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La lettre de Jeannine du 30 octobre (I)

Comme d'habitude, elle nous offre son regard méticuleux sur les activités papales des dernières semaine. Première partie: François (30/10/2013)

     
I. François

Chère Béatrice,

Je continue à vous suivre sur votre site et, la curiosité aidant, je fourre mon nez dans d'autres. On y trouve des choses intéressantes mais aussi, surprenantes.

Je sais que je suis la catholique de bout de banc, je ne réfléchis pas sans cesse à la parole du pape pour me convaincre de ce que je peux faire ou ne dois pas faire et cela me donne une grande liberté par rapport à mon entourage et au "religieusement correct". Rationnelle, pragmatique, pas du tout slave ni latine ni latino-américaine, il est bien évident que je n'ai pas été touchée par l'emballement lié au nouveau pontificat.

François est le Pape et il conduit l'Eglise à sa manière ou plutôt comme l'Esprit le guide et en fonction de sa personnalité. Il accomplit, paraît-il, toujours ce qu'il décide de faire et n'a pas peur de se tromper, j'ai au moins ce point commun avec lui. Etant donné que notre pape ouvre les bras de l'Eglise et les siens au monde entier je ne me sens pas seule, abandonnée; en quelque sorte c'est réconfortant.

Je le suis à travers le site du Vatican, celui de l' OR , Zenit, les articles que vous faites paraître, ceux d'autres blogs, les mails de La Croix, du Figaro, mais je ne suis plus les retransmissions. les images de photovat.com me permettent de me faire une idée.

J'avoue n'apprécier que très moyennement le vocabulaire coup de poing qu'il utilise pour fustiger les fidèles , marquer les esprits lors des messes du matin particulièrement mais aussi dans d'autres rencontres, comme par exemple:
> Les religieuses doivent être maternelles, pas des vieilles filles. On peut être célibataire soit par vocation soit par obligation et pour autant ne pas faire partie d'une sous-catégorie; l'instinct maternel n'est pas donné à toute femme et si on ne l'a pas, mieux vaut ne pas se lancer dans une vie qui sera pesante. Il y a aussi des célibataires qui sont riches de dévouement, de réalisations magnifiques.
> Les religieuses cloîtrées doivent irradier la joie, et ne pas avoir le sourire (stéréotypé, c'est de moi) des hôtesses de l'air (propos devant les clarisses à Assise, cf. www.la-croix.com/ ). Ces jeunes femmes qui sont au contact de personnes si différentes, qui doivent savoir accueillir, rassurer, garder la tête froide pendant les vols à problèmes ont heureusement reçu une formation leur permettant d'être une présence attentive, calme, efficace.

Pendant les homélies, les défauts, les manquements des fidèles qui forment l'Eglise sont détaillés sans aucune bienveillance et pour moi trop c'est trop.
Ce style est lié sûrement à sa personnalité, à sa façon très directe d'aborder les problèmes et les personnes qu'il rencontre.
Je ris parfois en découvrant ses reproches bien ciblés et je suis persuadée que la route avec lui ne sera pas un long fleuve tranquille car il est très exigeant et le travail en profondeur énorme à réaliser. Ce qu'il lui faut réussir c'est transformer le succès actuel en un changement profond, durable des esprits et des cœurs, je lui souhaite de réussir mais je demande à voir En le lisant je me sens prise en main, conditionnée et je n'aime pas. Son contact très affectueux, chaleureux avec la foule me déconcerte car il est à mille lieues de moi. Je ne suis pas fan mais je l'accepte comme il est; je suis parfaitement libre de penser cela et ne me sens aucunement coupable.

Les fidèles de François défendent avec acharnement un pape qui jouit d'une popularité sans précédent et là je ne comprends pas; ils sont plus papistes que François lui-même, au point de vouloir réduire au silence ceux qui ne font pas partie de cette nouvelle catégorie de fidèles: 10 millions de followers et plus, seulement 206000 en France au dernier comptage; parle-t-on vraiment de l'évêque de Rome? On se croirait dans une émission de variétés dans laquelle l'invité d'honneur fait appel au public pour faire grimper son compte Twitter. Est-il impossible de faire admettre que manifester de l' incompréhension, une certaine réserve à l'égard du pape, ne constitue pas une attaque ou une tentative de déstabilisation?, cela relève de la liberté de chacun. D'ailleurs François dit lui-même qu'il préfère un avis divergent du sien mais sincère plutôt des paroles toujours soumises qui cachent de l'opposition.

Les réformes se feront en leur temps lorsqu'il jugera que les appréciations, les renseignements dont il a besoin constitueront un ensemble suffisamment solide pour lancer une action d'envergure, j'ai l'impression d'utiliser un vocabulaire militaire. Il déterminera lui-même l'ordre de priorité pour l'immense chantier qu'il veut réaliser.
Très entouré, (me fiant à des paroles trouvées sur le site du Vatican) il veille à l'exécution de ses instructions et n'a pas hésité, par deux fois, à arriver sans prévenir lors d' une séance de travail à laquelle sa présence n'était pas prévue. Il a parfaitement raison, rien ne vaut l'œil de celui qui décidera en dernier lieu., c'est ainsi que je vois la chose.

* * *

Bien sûr je ne vais pas omettre de parler de Benoît XVI et cela d'autant plus facilement que les rapports entre le Pape et le Pape émérite paraissent excellents.
Je crois que François a brisé dès son élection le mur qui aurait pu être infranchissable sous un autre Souverain Pontife. Il savait qu'avec Benoît XVI il n'avait rien à craindre d' une ingérence possible dans l'exercice de son pontificat. En disant cela je traduis ma propre conviction et je me réfère aussi à l'interview de Mgr Gänswein. Il ne cache pas que le mois de mars a été difficile car il y avait une rupture voulue certes mais brutale d'avec une vie stressante, un besoin évident de Benoît XVI de récupérer, d'organiser un nouvel emploi du temps, une nouvelle vie, mais il y avait aussi une inconnue qui pesait lourd : qui serait le nouveau Pape? Les nouvelles qu'il donne paraissent correspondre à la réalité et au caractère de François qui attache beaucoup d'importance aux deux extrémités de la vie. Je me demande si cette cohabitation harmonieuse ne déplaît pas à certains qui verraient avec plaisir des frictions, une guerre larvée entre les deux hommes.

A suivre...