié à une personne, il s'est fait authentiquement serviteur. Et quand le serviteur vacille dans ses forces et dans sa vigueur, il ressent qu'est venu le temps de se mettre en retrait, pour qu'un autre appelé au service apostolique continue l'action de Pierre.
Et ainsi le Pape, considéré comme conservateur, accomplit un geste extraordinairement innovateur. A partir d'études historiques, il avait bien présent à l'esprit que Léon XIII n'avait plus gouverné l'Eglise durant les dernières années de son existence, sans doute en raison d'une démence sénile (??). Par expérience directe, il a constaté combien Jean-Paul II avait eu des difficultés à tenir l'Eglise, devant par la force des choses demander, et déléguer de fait trop de devoirs et de pouvoirs à son secrétaire d'état, devenu à l'excès le filtre et le coeur de tout. Benoît XVI, en outre, n'a sans doute pas oublié le poids de Sœur Pasqualina à la fin du Pontificat de Pie XII. Par son choix, il n'a pas voulu que cela se passe à nouveau.

Et ici, s'annonce probablement un virage dans le gouvernement de l'Eglise catholique. Le Concile Vatican I avait fait du Pape une sorte de "monarque" absolu, chargé de tous les poids du monde catholique. Le Concile Vatican II a rééquilibré le service papal dans un sens plus collégial. Il suffit de penser au poids du Collège des cardinaux, aux synodes, aux conférences épiscopales, aux visites du Pape aux Eglises locales, mais aussi aux rencontres avec les Eglises continentales en Amérique latine, en Afrique, en Asie. Après ce geste courageux, la catholicité trouvera de nouvelles formes de collégialité et de communion.
Benoît XVI a compris tout cela, et par amour pour les nouveaux besoins de l'Eglise et du monde, il a cédé le bâton pastoral à son successeur. Il nous a surpris, bien qu'il nouseût déjà demandé d'évaluer la possibilité humaine et chrétienne de la renonciation (ndt: dans "Lumière du monde"?).
L'exemple de Papa Ratzinger met au centre de la vie de tous, chrétiens et prêtres, évêques et cardinaux, la gratuité et l'oblation de soi.