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Exit Bertone, arrive Parolin

Andrea Gagliarducci brosse un tableau d'un grand intérêt de la gouvernance de Bertone, et donc de Benoît XVI, qui contraste fortement avec ce qu'on a pu lire partout (19/10/2013).

Le texte est truffé de liens (que je ne reproduis pas ici) vers des articles précédents, non moins intéressants, du même auteur. A suivre.

Voir aussi:
¤ Le départ du card. Bertone vu par JL Restàn
¤ Le secrétaire d'Etat Bertone (du même Gagliarducci)

     

Exit Bertone, arrive Parolin.

Qu'est-ce qui va changer?
Andrea Gagliarducci
13 octobre 2013
http://www.mondayvatican.com/
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Le 15 octobre prochain, le changement attendu au sommet da la Secrétairerie d'Etat du Vatican aura lieu. Tarcisio Bertone laissera son poste à Pietro Parolin, qui avait été le numéro quatre de Bertone jusqu'en 2009. Cette année-là, Parolin avait été promu archevêque et envoyé comme nonce apostolique au Venezuela.

Le changement est attendu pour deux raisons.

Tout d'abord, sous le pontificat Benoît XVI, la direction du cardinal Bertone a été constamment l'objet d'attaques.
À regarder en arrière, les attaques contre Bertone ne semblent pas être des attaques contre le Secrétaire d'État personnellement. Elles représentaient plutôt des attaques contre la manière dont Benoît XVI gouvernait, une manière Bertone a suivait fidèlement.
Attaquer le pape n'est jamais simple. Toutefois, créer une distance entre les actions du Pape et celles de ses collaborateurs les plus proches peut être particulièrement efficace. Mettant de côté les erreurs et idiosyncrasies de caractères (qui sont prévisibles), c'est ce qui, en substance, est arrivé à la fin des huit dernières années.

En second lieu, il y a un désir de voir quelle orientation Pietro Parolin donnera à la Secrétairerie d'Etat. Jusqu'à présent, avec un secrétaire d'Etat sortant qui était continuellement l'objet d'attaques, beaucoup ont manœuvré pour augmenter leur propre influence. Et cela a conduit à une situation paradoxale.

Benoît XVI a construit un important réseau institutionnel. Au début, il y avait peu de personnes qui partageaint la vision de Benoît XVI d'un Saint-Siège apprécié au niveau international, avec un Etat fort et crédible pour permettre à l'Eglise de remplir sa mission dans le monde. Dans le même temps, Benoît XVI avait une vision d'un Saint-Siège avec de solides racines théologiques, dont la diplomatie est ancrée dans la Vérité .

Pièce après pièce, Benoît XVI a changé les hommes aux postes clés. Pas les hommes au sommet, mais ceux dans les coulisses dont les travaux comprenaient la rédaction de documents et de discours qui pourraient façonner l'Eglise ou avoir un impact important et visible sur le monde.

Lorsque Benoît XVI a démissionné, laissant la maison en bon état, il y avait une série d'hommes clés aux postes clés, et un cadre institutionnel solide.
Toutefois, la Curie romaine n'a pas en mesure de gouverner le conclave , les cardinaux de sont déchirés en plusieurs groupes, et à la fin,une vision complètement différente a prévalu et a entraîné l'élection du pape François.

A présent, Pietro Parolin doit faire face à une Curie avec des hommes de valeur (souvent sous-estimés, car il semble y avoir une tendance à penser que les points de vue des gens extérieurs sont plus importants que ce que pensent les gens à l'intérieur de l'Église) et avec un pape très axé sur l'activité pastorale et beaucoup moins attentif à l'institution. Cela a conduit à une sorte de «malaise institutionnel», un état de confusion des affaires résultant de l'absence d'un guide à la Secrétairerie d'État.

Pietro Parolin est censé mettre fin à l'anarchie de la Curie. Quelle sera la vision du nouveau secrétaire d'Etat?

Le Secrétariat d'Etat d'Angelo Sodano (1991-2006) a développé et renforcé une relation privilégiée avec l'Italie, fidèle à une tradition bien établie du Saint-Siège. Le Vatican a toujours été dans des termes de bon voisinage avec l'Italie, ce qui n'est pas surprenant étant donné qu'avant 1978 tous les papes (de l'époque moderne) avaient été italiens.

Les bonnes relations de voisinage avec l'Italie était une priorité d'avant. Dans le même temps, l'Union européenne est devenue une réalité, ainsi que l'interdépendance entre les Etats, et aucun pays ne trouvait convenable de s'appuyer uniquement sur des relations bilatérales et privilégiées. Le monde est devenu multilatéral. Autrefois, il y avait des hommes de compromis, spécialistes de la dichotomie et de la frontière Vatican-Italie, capables de développer cette très importante bonne relation. Ces hommes appartiennent maintenant au passé, en partie parce que les frontières du Vatican ne sont plus avec l'Italie, mais avec l'ensemble de l'Europe.

Le Secrétariat d'Etat de Bertone (2006-2013) a été plus axé sur le multilatéralisme, un meilleur positionnement du Saint-Siège sur la scène internationale, donnant de façon décisive à ses activités un impact et un poids forts.

La vision était celle du Saint-Siège en tant qu'Etat entre les Etats, qui partage avec eux droits et devoirs, défend sa souveraineté (avec ses particularités idiosyncratiques) et l'applique à faire avancer sa mission à la poursuite du bien commun. Le bien commun est l'agenda international du Saint-Siège.

Parolin aura le défi de maintenir le profil international que Benoît XVI a donné au Saint-Siège, et en même temps d'être très prudent avec les gens qui veulent gagner encore du pouvoir et de l'influence, y compris au risque de déchirer le Saint-Siège au sein des Murs du Vatican

Que fera Pietro Parolin? Maintiendra-t-il la vocation internationale du Saint-Siège? Ou reviendra-t-il en arrière et entretiendra-t-il des relations «privilégiées» avec l'Italie (hypothèse très peu probable)? Le Saint-Siège fera-t-il un pas en avant ou un pas en arrière?

Ce n'est pas une tâche facile: soutenir une vision ambitieuse et internationale, tout en gérant la concurrence pour l'influence locale immédiate et le statut. Parolin ne trouvera pas facilement un équilibre entre ces deux «pôles».
S'il y réussit, et si le pape François est capable de faire avancer le projet de Benoît XVI, Parolin sera un grand secrétaire d'État.