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L'inquiètude des catholiques américains.

En marge du Synode, Giuseppe Rusconi, qui anime le site suisse de langue italienne <Rosso porpora>, a interrogé J. Westen, le directeur du site pro-vie LifeSiteNews. Il faut noter que l'entretien s'est déroulé avant la publication du rapport intermédiaire. Traduction Anna (14/10/2014)

SYNODE, GRAVE INQUIETUDE D'UNE PARTIE DES CATHOLIQUES AMÉRICAINS
www.rossoporpora.org

Interview de John-Henry Westen, directeur du site , un des plus populaires du monde anglo-saxon, avec presque 4 millions de visites par mois. Amertume, confusion, découragement dans cette majorité des catholiques pratiquants nord-américains (minorité parmi les catholiques déclarés) qui se battent pour la vie et la famille. Aux côtés du Card. Burke au moins 10 autres cardinaux, presque tous les évêques africains, la moitié des nord-américains…
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Il y a quelques jours nous avons présenté un ample rapport des questions (certes légitimes) adressées au Synode par Wir sind Kirche/Nous sommes Eglise (voir ici). A Rome, cependant, sont présents ces-jours-ci les représentants d'autres mouvements, impliqués quotidiennement dans la défense et promotion de la doctrine sociale de l'Eglise en matière de vie et famille. Hier soir, dans une grande salle comble surtout de catholiques italiens (avec plusieurs prêtres et religieux) nous avons entendu deux d'entre eux, invités au siège de la place Santa Balbina par l'association "Famille Demain": John Smeaton, directeur de l'association britannique "Society for the Protection of the Unborn Children" et John-Henry Westen, directeur du populaire site nord-américain LifeSiteNews. A ce dernier nous avons posé quelques questions au sujet de la première partie du Synode.



Q: Monsieur Westen, sonnent les trompettes et roulent les tambours pour accompagner la "joyeuse machine de guerre" du Synode sur la famille. Nous ne sommes qu'à la moitié du premier des deux Synodes sur la famille et voilà ce qu'on entend du très partisan clairon de quelques médias parmi les mieux informés des choses du Vatican (depuis mars 2013): "Il est désormais clair que la tendance générale de l'assise synodale est de jeter les bases d'un possible futur accès au sacrement de la part des divorcés remariés. (…) La voie ouverte à parcourir est à présent tout à fait dégagée, sans marche arrière". Par d'autres clairons historiquement très partisans: "Standing ovation" pour l'intervention du couple Pirola (à lire entre autre l'accueil en famille du compagnon d'un des fils), "froid général" pour l'intervention du cardinal Burke, "froid général" aussi pour l'intervention du cardinal Müller, "qui a utilisé ses trois minutes légales uniquement pour attaquer trois pères synodaux: Kasper, Baldisseri et Forte". Il s'agit là, Monsieur Westen, d'éléments d'information importants qui ne doivent pas susciter votre enthousiasme à la fin de la première semaine du Synode. Mais avant d'entendre vos considération sur ce sujet, expliquez à nos lecteurs ce qu'est LifeSiteNews, combien d'utilisateurs compte-t-il et qui sont ils…

R: LifeSiteNews est un portail nord-américain en anglais qui se bat pour la défense de la vie et de la famille. Nous publions 25 articles par jour. Nous avons aussi un portail en espagnol et un en portugais. Mais celui en anglais est clairement prédominant. Nous avons une moyenne de presque 4 millions de visiteurs par mois…
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Q: Qui sont les visiteurs?

R: Des personnes partageant notre bataille pour la vie et la famille. Beaucoup sont catholiques, plusieurs autres sont protestants. Il y a aussi des juifs, comme mon ami le rabbin Yehuda Levin, porte-parole de l'Alliance rabbinique des Etats-Unis, qui met en garde avec force les pères synodaux contre d'éventuelles défaillances: ce serait très dangereux pour les catholiques, pour les protestants, pour tous le chrétiens, pour lee juifs, pour toutes les religions, pour le monde entier.
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Q: Comment se configure le monde catholique nord-américain en matière de famille?

R: Je pense qu'il y a une minorité très active qui pour ainsi dire soutient les "ouvertures" du cardinal Kasper; une autre minorité - très active elle aussi - qui reste fidèle à la doctrine sociale de l'Eglise; une majorité qui ne prend pas position et ne s'intéresse pas vraiment à la question.
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Q: Et parmi les catholiques pratiquants?

R: Il ne fait pas de soute qu'ici, nous sommes la majorité. Mes lecteurs pensent que pas mal des pères synodaux ont des idées confuses en matière de théologie et de pastorale. Ils se demandent à juste titre: mais peut-on admettre à la communion celui qui est marié, a divorcé et s'est remarié? La réponse de la majorité des catholiques pratiquants nord-américains est que non, on ne peut pas.
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Q: Pourquoi ne peut-on pas?

R: Dans l'Evangile de Mathieu (19, 3-6), après que les pharisiens eurent demandé à Jésus si un homme pouvait répudier sa propre femme, on lit: "N'avez-vous pas lu que le Créateur dès le commencement les fit homme et femme et dit: «A cause de cela il quittera son père et sa mère, il s'attachera à sa femme et les deux deviendront ainsi une seule chair»?. Ainsi ils ne sont plus deux, mais une seule chair. Donc, ce que Dieu a uni, que l'homme ne le sépare pas". En admettant à la communion les divorcés remariés, on changerait la doctrine, bien que plusieurs pères synodaux disent que non. On ne changerait que la pratique, affirment-ils. Mais si on modifie la pratique, les conséquences sur la doctrine sont inévitables.
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Q: Y a-t-il de l'inquiétude parmi ces catholiques nord-américains qui se battent pour la vie et la famille?

R: Oui, beaucoup; il y a du désarroi, de l'amertume, de la démotivation. Il y a de l'alarme. Certains sont vraiment désespérés. Pourquoi se donner la peine de défendre la famille en tant qu'union indissoluble entre l'homme et la femme, ouverte à la procréation des enfants? A lire et entendre le cardinal Kasper, on peut croire qu'il s'éloigne explicitement de la doctrine catholique. Lorsque Kasper envisage l'admission des divorcés remariés à la communion, il parle à l'encontre des propos de Jésus dans l'Evangile. Et pourtant, selon la doctrine catholique ces personnes sont dans un état de péché grave. Si elles devaient recevoir la communion, ce serait un sacrilège, elles s'auto-condamneraient. Est-ce de la miséricorde que de condamner spirituellement les divorcés remariés, en leur faisant croire qu'au fond avec un peu de pénitence il sont en règle au point de pouvoir communier pendant l'Eucharistie? C'est absurde…
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Q: Pour ce que nous connaissons de lui, il est certainement à exclure que le cardinal Kasper veuille les envoyer en enfer…

R: Pourtant il n'y a rien à faire, c'est la conséquence de son attitude. Laquelle est partagée aux Etats-Unis par une minorité "progressistes", convaincue que Kasper, soutenu d'ailleurs par le Pape, représente la vraie Eglise. Je répète, il est vrai aussi que la majorité des catholiques nord-américains, ceux qui ne vont à la messe qu'à Noël, ne s'intéresse pas beaucoup à la question.
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Q. De ce qui a filtré - par exemple par le cardinal anglais Vincent Nichols - il semble qu'une des interventions de couples laïcs ait suscité de chaudes et vives approbations et même, de la part de certains, une standing ovation. Celle des époux australiens, Ron et Mavis Pirola, dont les médias ont mis en relief l'accueil par une famille d'amis du compagnon de leur fils comme un exemple de bonne évangélisation.

R. Comme l'a remarqué le cardinal Burke, le cas est très délicat, mais le fait d'accueillir dans la famille le compagnon d'un fils homosexuel pose de graves problèmes en matière de cohérence avec la doctrine catholique. Les parents devraient expliquer à leur fils que l'acte homosexuel est préjudiciable pour la santé spirituelle et même la santé physique, comme le souligne d'ailleurs le National Health Interview Survey (l'agence fédérale des Etats-Unis qui depuis 1957 étudie statistiquement la santé et les comportements de la population) dans son rapport de juin 2014 (Sexual Orientation and Health Among U.S). C'est un devoir des parents d'informer les enfants et d'empêcher que des actes homosexuels aient lieu en famille. Aussi parce que les enfants et les petits-enfants pourraient croire qu'ils peuvent suivre la même voie, même juste par imitation, puisque désormais tout est permis.
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Q. Les partisans de l'accueil en famille et dans la communauté paroissiale soutiennent que la miséricorde doit prévaloir….

R. Alors je vous donne un exemple personnel. Je suis père de huit enfants, six garçons et deux filles. Il y a quelques années, un des plus petits s'est approché du bord d'un précipice. Je l'ai appelé immédiatement. Et lui: mais non papa, c'est si beau! J'aime ça!, et moi: Viens ici immédiatement, c'est dangereux! Après l'avoir reconduit en zone tranquille il hurlait que j'étais méchant et je ne l'aimais pas. Mais c'est justement parce que je l'aimais que je lai empêché de jouer au bord du précipice. Dans le cas, certes délicat, évoqué par les époux Pirola, là aussi les parents devraient avoir le courage et la responsabilité de dire non, tu ne peux pas ramener en famille ton compagnon, tu dois penser à ta santé morale et physique et nous ne voulons pas ta perte! Ce qui vaut pour la famille vaut aussi pour la paroisse, "famille des familles": ce serait un grave scandale que de confier des tâches éducatives, directives, de lecture pendant la messe à des personnes en état objectif de péché grave. Nous devons savoir dire non, au nom justement du principe de miséricorde qui consiste à essayer de sauver les âmes des frères en état de péché grave et dans ce cas aussi de leurs corps.
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Q. Pendant la première semaine du Synode, des voix fortes et claires se sont levées en faveur de la cohérence avec la doctrine catholique actuelle dans la famille…

R. Nous pouvons bien le dire: Deo gratias pour le cardinal Burke, Deo gratias pour l'archevêque nigérian Kaigarna, Deo gratias pour l'évêque ghanéen Osei-Bonsu, Deo gratias pour les autres cardinaux qui ont publié récemment leurs travaux en défense de la doctrine catholique et pour tous ceux (cardinaux, et évêques, par exemple le cardinal Pell) qui se sont prononcés dans ce sens pendant la première semaine du Synode. Nous, en tant que coalition de 15 organisations internationales coordonnées dans Voice of the Family, nous avons demandé et demandons aux pères synodaux de défendre la famille et donc de protéger nos enfants. Je le répète: protéger nos enfants et le futur de la société.
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Q. Croyez-vous qu'en tout cas les voix mentionnées soient minoritaires?

R. Il est difficile de le dire, mais il est certain qu'on est en train d'essayer de marginaliser surtout le cardinal Burke, même si on l'a chargé de présider un des circules minores linguistiques. Voyons toutefois ceux qui dominent largement tant dans la Commission pour le Message que dans celles pour la Relation finale… elles sont blindées! Il est vrai qu'au Synode il y a plusieurs autres qui pensent comme lui, au moins une autre dizaine de cardinaux qui l'ont affirmé clairement, en critiquant les contenus de l'action du cardinal Kasper, Et puis presque tous les évêques de l'Afrique, ceux du Proche Orient…
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Q. Et les évêques nord-américain?

R. Je pense qu'ils sont divisés en deux.
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Q. Vos prévisions pour la deuxième semaine du Synode?

R. Je crois être réaliste. Il y a une telle confusion sous le ciel synodal qu'il est difficile d'être optimiste. Je ne crois pas que l'on puisse parvenir cette année à parler d'une seule voix forte et claire, de façon que cela puisse être bénéfique pour le catholiques et pour le monde, sans trahir ou affaiblir la doctrine catholique.







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