Page d'accueil | Pourquoi ce site

L'Eglise cède au monde

... sur le réchauffement climatique provoqué par l'homme. Suite

>>> Voir aussi dans ces pages:
¤ L'Eglise se convertit à l'idéologie mondialiste
¤ Un portrait de Jeffrey Sachs

>>> Ci-contre: le cardinal Turkson, président du Conseil Pontifical Justice et Paix.

A lire Radio Vatican (cf. capture d'écran ci-contre, faite aujourd'hui 1er mai sur la section en français), le Saint-Siège semble très impliqué dans la "lutte contre le réchauffement climatique".

Quelques articles récents:
¤ Le Vatican se mobilise pou la protection de l'environnement
¤ L'ONU, dans l'attente de l'encyclique sur l'écologie
¤ Des pays inégaux face aux déréglements du climat
¤ Le Vatican lie la luttre contre la pauvreté à celle contre le changement climatique

Dans le dernier article de cette liste, daté du 27 avril, on peut lire:

Alors que se prépare la conférence de Paris sur le climat, prévue en décembre prochain, le Vatican accueille mardi un symposium sur la dimension morale du changement climatique et du développement durable, organisé par l’Académie pontificale des Sciences et le Conseil pontifical Justice et Paix.
Cette conférence réunissant des scientifiques de haut niveau et des représentants des différentes religions du monde doit se dérouler en présence du secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, du chef de l’État italien, Sergio Mattarella, et de la présidente du mouvement des Focolari, Maria Voce.
...
Le Saint-Siège a associé à l’organisation de ce séminaire la coalition interreligieuse internationale « Religions for Peace », une ONG fondée en 1970 et qui mise sur la force de la coopération multi religieuse et le « Programme d’actions des Nations Unies pour le développement durable ». Car il y a une cohérence entre les valeurs du développement durable et celles des principales traditions religieuses, attentives aux plus vulnérables. Le Symposium devrait aboutir à une déclaration conjointe sur l’impératif moral et religieux du développement durable.
A noter que le Pape François travaille actuellement à son encyclique sur l’écologie dont la publication est attendue fin juin. Le Saint-Père a placé cette question en tête des nouvelles priorités de l’Église. Pour lui, la destruction de la nature constitue un péché moderne. La Création, a-t-il rappelé à plusieurs reprises, a été confiée aux hommes pour qu’ils la protègent et pas pour qu’ils en deviennent les prédateurs. Les chrétiens ont donc le devoir de respecter la Création, de prendre soin de la terre et de ses fruits et de tenir compte de ses lois.
Le Vatican a d’ailleurs accueilli l’appel lancé par Nicolas Hulot aux forces spirituelles. L’envoyé spécial du président français pour la protection de la planète a récemment affirmé que sur le front de l’écologie, il voyait l’Église monter en puissance.
En décembre prochain à Paris, les délégations de 195 pays devront trouver un accord mondial pour réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre afin de préserver les équilibres écologiques de la planète. Le Pape François souhaite qu’ils aboutissent à un texte ambitieux. C’est aussi pour lui une question spirituelle et éthique qui doit éveiller les consciences.

Ceux qui en ont envie et se débrouillent en anglais liront ICI avec un intérêt nuancé de perplexité le discours que le cardinal Turkson, président de Justice et paix, a prononcé en ouverture du Syposium.
Au milieu de propos parfaitement respectables (comme toujours dans ces situations) on trouve ceci:

«Donnons l'exemple! Imaginez quel message positif ce serait pour les gens de foi non seulement de prêcher la durabilité, mais de vivre une vie durable! Par exemple, pensez quel message positif ce serait si les églises, mosquées, synagogues et temples à travers le monde pouvaient devenir "zéro émission"».

Le communiqué final signé par les participants (ICI en anglais) ne laisse aucune place au doute: pour l'Eglise de François, le réchauffement climatique est bien dû à l'homme:

(ma traduction)
28 Avril 2015
Nous, soussignés, nous sommes rassemblés à l'Académie pontificale des sciences et des sciences sociales pour relever les défis du changement climatique provoqué par l'homme, de l'extrême pauvreté et de la marginalisation sociale, y compris la traite des personnes, dans le contexte du développement durable. Nous nous rejoignons à partir de nombreuses confessions et horizons de vie, reflétant l'aspiration commune de l'humanité pour la paix, le bonheur, la prospérité, la justice et la durabilité environnementale. Nous avons examiné les preuves scientifiques accablantes concernant le changement climatique induit par l'homme, la perte de la biodiversité, et la vulnérabilité des pauvres aux chocs économiques, sociaux et environnementaux.
Face aux situations d'urgence du changement climatique induit par l'homme, de l'exclusion sociale et de l'extrême pauvreté, nous nous unissons ensemble pour déclarer que:

> Le changement climatique d'origine humaine est une réalité scientifique, et son atténuation décisive est un impératif moral et religieux pour l'humanité;
Dans cet espace moral fondamental, les religions du monde jouent un rôle très important. Ces traditions affirment toutes la dignité inhérente à chaque individu, liée au bien commun de toute l'humanité. Elles affirment la beauté, l'émerveillement et la bonté inhérents au monde naturel, et reconnaissent que c'est un don précieux qui est confié à notre soin commun, faisant notre devoir moral de respecter plutôt que de ravager le jardin qui est notre maison;

> Les pauvres et les exclus font face à de graves menaces à cause des perturbations climatiques, y compris la fréquence accrue des sécheresses, tempêtes extrêmes, vagues de chaleur, et élévation du niveau de la mer;

> Le monde a à sa portée technologique, les moyens financiers et de savoir-faire pour atténuer le changement climatique tout en mettant fin à l'extrême pauvreté, à travers l'application de solutions de développement durable, incluant l'adoption de systèmes énergétiques à faible émission de carbone soutenus par les technologies de l'information et des communications;
> Le financement du développement durable, y compris l'atténuation [du changement] climatique, devrait être renforcée par de nouvelles incitations à la transition vers les énergies "bas-carbone", et par la poursuite incessante de la paix, ce qui permettra également le passage du financement public des dépenses militaires vers des investissements urgents pour le développement durable;
> Le monde doit prendre conscience que le sommet sur le climat à Paris plus tard cette année (COP21: Conférence des parties de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques de 2015, cf. www.cop21.gouv.fr) pourrait être la dernière possibilité effective de négocier des arrangements qui maintiennent le réchauffement induit par le CO2 en dessous de 2°C, et visent à rester bien en dessous de 2°C par sécurité, mais la trajectoire actuelle pourrait bien atteindre un dévastateur 4°C ou plus;

> Les dirigeants politiques de tous les Etats membres des Nations Unies ont une responsabilité particulière à parvenir, au COP21, à un accord audacieux sur le climat, qui confine le réchauffement de la planète à une limite de sécurité pour l'humanité, tout en protégeant les pauvres et les plus vulnérables des changements climatiques en cours qui mettent en péril leur vie. Les pays à revenu élevé devraient aider à financer les coûts d'atténuation du changement climatique dans les pays à faible revenu, comme les pays à revenu élevé ont promis de le faire;

> L'atténuation du changement climatique nécessitera une transformation rapide du monde vers un monde alimenté par un énergie renouvelable et autre "bas carbone" et la gestion durable des écosystèmes. Ces transformations doivent être effectuées dans le cadre du consensus mondial sur les Objectifs du développement durable, conformément au but de mettre un terme à l'extrême pauvreté; assurant l'accès universel aux soins de santé (!!), une éducation de qualité, l'eau potable, et l'énergie durable; et coopérant pour mettre fin à la traite des êtres humains et à toutes les formes d'esclavage moderne;

Tous les secteurs et les parties prenantes doivent faire leur part, une promesse sur laquelle nous nous engageons pleinement selon nos capacités individuelles.

Je laisse le (long) mot de la fin au directeur de La Bussola, Riccardo Cascioli, une des rares voix catholiques qui ose s'élever pour dénoncer la grave dérive dans laquelle l'Eglise s'engage imprudemment:

Climat et Eglise, on revient à avant Galilée

Riccardo Cascioli
29/04/2015
www.lanuovabq.it
(ma traduction)
-----

«Comment pouvons-nous jouir du développement durable sur une planète bondée? (...) Il y a deux siècles, le penseur britannique Thomas Malthus a averti qu'une croissance démographique excessive compromettrait le progrès économique. Telle est la menace que nous avons encore devant nous aujourd'hui .... ».
C'est ce qu'affirmait à CNN, le 21 Octobre 2011, Jeffrey Sachs le «prophète» du développement durable, grand protagoniste hier au Vatican du Congrès sur le développement durable et le changement climatique. Non seulement il était le principal orateur, mais le président du Conseil Pontifical Justice et Paix, le cardinal Peter Turkson, a donné ses théories en exemple: «Nous sommes dans l'ère du développement durable et nous devons faire les justes choix, des choix moraux», a dit Turcson, invitant à lire le nouveau livre de Sachs, distribué pour l'occasion (As the title of Jeffrey Sachs's new book – copies of which are here today – says, we are living in the age of sustainable development, and it is up to all of us to make the right choices, the moral choices; texte en anglais ICI).

Voilà celui à qui est confiée la pensée catholique en termes d'économie et d'environnement, à un néo-malthusien incapable même de reconnaître que l'histoire a amplement démenti Malthus. Et ce n'est pas que la pensée de Sachs, Conseiller spécial du Secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon pour les "Objectifs du Millénaire", soit un secret. Le contrôle des naissances a toujours été l'un des piliers de sa pensée. Il suffit de penser que, dans un article de 2004, il adressait des reproches aux pays occidentaux qui s'inquiétaient de la dénatalité dans leurs pays. Fous que vous êtes, disait Sachs, vous ne réalisez pas votre chance, il y aura «de grands bénéfices pour les sociétés avec des populations stables ou progressivement déclinantes: plus de richesse et moins de pression sur l'environnement.
Et en effet, on a vu ce qui est arrivé au cours de ces dix dernières années. Quand on parle de pensée non catholique qui s'est insinuée dans l'Église, c'est aussi à cela qu'on se réfère.

Et pourtant, c'est à ce genre de «prophètes» que l'Eglise semble aujourd'hui vouloir faire confiance pour l'élaboration de sa doctrine sociale, abandonnant cette vision réaliste et cette sagesse, cette capacité de voir au-delà des modes, car ancrée aux valeurs éternelles, qui, jusqu'ici, l'avaient caractérisée.

De ce point de vue, même l'intervention du cardinal Turkson hier présentait au moins deux points critiques, en plus de l'encensement de Jeffrey Sachs, qui n'est pas pour rien membre de l'Académie pontificale des Sciences sociales.

La première question est la confusion entre thèses scientifiques et actions morales. Le Président de Justice et Paix a pris pour acquise la thèse du réchauffement global anthropique (qui est causée par l'homme), une question loin d'être close du point de vue scientifique, l'élevant au niveau de vérité de la foi qui nécessite donc une action morale immédiatement. Il a mélangé des lieux-communs pseudo scientifiques - comme la relation de cause à effet entre les combustibles fossiles et le changement climatique - avec les principes religieux, ramenant l'Église en arrière de 400 ans (évidemment, la responsabilité n'est pas seulement la sienne, mais c'est une tendance inquiétante au sommet de Église). Il a fallu 350 ans et Jean-Paul II pour clore l'«affaire Galilée», précisant que la Bible ne doit pas être interprétée comme si elle était un manuel de sciences. Et voilà que de façon fictive, nous mélangeons à nouveau ensemble la doctrine de la création et les politiques climatiques, comme si l'une descendait de l'autre. On peut comprendre alors pourquoi tellement de gens attendent de la prochaine encyclique du pape François l'impulsion pour lutter contre le changement climatique, et pourquoi Greenpeace a même publié hier une lettre ouverte de remerciement au pape François pour ses initiatives «écologiques».

Et pourtant, c'est le pape François lui-même qui a pris ses distances de certaines positions qui confondent doctrine et problèmes scientifiques. Dans la conférence de presse dans l'avion au retour du récent voyage en Asie qui l'avait mené en Corée et aux Philippines, en réponse à un journaliste allemand qui l'interrogeait à propos de l'encyclique sur l'environnement, le pape François a précisé:
«Mais à présent, c’est un problème pas facile, parce que sur la sauvegarde de la création, l’écologie, l’écologie humaine aussi, on peut parler avec une certaine assurance jusqu’à un point donné. Puis, arrivent les hypothèses scientifiques, dont quelques unes sont sûres, d’autres non. Et une Encyclique de ce genre, qui doit être magistrale, doit se fonder seulement sur les certitudes, sur les choses qui sont sûres. Parce que, si le Pape dit que le centre de l’univers est la terre et non le soleil, il se trompe, parce qu’il dit une chose qui doit être scientifique ; et ainsi, ça ne va pas. C’est ce qui se passe maintenant. Nous devons étudier, numéro par numéro ; et je crois qu’elle deviendra plus petite. Mais, on ira à l’essentiel et à ce qui peut s’affirmer avec certitude. On peut dire en note de pied de page, « sur ce point, il y cette hypothèse, celle-ci, celle-là… », le dire comme information, mais pas dans le corps d’une Encyclique, qui est doctrinale et doit être sûre.»

La deuxième question concerne le rôle de l'Église et des catholiques face aux problèmes liés à l'environnement, qui ne manquent pas. Le point original du catholicisme est de reconnaître que, justement en tant que Création, il existe un ordre naturel établi par le Créateur, qui a placé l'homme au sommet de la Création, unique créature vivante faite à l'image et à la ressemblance de Dieu. L'expérience bénédictine nous montre que ceux qui vivent en «cherchant Dieu» rendent encore plus belle la création, en plus de rendre la vie plus humaine, et au contraire, le désordre environnemental découle de la rupture du lien avec Dieu, qui peut générer l'exploitation sauvage d'une part et la déification de la nature de l'autre. Voilà pourquoi la première contribution que l'Eglise peut donner à la question de l'environnement est l'évangélisation et cela est aussi le sens profond de l'«écologie humaine».

Mais c'est une prise de conscience qui semble s'être obscurcie, diluée dans un œcuménisme écologiste qui apparaît comme le «bras éthique» d'un pouvoir mondial: toutes les religions ensemble pour donner une consistance morale à l'engagement que les agences de l'ONU nous demandent pour la santé de la planète. Face à des sécheresse prolongées ou des inondations soudaines, non plus des processions, des prières, des messes; non, à présent, l'ordre est de réduire les émissions de dioxyde de carbone. Aujourd'hui, «la pleine conversion des cœurs et des esprits» signifie pour les leaders religieux être des «modèles» de durabilité, a dit hier le cardinal Turcson: «Donnons l'exemple! Imaginez quel message positif ce serait pour les gens de foi non seulement de prêcher la durabilité, mais de vivre une vie durable! Par exemple, pensez quel message positif ce serait si les églises, mosquées, synagogues et temples à travers le monde pouvaient devenir à "zéro émission"». («So let religious leaders step up to the plate! Let us lead by example! Think of the positive message it would send for people of faith to not only preach sustainability but to live sustainable lives! For example, think of the positive message it would send for churches, mosques, synagogues, and temples all over the world to become carbon neutral».)

Ce ne sont pas les idées loufoques d'un cardinal, c'est la mauvaise habitude qui prévaut dans l'Eglise: la même conception se retrouve dans la «conversion écologique» établie par l'ordre des Jésuites; dans les diocèses ou les paroisses où l'on annonce comme un «geste prophétique» l'installation de panneaux solaires sur les églises paroissiales; dans les «gestes de carême» où parmi les pratiques de conversion est indiquée la collecte des déchets; dans les concours pour l'«Eglise durable».

Bref, le vrai changement de climat qui devrait nous inquiéter est celui que l'on observe dans l'Église.

  Benoit et moi, tous droits réservés