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1971-2014: même combat.

Le synode sur la famille et l'appel à la conscience comme moyen de dénouer les crises. Monique a retrouvé dans un ouvrage de Hans Küng datant de 1971 des propos qui semblent d'une incroyable actualité, à la veille du Synode. Ce qui est en jeu, c'est rien moins que l'infaillibilité pontificale (22/3/2014)

     

Les droits de la conscience et l'autorité du magistère seront probablement âprement débattus lors du synode sur la famille (2014-2015).
Relisons trois pages (136 à 138) à la fois anciennes (1971) et incroyablement actuelles de Hans Küng tirées de son livre: "Infaillible? Une interpellation" ,éd. Desclée de Brouwer, 1971

Monique T.

     

LES DROITS DE LA CONSCIENCE

1/ Les droits de la conscience demeurent même vis-à-vis du dogme. [...]
Heureusement, dans la période postconciliaire, l'encyclique "Humanae vitae" a fortement contribué à former la conscience des catholiques, même en face des solennels énoncés doctrinaux du Pape. Cette formation était nécessaire et urgente.
Sur la liberté comme élément de la foi elle-même, citons le témoignage récent et les paroles claires de W. Kasper (ndlr. alors âgé d'une trentaine d'années) dans sa réflexion sur le cheminement de l' Eglise de Vatican II:

L'Eglise ne pourra servir la liberté des autres que si elle conserve sa propre liberté. C'est pourquoi son autorité doit être l'"autorité de la liberté". La foi est en effet, pour l'essentiel, un acte de libre assentiment; acte pleinement et totalement humain; elle n'exclut pas, elle implique une responsabilité intellectuelle. Nul n'a le pouvoir ni le droit de déléguer à l'Eglise officielle et à son magistère cette responsabilité, par une obéissance "aveugle" en quelque sorte. Une telle obéissance, qui irait à l'encontre d'une conviction personnelle, serait un acte immoral. [...]


2/La question d'une infaillibilité pontificale ou même épiscopale n'en est pas pour autant résolue. Sans doute, il est devenu courant, surtout ces derniers temps, quand la théologie morale s'embarrassait dans les problèmes concrets, de recourir, en s'excusant, à la conscience ou en général à des éléments subjectifs. C'est ainsi que, dans la morale catholique pratique en matière sexuelle, on a rendu au moins subjectivement supportable un joug objectivement accablant. [...]
Ce recours à la subjectivité était et reste justifié à titre de légitime défense de la conscience et de garantie pastorale contre l'autorité du magistère qui, par tous les moyens, s'oppose à la discussion. Mais il n'est pas permis d'y chercher une excuse ou un alibi pour refuser d'aborder les problèmes concrets au plan théologique. Des conseils de confesseurs ne peuvent remplacer une sérieuse critique théologique.
C'est le cas en particulier pour la question de l'infaillibilité. Dans le cas de l'encyclique "Humanae vitae" par exemple, certains chrétiens, des théologiens, des évêques et des conférences épiscopales en ont appelé à la conscience, à juste titre. Mais ni les théologiens ni les dirigeants de l' Eglise ne sont pour autant dispensés d'étudier à fond ce qui est réellement en cause; dans le cas précis, et abstraction faite de toutes les questions de théologie morale, il s'agit du problème de l'autorité du magistère. Mis à part tous les droits de la conscience, la prétention du magistère à une infaillibilité "ordinaire" ou "extraordinaire", "pontificale" ou "épiscopale", est-elle ou non justifiée?"
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La tendance que représente Hans Küng sera présente au synode, ce qui laisse présager de belles batailles.
Au delà des problèmes de théologie morale, on sera aussi obligé de poser la question de l'autorité du magistère et de l'infaillibilité éventuelle de "Humanae vitae" (Küng dit que Paul VI la considérait comme infaillible mais j'ai lu aussi le contraire). Si cette encyclique est infaillible, on ne pourra pas en modifier un iota (sous peine de créer un précédent!) et je ne vois pas ce que le synode pourra apporter de nouveau en matière de licéité de la contraception.
Dernièrement, François a vanté cette encyclique comme prophétique: ce qui devrait refroidir beaucoup de jeunes catholiques et bloquer à l'avance toute discussion au synode.
François a ouvert une boîte de Pandore sans fond, ne contenant pas que les questions liées à la famille.
Ce texte montre que certains problèmes de 1971 se sont fossilisés pour réapparaître en 2014 et qu'il est temps de les regarder en face.

Monique T.