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Pédophilie dans le clergé: le cas de l'Argentine

A propos de la demande de pardon du Pape aux victimes d'abus sexuels par des prêtres. Dossier (9/7/2014)

>>> J'attire l'attention sur le formidable dossier rassemblé par Raffa sur la lutte inlassable de Joseph Ratzinger/Benoît XVI, avec une cgronologie complète: ilblogdiraffaella.blogspot.it/2014/07/le-decisioni-e-lesempio-di-papa.html

     
La douleur de François

Lundi, le Pape François a rencontré six victimes de prêtres pédophiles, venant d'Irlande, d'Allemagne et du Royaume Uni, et il a célébré en leur présence une messe à la chapelle de Sainte Marthe (vaticaninsider.lastampa.it).
Durant l'homélie, il a eu des mots très durs pour les prédateurs, et les médias ont donné un écho très favorable à sa demande de pardon.

Depuis longtemps je porte en mon cœur la profonde douleur, la souffrance, si longtemps occultée, si longtemps dissimulée, avec une complicité qui n’a pas d’explication, jusqu’à ce que quelqu’un ait senti que Jésus regardait...et se décide à soutenir ce regard. Ceux qui ont pleuré alors nous font prendre conscience de ce crime, de ce péché grave. C’est mon angoisse et ma douleur, le fait que quelques prêtres et évêques aient violé l’innocence de mineurs, ainsi que leur propre vocation sacerdotale, en abusant d’eux sexuellement. C’est plus que des actes condamnables. C’est comme un culte sacrilège, parce que ces enfants ont été confiés à leur charisme sacerdotal pour être conduits à Dieu, et ils les ont sacrifiés à l’idole de leur concupiscence.
...
Devant Dieu et son peuple, j’exprime ma douleur pour les péchés et les crimes graves d’abus sexuels commis par le clergé contre vous et, humblement, je demande pardon. Je vous demande aussi pardon pour les péchés d’omission de la part des autorités de l’Eglise qui n’ont pas répondu adéquatement aux dénonciations d’abus présentées par des proches et par ceux qui ont été victimes d’abus.
(visnews-fr.blogspot.fr)

On sait à quel point le cardinal Ratzinger, comme préfet de la CDF, puis le Pape Benoît XVI, s'est impliqué à fond dans la lutte contre cette pourriture. Contrairement au cardinal Bergoglio, il a été personnellement en première ligne, la presse ne lui a ait aucun cadeau et s'est acharnée haineusement sur lui, allant même jusqu'à impliquer son frère, en inventant et travestissant au besoin les faits (dossier ici: benoit-et-moi.fr/2010-I)
Toutefois, pour les médias, tout se passe comme si la "révolution Bergoglio" touchait tous les domaines, y compris celui de la lutte contre la pédophilie des clercs, et comme si dans ce domaine aussi, rien n'avait été fait avant, tout commençait avec "le Pape venu du bout du monde".
Et l'opinion publique peut avoir l'impression que le Pape est personnellement entièrement extérieur au problème, dont il aurait hérité de ses prédécesseurs.
C'est d'ailleurs ce qui ressort de la lecture de certains commentaires consternants sur les forums de discussion, voir par exemple ici.

Mais l'Argentine a-t-elle été préservée de ce fléau? Pourquoi personne n'y fait-il jamais allusion? Qu'en est-il exactement?
Voyons les choses d'un peu plus près.

L'enquête de John Allen, en avril 2013

Au lendemain de l'élection de JM Bergoglio, début avril 2013, John Allen s'était rendu en Argentine pour enquêter sur le nouveau pape. Il en avait tiré un article apparemment bien documenté, mais forcément assez succinct vu la briéveté de son séjour. L'article était paru le 12 avril 2013 sur son blog (qui était alors encore hebergé par le site National Catholic Reporter), intitulé "Questions difficiles sur François en Argentine", et je l'avais traduit ici: benoit-et-moi.fr/2013-II/articles/une-enquete-de-john-allen-en-argentine.

Parmi ces questions difficiles, il y en avait une (qui ne m'avait pas paru la plus importante, mais qui l'était en quantité) qui concernait la question de sa gestion des abus sexuels sur mineurs du temps où il était archevêque de Buenos Aires et préseident de la Conférence épiscopale d'Argentine.
Il faut souligner que John Allen écrivait pour un portail catholique "libéral", et qu'il était soucieux d'exonérer le nouveau Pape de tout soupçon. Mais c'est malgré tout un bon journaliste, honnête et compétent.
Il partait d'un article du correspondant en Amérique latine du Washington Post, daté du 18 mars 2013, intitulé "Le Pape François était souvent calme, comme archevêque, sur les cas d'abus sexuels en Argentine" encore en ligne ici: articles.washingtonpost.com/2013-03-18
Voici donc ce qu'il écrivait à cette rubrique "Abus sexuels en Argentine":

PRÊTRES ABUSEURS
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Le 18 Mars, le Washington Post a remué une histoire en Argentine au sujet du bilan de Bergoglio sur la crise des abus sexuels, qui mettait en évidence deux cas: le Père Julio César Grassi, condamné en 2009 pour deux cas d'abus et acquitté pour plusieurs autres, et le Père Napoléon Sasso, condamné en 2007 pour avoir abusé de cinq jeunes filles mineures.

D'une façon générale, l'histoire suggère que Bergoglio n'a gèré aucun des deux cas selon les normes désormais acceptées par l'Eglise dans d'autres parties du monde. On a noté qu'il n'a pas rencontré les victimes, n'a offert ni excuses ni dédommagement financier, et n'a pris aucune sanction ecclésiale contre les prêtres impliqués.

Pour commencer, voici un point important qui n'a pas été relevé dans l'histoire du Washington Post ou dans les commentaires ultérieurs: Ni Grassi, ni Sasso ne sont prêtres de l'archidiocèse de Buenos Aires, et donc ils n'ont jamais été sous la supervision directe de Bergoglio. (Entre autres choses, cela signifie que Bergoglio n'a jamais été en position d'imposer une peine ecclésiale, qui aurait dû être faite par leurs propres évêques.)

Au-delà, les observateurs disent que les deux situations doivent être examinées séparément parce que le degré d'implication de Bergoglio diffère.

- Sasso vient du petit diocèse de Zárate-Campana. La plus grande partie de son travail sacerdotal se déroulait dans l'archidiocèse de San Juan, où des accusations de contacts sexuels avec des mineurs avaient commencé en 1994. Après une évaluation psychologique en 1997, il a été envoyé à un centre de traitement pour les prêtres en situation de crise à Buenos Aires, appelé Domus Mariae.
Des sources de l'Eglise disent qu'à aucun moment Bergoglio n'a exercé le moindre contrôle sur lui.
En 2002 et 2003, Sasso était de retour dans le diocèse de Zárate-Campana, travaillant dans une soupe populaire dans la ville de Pilar, où il aurait commis au moins cinq actes d'abus contre des filles entre 11 et 14 ans. Ce sont les infractions pour lesquelles il a été reconnu coupable en Novembre 2007 et condamné à 17 ans de prison.
L'évêque de Zárate-Campana au moment où les premières accusations sont tombées était Rafael Eleuterio Rey, qui a démissionné en Février 2006 pour raisons de santé. Son successeur est Mgr Oscar Domingo Sarlinga. En 2007, au cours du procès de Sasso, une lettre a été déposée comme pièce à conviction, de l'archevêque de San Juan Italo DeStefano, mort en 2002, exhortant les évêques à faire quelque chose à propos de Sasso.
La plupart des sources ecclésiales en Argentine pensent que la responsabilité de la façon dont le cas Sasso a été traité appartient principalement à ces prélats, et non à Bergoglio.

- Grassi, quant à lui, est un prêtre du diocèse de Morón, où il a été incardiné après avoir quitté les salésiens en 1991. Cependant, il a eu une relation plus directe avec le futur pape, puisque Bergoglio soutenait publiquement les «Happy Children», la fondation de Grassi fondée en 1993 pour aider les jeunes pauvres dans le centre urbain.
Grassi a un fort impact médiatique en Argentine et est connu comme un leveur de fonds débrouillard, apte à entretenir des relations avec les donateurs potentiels. En outre, contrairement à Sasso, la plus grande partie de sa carrière sacerdotale s'est déroulée à Buenos Aires.
Un réseau argentin de télévision a commencé à soulever contre Grassi des accusations d'abus en 2002. Jusqu'au moment ou un procès de neuf mois se déroula en 2009, Grassi avait été reconnu coupable de deux actes d'abus et condamné à 15 ans de prison, mais il a été acquitté de plusieurs autres accusations portées par deux autres accusateurs.
Cette sentence a été confirmée par une cour d'appel en 2010. Grassi est actuellement en liberté après qu'un ordre d'assignation à résidence ait été annulé en Février dernier alors qu'il attendait les résultats d'un autre appel devant la Cour suprême de la province de Buenos Aires.

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Trois remarques peuvent être faites à propos de la réponse Bergoglio à l'affaire Grassi.

¤ Tout d'abord, les critiques ont accusé Bergoglio de ne pas avoir pris de sanctions ecclésiastiques contre Grassi, comme l'écarter de la prêtrise. En vertu du droit canon, cependant, une telle démarche devait venir de l'évêque de Morón, Luis Guillermo Eichhorn. Comme l'affaire s'est déroulée, le diocèse de Morón a dit qu'il attendrait le résultat définitif du système de justice pénale, ce qui ne s'est pas encore produit.

¤ Deuxièmement, lorsque le premier premier procès de Grassi a pris fin en 2009, la conférence des évêques a chargé un juriste bien connu en Argentine du nom de Marcelo A. Sancinetti d'étudier l'affaire. Bergoglio était le président de la conférence à l'époque, et un porte-parole des évêques, le père Jorge Oesterheld, m'a dit le cardinal avait approuvé la décision de procéder à un examen juridique indépendant.
Sancinetti a produit trois volumes à ce jour et travaille actuellement sur un quatrième, un total de plus de 1.000 pages de documents. (J'ai une copie du second volume de Sancinetti, qui examine les accusations pour lesquelles Grassi a été effectivement condamné).
Sancinetti conclut que Grassi est innocent de tous les chefs, insistant sur le fait que les accusations sont en contradiction avec les preuves et marquées par des contradictions internes. Les critiques affirment que Sancinetti utilise presque entièrement les arguments de la défense dans l'élaboration de cette évaluation, mais la croyance en l'innocence de Grassi reste forte dans certains milieux catholiques, ce qui peut aider à expliquer pourquoi Bergoglio a hésité à faire des déclarations ou à rencontrer des accusateurs (ndt: dans le cas de Benoît, on disait "les victimes"!!).
Oesterheld m'a dit que la position de base de Bergoglio dans le cas Grassi est qu'«il ne voulait pas précéder le système juridique», préférant attendre que le processus d'appel suive son cours avant de prendre toute décision.

. Troisièmement, il a été rapporté par certains organismes de presse que Bergoglio, ou l'église en général, a payé les frais judiciaires de Grassi. Selon son avocat, Daniel Cavo, ce n'est pas le cas.
Cavo m'a dit par un interprète que les frais de Grassi sont payées par de petits dons de personnes qui le soutiennent encore, lui et sa fondation "Happy Children", et qu'il n'a reçu aucune aide financière de l'église.

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LIGNES DIRECTRICES SUR LES ABUS
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Le 5 Avril, le Wall Street Journal rapportait que la conférence des évêques de l'Argentine n'a pas réussi à respecter la date limite de mai 2012 imposée par le Vatican pour se soumettre à un ensemble formel de règles sur la lutte contre la maltraitance des enfants, notant que Bergoglio est l'ancien président de la conférence.
Aux yeux de certains, ce délai non respecté soulève des questions sur le sérieux de Bergoglio sur la question des abus sexuels.

Quatre points aident à compléter l'histoire.

¤ Tout d'abord, la version originale de l'article du WSJ ne prend pas acte du fait que la fonction de Bergoglio en tant que président de la Conférence épiscopale argentine (CEA) a pris fin en Novembre 2011, donc au moins techniquement, la responsabilité d'avoir négligé la date limite du Vatican revient à son successeur en tant que président, Mgr José María Arancedo de Santa Fe.

¤ Deuxièmement, les évêques disent que l'ensemble des lignes directrices est près d'être achevé. Un projet sera discuté lors d'une réunion de la Conférence lundi (donc demain?) avant d'être ensuite transmis au Vatican pour examen, selon Mgr Sergio Buenanueva, évêque auxiliaire de Mendoza, qui a supervisé le processus.

¤ Troisièmement, les évêques disent qu'une raison pour laquelle il a fallu du temps pour finir le travail, c'est qu'ils voulaient attendre le Sommet sur la crise des abus, devant se dérouler en Février 2012 à Rome, à l'Université grégorienne, organisé en partie pour aider les Conférences qui n'avaient pas encore disposé de lignes directrices, à les rassembler. L'idée était de donner aux Conférences les information dont elles avaient besoin pour s'assurer que leurs politiques étaient conformes non seulement aux attentes du Vatican, mais aux meilleures pratiques dans d'autres parties du monde catholique, comme l'Allemagne et les États-Unis.
C'est fondamentalement une revendication crédible, étant donné que des représentants de plusieurs autres conférences avec qui j'ai parlé lors de cet événement disaient à peu près la même chose. Buenanueva a dit que quand les lignes directrices seront achevées, on allait adopter une «tolérance zéro» à l'instar du modèle américain.

¤ Quatrièmement, Oesterheld (ndt: donc le porte-parole des évêques d'Argentine) a dit qu'une autre raison pour laquelle le processus a pris plus de temps que prévu est que, pendant son mandat de président, Bergoglio était «très respectueux» du fait que chaque évêque a une relation directe avec le Vatican et le désir de ne pas «supplanter» cette autonomie est une des raisons pour lesquels cela prend du temps de forger des politiques communes.
Le même respect pour l'autorité locale, dit Oesterheld, entraînera vraisemblablement François à soutenir une plus large «décentralisation» en tant que pape, en faveur d'une plus grande latitude pour les églises locales et les conférences épiscopales.

Les enquêtes du site <www.bishop-accountability.org>

Il existe un site en anglais, problement américain, www.bishop-accountability.org , qui se donne pour tâche de "documenter la crise des abus sexuels dans l’Eglise catholique romaine” et (cf. rubrique “about us”) et de venir en aide aux victimes et à leurs familles".
Une définition qui suscite une méfiance légitime (on ignore qui se cache derrière) quand on se rappelle comment sous le Pontificat de Benoît XVI, les affaires de pédophile ont éclaté comme une bombe proprement satanique au beau milieu de l'année sacerdotale déclarée par le Pape, et les associations de victimes des prêtres pédophiles ont été utilisées pour discréditer l'Eglise et son Chef.

Mais ce qui est très troublant dans ce site, et qui m'induirait à croire en sa sincérité et en la véracité des faits décrits, c'est qu'il a un ton sobre, factuel, et surtout que tous les faits sont sérieusement documentés, avec des documents officiels irréfutables, tous indiqués en lien.
Bref, c'est du travail d'enquête solide, ce qui en ressort ne peut pas être repoussé d'un revers de main, et les faits évoqués recoupent ceux décrits par John Allen. En donnant des détails ultérieurs (qui n'étaient pas encore advenus lorque Allen a écrit son article). Par exemple, dans l'affaire Grassi, on apprend que ce dernier a finalement été reconnu coupable par la justice, et envoyé en prison en septembre 2013. Et en mars 2014, la conférence des évêques argentins n'avait toujours émis aucune déclaration publique importante sur les abus sexuels du clergé.
Notons (en hommage à la vérité) que l'affaire Rubén Pardo, dont il question ici, n'est pas sans rappeler une autre affaire , soulevée alors par le Süddeutsche Zitung, qui avait été reprochée à Benoît XVI en 2010: en 1980, un abbé coupable d'abus sexuels avait été transféré dans le diocèse de Münich pour suivre un traitement; mais au contraire de l'affaire Pardo, celle-ci avait connu un retentissement mondial et donner un nouveau démarrage au harcèlement contre le pape.

Evidemment, on pourra toujours objecter que le cardinal Bergoglio n'était pas au courant, qu'il ne pouvait pas savoir tout ce qui se passait dans son diocèse, encore moins dans toute l'Argentine, ou qu'il a pris des mesures en secret, ou encore qu'il croyait en toute bonne foi à l'innocence des "accusés". Tout cela est possible.
Mais le site www.bishop-accountability.org répond avec des arguments que je trouve objectivement convaincants.
J'ai traduit une partie de l'article que l'on trouvera en anglais ici: www.bishop-accountability.org/Argentina. Il renvoie à de nombreux liens (que je reproduis pas tous), et il est complété par une base de données répertoriant les prêtres argentins accusés (Database of Accused Argentine Priests)

Jorge Mario Bergoglio était archevêque de Buenos Aires de 1998 à 2013 et président de la conférence des évêques argentins de 2005 à 2011. Au cours de ces années, alors que des officiels de l'église aux Etats-Unis et en Europe commençaient à aborder la catastrophe des abus sexuels d'enfants par le clergé - et même que les papes Jean-Paul II et Benoît XVI faisaient des déclarations publiques - Bergoglio est resté silencieux sur la crise en Argentine.
Il n'a publié aucun document, n'a donné aucun nom de prêtres accusés, aucun décompte de prêtres accusés, aucune politique pour gérer les abus, pas même des excuses aux victimes.
Dans ses nombreuses homélies et déclarations (archivées sur le site Web de l'archidiocèse de Buenos Aires), il a attaqué la corruption du gouvernement, les inégalités de richesse, le trafic sexuel, mais il n'a rien dit sur les abus sexuels par des prêtres.
Dans le livre d'entretiens avec le rabbin argentin Abraham Skorka "Sur la Terre comme au ciel", il suggérait que le problème n'existait pas dans son diocèse (page 64):

Dans mon diocèse, ça n'est jamais arrivé, mais un évêque m'a appelé une fois au téléphone pour me demander ce qu'il faut faire dans une situation comme celle-là et je lui ai dit de retirer ses licences au fautif, de ne plus lui permettre d'exercer à nouveau son ministère sacerdotal, et d'engager un procès canonique devant le tribunal correspondant du diocèse. C'est à mes yeux l'attitude qui s'impose, je ne crois pas comme certains u'il faille maintenir un certain esprit de corporation pour préserver l'image de l'institution.

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QUESTIONS SUR LE RÔLE DE BERGOGLIO DANS CINQ CAS D'ABUS

Les facteurs qui ont suscité les divulgations par les évêques et les supérieurs religieux dans d'autres pays - action au civil par les victimes, enquêtes dans l'église par des procureurs, et enquêtes gouvernementales - ont existé peu ou pas du tout dans la capitale fédérale de Buenos Aires, qui est le territoire de l'archidiocèse. Par conséquent, presque aucune information n'a émergé sur la gestion directe par le cardinal Bergoglio de prêtres accusés. Seul un prêtre de l'archidiocèse de Buenos Aires - Carlos Maria Gauna - a été publiquement accusé. Mais dans les cas très médiatisés de quatre agresseurs d'enfants, venant de communautés religieuses ou d'autres diocèses - Grassi, Pardo, Picciochi, et Sasso - il est évident que Bergoglio, sciemment ou involontairement, a entravé les victimes dans leur combat pour dénoncer et poursuivre leurs agresseurs. Les victimes des quatre accusés disent qu'ils ont cherché l'aide du cardinal. Aucun d'entre eux ne l'a reçue, même ceux qui étaient pauvres, luttant à la périphérie de la société - les gens dont le pape François s'est fait le champion. (Selon l'ancien porte-parole de Bergoglio, le cardinal a refusé de rencontrer les victimes: documentation ici)

• Père Julio César Grassi -
Grassi a été reconnu coupable en 2009 d'avoir agressé un garçon qui vivait dans un foyer pour enfants des rues que Grassi avait fondé. Après la condamnation de Grassi, Bergoglio a commandé une étude secrète pour convaincre les juges de la Cour suprême de l'innocence de Grassi. L'intervention de Bergoglio est censé être au moins une partie de la raison pour laquelle Grassi est resté libre pendant plus de quatre ans après sa condamnation. Il a finalement été envoyé en prison en Septembre 2013. Résumé détaillé de l'affaire Grassi avec des liens vers des articles .

• Père Rubén Pardo -
En 2003, un prêtre atteint du SIDA qui avait avoué à son évêque avoir agressé sexuellement un garçon était découvert dans un presbytère dans l'archidiocèse de Buenos Aires, alors dirigé par Bergoglio, où il s'était caché pour échapper à la loi. Pardo aurait également entendu les confessions des enfants et enseigné dans une école à proximité. L'un des évêques auxiliaires de Bergoglio, qu'il rencontrait toutes les deux semaines, semble avoir vécu au presbytère en même temps. Habituellement, un ordinaire (donc l'évêque local) doit donner l'autorisation à un prêtre pour vivre et travailler dans son diocèse. Il est peu probable que Pardo a vécu et exercé son ministère à Buenos Aires sans l'approbation de Bergoglio. Résumé détaillé de l'affaire Pardo .

• Frère Fernando Enrique Picciochi, SM -
Après qu'une victime ait découvert que son abuseur avait fui l'Argentine pour les États-Unis, évitant l'application de la loi, la victime demanda l'aide de Bergoglio à être libéré de l'ordonnance de confidentialité imposée par l'ordre religieux aux clerc. Il a transmis sa demande de rencontrer le secrétaire particulier de Bergoglio et l'évêque auxiliaire, actuel archevêque Mario Poli. L'archidiocèse ne l'a pas aidé. Résumé détaillé de l'affaire Picciochi .

• Père Mario Napoléon Sasso -
En 2001, ayant été reconnu pédophile dans un centre de traitement géré par l'Église, Sasso fut nommé curé d'une paroisse très pauvre avec une soupe populaire dans le diocèse de Zárate-Campana. En 2002-2003, il a agressé sexuellement au moins cinq petites filles dans sa chambre. En 2006, avec Sasso en prison, mais pas encore condamné, les parents des petites filles auraient cherché l'aide de Bergoglio. Bergoglio était alors président de la conférence des évêques argentins, et la soupe populaire était à seulement 25 miles de l'archidiocèse de Buenos Aires. Bergoglio ne les a pas rencontrés. Résumé détaillé de l'affaire Sasso.

• Révérend Carlos Maria Gauna -
Gauna était un prêtre de l'archidiocèse sous la supervision directe de Bergoglio. En 2001, deux écolières ont déposé une plainte pénale disant que Gauna les avait touchées de façon inappropriée. Bergoglio devait se pencher sur le cas. Gauna travaille toujours dans l'archidiocèse de Buenos Aires. Il est maintenant diacre et aumônier dans un hôpital - indicateurs possibles que Bergoglio a considéré les accusations comme crédibles, mais a décidé de le rétrograder plutôt que de l'enlever de son ministère. Résumé détaillé de l'affaire Gauna.

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GESTION DES CLERCS ACCUSÉS PAR D'AUTRES ÉVÊQUES ARGENTINS ET SUPÉRIEURS RELIGIEUX

La stratégie de Bergoglio pour surmonter la crise à Buenos Aires - son refus en coulisses d'aider les victimes combiné avec un manque total de transparence - continue à être l'approche de la plupart des évêques d'Argentine et des supérieurs religieux.

Au 11 Mars, 2014, un an après que son prélat le plus puissant ait été élu pape, la conférence des évêques argentins n'a émis aucune déclaration publique importante sur les abus sexuel du clergé. Elle n'a pas non plus publié la politique de réponse aux abus qu'elle était censée finaliser et soumettre au Vatican en mai 2012. Ces politiques ont été publiés par les conférences épiscopales du Brésil, du Chili, et de la Colombie, ainsi que celles des États-Unis, du Canada , de l'Australie, et la plupart de l'Europe.

Au lieu de cela, comme la base de données (ndt: voir directement sur le site) le révèle, différents évêques et supérieurs religieux argentins ont pris parti publiquement pour les délinquants sexuels condamnés. Ils ont utilisé les menaces et les bâillons pour faire taire les victimes. Ils continuent à garder les prêtres accusés dans le ministère. Ils exploitent le faible signalement à la loi à la fois de l'Argentine et du Vatican - ils ne sont pas légalement tenus de signaler aux autorités civiles la plupart des abus sexuels sur des enfants commis par des prêtres. Ils ont permis à des agresseurs de s'échapper dans d'autres diocèses, d'autres pays, et à Rome. Ils ont fait valoir devant le tribunal que les parents sont à blâmer pour les agressions sexuelles de leurs enfants par des prêtres. Plus alarmant, ils ont appliqué ces pratiques récemment, comme le prouvent les exemples ci-dessous (ndt: à lire directement sur le site en anglais).

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En conclusion

A la lecture de tout cela, il n'y a certes rien qui indique formellement des fautes de l'ex-cardinal de Buenos Aires, mais la saleté dénoncée par Joseph Ratzinger lors de la dramatique méditation de la Via Crucis 2005 n'a pas épargné l'Argentine.
Alors, on peut se demander: n'y aurait-il pas pu y avoir d'argentins parmi les victimes qu'il a rencontrés lundi 9 juillet à Sainte Marthe? Leur présence aurait donné à sa demande de pardon un caractère plus personnel, donnant le sentiment d'une participation plus active, cela aurait été un signal vraiment fort pour dénoncer l'amplitude hélas mondiale du fléau. Evidemment, il est toujours plus facile de battre sa coulpe de façon "générique" sur la poitrine des autres.
C'est ce que demandait le site http://www.bishopaccountability.org dans un autre article, dressant une liste de six victimes qui en leur temps auraient demandé en vain l'appui du cardinal Bergoglio.

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