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Pas de commerce dans l'Eglise

A Sainte Marthe, énième philippique du Pape contre ses prêtres (qui risquent de finir par se lasser)... Article d'Antonio Socci, traduit par Anna (23/11/2014)

Lors de son homélie à Sainte Marthe, le 21 novembre, le Pape François, qui commentait l'évangile du jour, celui où Jésus chasse les marchands du temple, s'en est une fois de plus pris aux mauvais catholiques, en l'espèce aux mauvais prêtres... ceux qui font "payer" les sacrements aux fidèles.
Il aurait dû préciser dans quel pays cela se passe (SI cela se passe de la façon dont il le dit) car cette pratique ne semble pas courante sous nos latitudes... Et les curés (ou ce qu'il en reste) vont encore se sentir montrés du doigt. (voir à ce sujet cet article de don Ariel S. Levi di Gualdo).

Antonio Socci ne l'a pas vraiment bien pris non plus, et recommande (respectueusement) au Pape de s'en prendre aux vrais marchands du temple, l'Eglise allemande, si miséricordieuse et proche du peuple, mais qui récupère une manne gigantesque grâce au fameux impôt pour le culte, le Kirchensteuer, dont le défaut de paiement implique l'impossibilité de recevoir les sacrements.

Toujours à propos de marchands du temple, d'autres observateurs s'étonnent par ailleurs que le pape qui condamne avec une telle vigueur le "commerce" que des curés indignes feraient des sacrements, ait lui-même laissé entrer ces marchands dans le temple, en l'occurrence la chapelle Sixtine, en la louant à la société Porsche pour deux soirées (les 15 et 17 octobre derniers), où 40 invités "triés sur le volet" ont dû débouser près de 5000 euros chacun pour écouter un concert sous les fresques grandioses de Michel Ange, avant de participer à un repas de gala dans les salles du musée.
Evidemment, c'était pour la bonne cause... (www.ouest-france.fr/vatican-comme-porsche-louez-la-chapelle-sixtine-pour-200-000-euros)

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Note:
Il est de bon ton de critiquer ceux qui, s'improvisant thélogiens, s'érigent en censeur du pape, épluchant "mesquinement" ses homélies matinales à Sainte Marthe pour en découvrir ce qui "cloche". Personnellement, je ne les lis pas régulièrement, car très sincèrement, elles m'apportent rarement quelque chose (spirituellement, ou intellectuellement). Mais quand je les lis, il est bien rare que je n'y trouve pas matière à découragement, car je réalise à quel point je suis irrémédiablement mauvaise.
D'ailleurs, si ces homélies ne doivent pas être lues (et je pense qu'étant donné leur forme approximative, elles ne sont pas faites pour cela) pourquoi les publier sur le site du Saint-Siège, leur donnant de ce fait le statut de magistère papal?

     

Argent et sacrements (Antonio Socci)

Argent et sacrements? Cher Pape Bergoglio, veuillez contester les choquantes décisions des évêques allemands (comme le fit Ratzinger) au lieu de dénigrer nos curés. Celles-là sont la vraie honte!Lo Straniero, 21 novembre 2014
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La dénonciation d'aujourd'hui, par le Pape Bergoglio, du "scandale du commerce" dans le temple, a fait beaucoup de bruit :
"Je pense au scandale suscité chez les gens avec notre attitude, souligne le pape François, avec nos habitudes peu sacerdotales dans le Temple. Combien de fois voyons-nous en entrant dans une église, même aujourd'hui, qu'il y a une liste des prix pour le baptême, la bénédiction, les intentions pour la messe. Et le peuple est scandalisé".

Je ne sais pas s'il y en a en Argentine, mais moi, franchement, je n'ai jamais vu en Italie une église avec la liste des tarifs.
A juste titre le cardinal Bagnasco (président de la Conférence des Evêques italiens) a déclaré dans l'après-midi que les sacrements ne sont pas en vente, que dans les églises italiennes il n'y a pas de tarifs et que les libres offrandes des fidèles servent à soutenir matériellement l'église. Ce qui est parfaitement juste.
Certes, la dénonciation du Pape souligne une véritable question (la gratuité de la grâce et donc des sacrements), mais énoncée en ces termes elle risque de résonner comme une dénigrement des pauvres curés…

J'aimerais signaler par contre au pape Bergoglio un cas bien plus déconcertant de mauvaise relation entre les sacrements et l'argent, concernant l'Eglise allemande.
Au temps de Benoît XVI le Saint Siège a contesté ces décisions des évêques allemands. Il conviendrait que le pape Bergoglio s'occupe d'eux, au lieu de s'acharner sur les curés.
Du reste, il connaît bien l'épiscopat allemand, car celui-ci, très progressiste, a été son principal soutien lors du Conclave et a été le principal appui des thèses de Kasper au Synode.

Voici, extrait d'une page de mon livre "Non è Francesco", ce qu'il se passe en Allemagne:

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En dépit de la proclamée "Eglise des pauvres", l'Eglise allemande est une véritable puissance économique car elle bénéficie de colossales entrées de l'Etat, dues à la Kirchensteuer, la taxe ecclésiastique qui, en 2012, a canalisé en ses caisses 5,9 milliards d'euros. Pour être clair, c'est un chiffre huit fois supérieur au 8 pour 1000 de l'Eglise italienne, bien que l'Eglise allemande ne comprenne que 24,3 millions de catholiques (moins que la moitié des catholiques en Italie).
Le mécanisme aussi est différent. En Allemagne - en dépit de la séparation entre Eglise et Etat, tant encensée par les progressistes - il s'agit d'une véritable taxe imposée á ceux qui sont enregistrés á l' état civil comme catholiques (ce qui arrive aussi aux protestants au profit de l'Eglise évangélique).
La justice et le respect de la liberté voudraient qu'elle soit une taxe à laquelle on se soumet librement. Au contraire, elle est devenue pratiquement une sorte de "super-sacrement", supérieur au baptême, car la taxe et l'appartenance à l'Eglise coïncident et vous ne pouvez vous soustraire à la taxe que si vous sortez de l'Eglise, avec la très grave conséquence d'être considérés apostats et d'être exclus des sacrements (y compris les obsèques à l'Eglise).
Un décret de la Conférence épiscopale allemande a établi que le refus de la contribution implique, pour le fidèle, la cessation de son appartenance à l'Eglise".
Une telle position inouïe est contestée par le Saint Siège (au moins elle l'était à l'époque de Ratzinger) et déconcerte particulièrement car dans le même temps la majorité de l'épiscopat allemand fait pression pour une Eglise "miséricordieuse" et "proche du monde", avec la demande de communion aux divorcés remariés, le dépassement du célibat sacerdotal, l'assouplissement des "liens" en matière d'éthique sexuelle, etc.".

Le philosophe Robert Spaemann, ami de Joseph Ratzinger, a observé qu'en Allemagne, "des hommes niant la résurrection de Jésus restent professeurs de théologie catholique et peuvent prêcher en tant que catholiques. Par contre les fidèles qui ne veulent pas payer la taxe du culte sont chassés de l'Eglise. Il y a quelque chose qui ne va pas.

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