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Antonio Socci, 12 avril

Il commente brièvement la bulle Misericordiae Vultus proclamant le Jubilé, et les statistiques en provenance des Etats-Unis, sur le boom d'ordinations scerdotales. Et revient sur son cheval de bataille, les doutes sur le Conclave, avec de nouveaux arguments, plutôt convaincants.

Comment sera le jubilé
(alors qu'on découvre deux nouvelles irrégularités du Conclave)

www.antoniosocci.com
(ma traduction)
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Le Conclave de 2013 a vraiment été un désastre. Chaque jour qui passe voit émerger de nouveaux vices, plus graves l'un que l'autre. Et les profils d'invalidité se font de plus en plus consistants.
Les initiés le savent bien, mais aujourd'hui ils sont extrêmement «couverts» en raison d'une certaine atmosphère de répression qui ces derniers mois domine de l'autre côté du Tibre.

MOTS ET FAITS
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Atmosphère en totale contradiction pratique avec la répétition constante du mot «miséricorde» de la part du pape argentin.
Il en parle beaucoup, évidemment, dans la bulle «Misericordiae Vultus» proclamant le Jubilé, signée hier. Il y a des passages très beaux qui rappellent la compassion de Jésus envers tous, et l'amour maternel viscéral de Dieu pour chacun.
Mais on remarque aussi l'habituel alignement sur l'ordre du jour politiquement correct. Il y a en effet un certain accent mis sur les «péchés sociaux».
Il semble que les mafieux, les corrompus et les racistes soient les seuls qu'on puisse juger et condamner. L'évidence des peuples (?) qui nous permet à tous de nous sentir bons. C'est bien commode.
Quelqu'un (it.wikipedia.org/wiki/Domenico_Cacopardo ) a noté que, dans le discours de Pâques, au lendemain du massacre de 147 étudiants chrétiens au Kenya, Bergoglio a tonné contre les «traffiquants d'armes», catégorie qui toutefois «est un ennemi obscur et insaisissable» grâce auquel le pape ne nomme pas «l'ennemi évident et visible» qui accomplit ces massacres.
Plus généralement, Bergoglio attaque frontalement les infractions au Code pénal, mais il ne dit presque rien pour les péchés ordinaires de confessionnal, qui sont plutôt déclassifiés: au contraire, le pape s'en prend à ceux qui évoquent la justice de la loi morale (dans l'enseignement du pape Argentin la notion de «péché originel» est floue...).

DÉSASTRE LATINO-AMÉRICAIN
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Des contenus encore plus «gauchisants» (contre le profit, les inégalités, la finance) seront exposées dans l'encyclique sociale à venir, déjà anticipée dans le discours que Bergoglio a prononcé devant les centres sociaux, parmi lesquels Leoncavallo (le 28 octobre 2014; cf. benoit-et-moi.fr/2014-II) .
Le pape argentin nous ramène donc au climat idéologique que nous avons connu en Italie dans les années soixante-dix, le gauchisme de l'Eglise latino-américaine, imprégné des différentes théologies de la libération.
Ce n'est pas par hasard que cette Église, depuis des décennies, coule à pic, à la fois par la défection massive des fidèles, et le gouffre des vocations.
A l'opposé, là où l'enseignement de Jean-Paul II et de Benoît XVI a été entendu et où s'est formé un épiscopat - pour ainsi dire - fermement catholique, les fruits sont extraordinaires (cf. L'héritage de Ratzinger).
Aux États-Unis - ce sont des donnés de ces jours-ci - en 2015 il y aura près de 600 ordinations sacerdotales. L'année précédente, il y en avait eu 477: plus 25% en une seule année.
«C'est l'un des plus robustes signes de reprise après une crise pluridécennales des vocations, commencée peu de temps après la fin du Concile, en concomitance avec l'explosion de 68», écrit la revue <Il Timone>, qui ajoute qu'il s'agit de vocations qui ont fleuri dans les années de Benoît XVI, qui ont la spiritualité typique de Wojtyla et Ratzinger («70% d'entre eux, avant d'entrer au séminaire, avaient l'habitude de prier le chapelet ou de participer à l'adoration eucharistique.»).
L'Eglise américaine, qui porte la marque de Wojtyla et de Ratzinger, est très impliquée dans le zèle missionnaire et les batailles de frontière sur les «principes non négociables».
C'est ce que les médias laïques appellent une «Église conservatrice», comme l'Eglise africaine, vivante et en expansion, dont les évêques, lors du dernier Synode, ont été décisifs pour arrêter la «révolution» Kasper.
Il est clair que Bergoglio est sur une autre route. Avec lui se profile un pontificat de rupture. Y compris dans les gestes et les habitudes.

AUTRE IMBROGLIO (*)
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A dire vrai, le conclave qui l'a élu allait déjà dans cette direction. Et plus tôt on en discutera publiquement, mieux ce sera pour tous. Même pour le Pape Bergoglio qui aurait tout intérêt à faire la clarté.
J'ai identifié dans mon livre «Non è Francesco» trois infractions aux règles, qui en soi peuvent rentrer parmi celles qui impliquent la nullité de l'élection.
A présent s'en ajoutent deux autres, tellement évidentes qu'elles m'ont été signalées par plusieurs lecteurs.

>> La première. Entre l'annonce de la renonciation, le 11 Février 2013, et le début de la vacance, le 28 Février, Benoît XVI a signé le Motu proprio «Normas nonnullas» pour intégrer et changer de petites parties de la constitution qui régit l'élection du pape, «Universi Dominici Gregis» (JP II, 1996).
L'article 37 a été formulé par Ratzinger en ces termes:

« J'établis aussi que, à partir du moment où le Siège apostolique est légitimement vacant, on attendra les absents pendant quinze jours pleins avant d'entrer en conclave ; je laisse toutefois au Collège des Cardinaux la faculté d'anticiper l'entrée en conclave si tous les Cardinaux électeurs sont présents ou, s'il y a des motifs graves, de renvoyer de quelques jours le commencement de l'élection. Toutefois, passés vingt jours au plus depuis le début de la vacance du siège, tous les Cardinaux électeurs présents sont tenus de procéder à l'élection »

Selon cet article, donc, le Conclave devait commencer après le 15 Mars, puisque le siège vacant avait commencé le 28 Février.
Le Collège des Cardinaux pouvait anticiper le Conclave seulement avec la «présence de tous les cardinaux électeurs» (norme dûe à des accidents graves dans le passé).
En fait, le Conclave de 2013 a été anticipé, par décision de la huitième congrégation générale du Collège des Cardinaux tenue l'après-midi du 8 Mars 2013.
«Le directeur de la Salle de presse a rappelé que, depuis hier, les 115 électeurs sont tous présents» lit-on dans l'article de «L'Avvenire», le 9 Mars, signé Mimmo Muolo.
Mais si les cardinaux présents étaient 115 et les électeurs étaient 117, il en manquait deux: Julius Darmaatmadja et, pour des raisons différentes, Keith O'Brien, qui, bien qu'ayant envoyé leurs motivations, acceptées par les cardinaux, étaient toutefois restés à tous effets «cardinaux électeurs», de sorte qu'à tout moment ils pouvaient venir à Rome et entrer en conclave, même après qu'il ait commencé (art. 39 de Universi Dominici Gregis : «Cependant, si des Cardinaux électeurs arrivent re integra, c'est-à-dire avant que l'on ait procédé à l'élection du Pasteur de l'Église, ils seront admis au processus de l'élection, au point où il se trouve»).
Le même «Avvenire» relevait leur absence. Avec cette absence, cependant, le Collège des Cardinaux n'était pas complet tel que prévu par le Motu Proprio et ne pouvait pas décider d'avancer le conclave qui a élu le cardinal Bergoglio le 13 Mars, un jour où le conclave n'aurait même pas dû avoir commencé.
Comment a-t-il alors été possible de prendre cette décision?

FUMÉE
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>> Mais il y a une autre violation. On sait que lors du quatrième tour de scrutin du 13 Mars, on a trouvé un bulletin qui en contenait un autre, en excès, qui était resté collé.
En application de l'article 68 d'Universi Dominici Gregis, il a été décidé d'annuler le vote et d'en faire immédiatement un autre.
Dans mon livre, j'ai considéré qu'il y avait dans cette décision deux violations des règles, parce qu'on devait appliquer l'article 69 (ne pas annuler le tour de scrutin, mais seulement ce bulletin) [Au cas où, au cours du dépouillement du scrutin, les scrutateurs trouveraient deux bulletins pliés de telle sorte qu'ils apparaissent remplis par un seul électeur, ces bulletins seront tenus pour un seul suffrage s'ils portent l'un et l'autre le même nom. Si, au contraire, ils portent deux noms différents, aucun des deux suffrages ne sera valide ; cependant, dans aucun des deux cas le scrutin ne sera annulé] et on ne pouvait pas voter à nouveau parce que les règles pontificales imposent qu'il n'y ait pas plus de quatre tours de scrutin par jour (art. 63).
Toutefois, si on voulait vraiment appliquer l'article 68, on devait l'appliquer intégralement.
En fait, celui-ci impose, une fois annulé le scrutin, de brûler les bulletins avant de procéder à un nouveau vote (Si le nombre des bulletins ne correspond pas au nombre des électeurs, il faut les brûler tous et procéder aussitôt à un deuxième vote - «Quodsi schedularum numerus non respondet numero electorum, omnes comburendae sunt, et iterum, id est altera vice, ad suffragia ferenda procedatur»).
Il y a une raison importante pour laquelle Jean-Paul II, Dans Universi Dominici Gregis, prescrit cela: pour éliminer de la Chapelle Sixtine tout bulletin déjà voté, de sorte que le prochain vote ne puisse même pas hypothétiquement être pollué par des bulletins déjà votés ou suspects. Donc, il fallait les brûler immédiatement.
Mais l'après-midi du 13 Mars, il n'y eut pas cette deuxième fumée noire pour le quatrième scrutin annulé.
Il y eut seulement, à 19h06, la fumée blanche du cinquième tour de scrutin. Pourquoi?

Il est nécessaire de déterminer s'il y a eu (aussi) ces deux violations, parce que - le cas échéant - il est très probable qu'elles puissent représenter une cause de nullité de l'élection.
L'article 76 d'Universi Dominici Gregis affirme en effet: «Si l'élection était faite d'une manière différente de ce qui est prescrit dans la présente Constitution ou que les conditions fixées ici n'aient pas été observées, l'élection est par le fait même nulle et non avenue, sans qu'il y ait besoin d'aucune déclaration à ce sujet, et, donc, elle ne donne aucun droit à la personne élue.»

Dans ce domaine, la miséricorde n'a rien à voir. Au moins ici, la loi devrait régner, souveraine.

Note de traduction

(*) Anna observe toutefois à ce sujet:

Un point me laisse perplexe, le fait de citer les deux cardinaux absents comme une irrégularité.
Je me souviens qu'un des deux était malade, l'indonésien, et l'autre, le "corrompu" Keith O'Brien n'aurait pas participé à cause d'investigations déjà en cours. Et cela le père Lombardi l'avait dit dans une conférence de presse avec les journalistes. Il y avait même un deuxième cardinal O'Brien et un journaliste, le confondant avec le "méchant", demandait au père Lombardi comment il était possible qu'il participe au Conclave, recevant la réponse de Lombardi que les O'Brien étaient deux...

Il n'était donc pas possible que ces deux cardinaux arrivent à la dernière minute. L'argument de Socci n'est pas assez fort.

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